Le sexe des énergies pulsionnelles.

Dr Bernard Auriol

 
 

Introduction

Je tenterai ici de caractériser les énergies pulsionnelles et de déterminer s’il est commode d’en envisager seulement une ou s’il est plus pertinent d’en considérer deux. Dans l’un et l’autre cas, peut-on rattacher l’énergie considérée à un sexe plutôt qu’à l’autre ?


Ce travail devrait nous amener à considérer

La Libido et son Sexe

Remarques terminologiques
 
 

Pulsion (" Trieb ")

Charge énergétique liée à une excitation interne, qui pousse le sujet à évacuer la tension corporelle qu’il ressent en atteignant un objet répondant à cette excitation... La pulsion appartient à la fois aux registres psychique et somatique. En tant que poussée, la pulsion est irrépressible mais n’implique pas nécessairement tel but et tel objet précis.

Freud décrit des pulsions sexuelles (l’Amour) et des pulsions d’auto-conservation (la Faim)

Plus tard, il oppose les pulsions de vie (l’Amour) aux pulsions de mort (la Discorde)

Libido

C’est une énergie psychique qui La pulsion sexuelle va apparaître comme nouée à la pulsion de mort. Le principe de plaisir, qui régit le cours du processus libidinal, sera subordonné au principe de constance. Le Surmoi, représentant de la pulsion de mort, prend en charge la désexualisation de la pulsion de vie à mise hors circuit de l’objet libidinal, à la faveur de laquelle s’engagera l’entreprise de la sublimation.
 
Tableau 1
distinction de types, selon l’opposition, quant à l’investissement amoureux 
Chakra ¯
Type Freudien
2° topique
pulsion
processus
Zone pulsionnelle
(VII)

Ajna

obsessionnel 
Surmoi
(mouvement descendant de réduction des tensions : pulsion de mort)

thanatos ¯

principe de constance

sublimation

désexualisation

épistémique
(VI)

Vishudda

narcissique-obsessionnel 
   
formation réactionnelle
vocale
(V)

Anahata

narcissique 
moi
   
phallique
(IV)

Manipura

érotico-narcissique 
   
refoulement
anale
(III)

Swadisthana

érotique 
     
orale
(II)

Muladhara

érotico-obsessionnel 
ça
( mouvement ascendant augmentant les tensions : pulsion de vie)

éros ­

principe de plaisir
olfactive
(I)

Sahasrara

érotico-obsessionnel-narcissique 
     
labyrinthique ?

 

Freud et le sexe de la libido
 
 

Freud décide de considérer séparément les facteurs déterminant la libido et ceux qui provoquent l’angoisse. Il a renoncé à voir dans la libido l’élément mâle et dans le refoulement l’élément femelle

Il faisait l’hypothèse de la nature masculine de la Libido en avril 1907 après y avoir renoncé en novembre 1897 ! Il y revient en janvier 1909 : " le fait que le diable soit masculin étaye l’idée que la libido est masculine ". Tout ce qui est libido a un caractère masculin, tout ce qui est refoulement, un caractère féminin. Mais nous trouvons à cette idée des corrections : " Les concepts de ‘masculin’ et ‘féminin’ ne valent rien en psychologie et, (...)peuvent ne représenter que le caractère de l’activité et de la passivité. " " Il n’est qu’une seule libido au service de la fonction sexuelle tant mâle que femelle "
 
 

" La libido de nos pulsions sexuelles coïnciderait avec l’Eros des poètes et des philosophes qui maintient la cohésion de tout ce qui vit. " En quoi elle s’oppose à la pulsion de mort ! Mais Freud présentait l’image de Vénus comme l’enveloppe illusoire sous laquelle se dérobe la fatalité de la mort. Ainsi l’objet libidinal trahit dans son statut d’illusion, la subordination à la pulsion de mort de la pulsion sexuelle.
 
 

" Quand la phase primaire du pur narcissisme est terminée et que les objets d’amour ont commencé à jouer leur rôle, la libido charge trois accumulateurs :

que nous pourrions réordonner comme suit :

Lacan
 

L’originalité de la conception de la libido chez Jacques Lacan tient à l’origine qu’il lui assigne.

Lorsque avec Freud nous nous représentons la libido comme " masculine ", encore convient-il donc de s’interroger sur la portée de ce concept. Il est précisément essentiel à la pensée freudienne d’y intégrer la castration ; non moins essentiel, en ce qui touche la libido féminine, d’y intégrer le " penisneid " (envie, jalousie par rapport au pénis).

De là résulte que, de part et d’autre, la libido se polarise sur un manque. De ce fait se comprend la nature de l’objet, sous les espèces de " l’objet a " – qui est de la nature d’une " chute " en provenance de la chaîne signifiante, sur le fondement de la carence de l’Autre. Le problème est alors de discerner ce qui, de ce manque, peut transparaître à travers l’" objet " libidinal, autrement dit, quelle part prend la pulsion de mort à sa constitution.

Initialement, en effet, et dans la mouvance de la cure cathartique, le processus libidinal est censé se dérouler de façon linéaire, de l’excitation organique à son assomption psychique. À mesure que s’est développée la théorie, et, en définitive, du moment où s’est trouvée prise en considération la relation à l’objet, c’est tout un faisceau de processus hétérogènes que le concept est appelé à désigner. Il faudra donc que soit intégrée sous le commun dénominateur d’une " pulsion " sexuelle la source d’énergie dont les processus " libidinaux " traceront les voies de liquidation.

Freud n’hésite pas à évoquer, dans la section traitant des transformations de la puberté sous le titre de " La Découverte de l’objet ", l’attachement le plus archaïque du nourrisson à sa mère, en tant qu’" objet sexuel ". Il déclare que " ce n’est qu’après avoir dépassé la période de latence que le rapport originel se rétablit. Ce n’est pas sans raison que l’enfant au sein de la mère est devenu le prototype de toute relation amoureuse. Trouver l’objet sexuel n’est en somme que le retrouver ! "

" La conduite des enfants, dès l’âge le plus tendre, indique que leur attachement aux personnes qui les soignent est de la nature de l’objet sexuel [...]. Ils sont angoissés dans l’obscurité, car on n’y voit pas la personne aimée, et cette angoisse ne s’apaise que lorsqu’ils peuvent tenir sa main [...]. L’enfant se comporte dans ce cas comme l’adulte : sa libido se change en angoisse dès le moment qu’elle ne peut atteindre à une satisfaction ; et l’adulte, devenu névrosé par le fait d’une libido non satisfaite, se comportera dans ses angoisses comme un enfant. "

" On pourra avec certitude ", dans le cas général des névrosés, " démontrer que le mécanisme de la maladie consiste en un retour de la libido aux personnes aimées pendant l’enfance ".

Théorie du développement de la pulsion

Sources de la pulsion

Quant aux sources, elles sont organiques, qu’il s’agisse des pulsions partielles ou de la pulsion génitale qui se les intégrera :

" Quand nous distinguons l’énergie de la libido de toute autre énergie psychique (...) écrit Freud, nous supposons que les processus sexuels de l’organisme se distinguent des fonctions de nutrition par un chimisme particulier. L’analyse des perversions et des psychonévroses nous a fait connaître que cette excitation sexuelle ne provient pas seulement des parties dites génitales, mais de tous les (...) organes. Nous nous formons ainsi la notion d’une libido qu’on pourrait fixer quantitativement, (...) dont la production, l’augmentation et la diminution, la répartition et les déplacements devront nous fournir les possibilités d’explications des phénomènes psychosexuels qui tombent sous l’observation. "
 
 

But de la pulsion

Quant au but, les pulsions partielles tendront à la satisfaction locale dont est susceptible chaque zone érogène, tandis que la pulsion génitale se mettra au service de la fonction de reproduction en assumant les excitations organiques émanant de la " zone " génitale. " Elle devient, écrit Freud, pour ainsi dire altruiste. " À cet altruisme, la libido est l’exigence de donner un objet. Mais quelle est l’intensité de cette exigence, de cet appétit ou " faim " sexuelle ?
 
 

Le sexe de la libido à la lumière de la castration

" Jadis, la nature humaine n’était pas ce qu’elle est aujourd’hui ; elle était bien différente. L’humanité se divisait en premier lieu en trois genres et non en deux, comme présentement. Avec les sexes mâle et femelle, il en était un troisième qui participait des deux. Ce genre s’appelait alors ‘androgyne’. Le corps de chacun de ces androgynes était d’apparence arrondie. Ils avaient en cercle le dos et les côtes ; ils possédaient quatre mains, des jambes en nombre égal aux mains, deux visages parfaitement semblables, opposés l’un à l’autre sur une tête unique, quatre oreilles, deux organes générateurs, etc. Il avançait en faisant la roue avec tous ses membres. Originairement, le mâle était un rejeton du soleil ; la femelle de la terre ; de la lune enfin, celui qui participe de l’un et l’autre ensemble, attendu que la lune aussi participe des deux autres astres ensemble. Ils s’attaquèrent aux dieux par orgueil. Zeus décide de les fendre en deux pour calmer leur impudence.
- ‘Mais s’ils continuent encore, je les couperai à nouveau en deux, de façon à les faire déambuler sur une seule jambe, à cloche pied’

Cette division étant faite, chaque moitié désirait s’unir à son autre moitié. Lorsqu’elles se rencontraient, elles s’enlaçaient de leurs bras et s’étreignaient si fort que, dans le désir de se refondre, elles se laissaient ainsi mourir de faim et d’inertie, car elles ne voulaient rien l’une sans l’autre entreprendre. " Nous savons que le trône offert par Héphaïstos à la déesse Héra l’en fera prisonnière !

La notion platonicienne de l’Eros repose sur le mythe de l’unité de l’androgyne sphérique primordial. Jacques Lacan le reprend sous la forme très concrète de l’œuf. Considérons cet œuf dans le ventre vivipare : " Chaque fois que s’en rompent les membranes, c’est une partie de l’œuf qui est blessée [...]. À la section du cordon, ce que perd le nouveau-né, ce n’est pas [...] sa mère, mais son complément anatomique. Ce que les sages-femmes appellent le délivre. " Eh bien ! Imaginons qu’à chaque fois que se rompent les membranes, par la même issue un fantôme s’envole : à casser l’œuf ", poursuit Lacan, " se fait l’Homme, mais aussi l’Hommelette ".
 
 

Changeons, en effet, le nom d’omelette pour celui de " lamelle ", dont l’étymologie témoigne qu’il en est l’origine. L’image de la lamelle et le mythe qui l’introduit " paraissent assez propres, dit Lacan, à figurer autant qu’à mettre en place ce que nous appelons la libido ". La libido en effet, précise-t-il, est " cette lamelle qui glisse l’être de l’organisme à sa véritable limite, qui va plus loin que celle du corps ". Plus généralement, sur ce modèle qu’est le mythe, on pourra dire que la lamelle " représente cette part du vivant qui se perd à ce qu’il se reproduise par les voies du sexe ". C’est de cela, " que sont les représentants, les équivalents, toutes les formes que l’on peut énumérer de l’objet a. Les objets a  n’en sont que les représentants, les figures. Le sein – comme équivoque, comme élément caractéristique de l’organisation mammifère, le placenta par exemple – représente bien cette part de lui-même que l’individu perd à la naissance, et qui peut servir à synthétiser le plus profond objet perdu ". Tomatis, dans la foulée, fera du cordon ombilical la première icône du phallus.

S’agit-il maintenant de donner de cette lamelle une représentation théorique, on remarquera d’abord que, prélevée sur cette expression géométrique d’une suffisance à soi qu’est la sphère, elle est de la nature d’une surface ; comme telle, elle a un bord : " La lamelle a un bord, indique Lacan ; elle vient s’insérer sur la zone érogène, c’est-à-dire sur l’un des orifices du corps, en tant que ces orifices, toute notre expérience le montre, sont liés à l’ouverture - fermeture de la béance de l’inconscient. "

" L’important, déclarait-il, est de saisir comment l’organisme vient à se prendre dans la dialectique du sujet. Cet organe de l’incorporel dans l’être sexué, c’est cela de l’organisme que le sujet vient à placer au temps où s’opère sa séparation. C’est par lui que de sa mort, réellement, il peut faire l’objet du désir de l’Autre. Moyennant quoi viendront à cette place l’objet qu’il perd par nature, l’excrément ou encore les supports qu’il trouve au désir de l’Autre : son regard, sa voix. C’est à tourner ces objets pour en eux reprendre, en lui restaurer sa perte originelle, que s’emploie cette activité qu’en lui nous dénommons pulsion. Il n’est pas d’autre voie où se manifeste dans le sujet l’incidence de la sexualité ".
 
 

Le Phallus

Il s’agit de désir, désir dont le meilleur symbole est le phallus ; même si c’est au clitoris que va le terme libido ! En effet Libido vient du latin, " libet, lubet " (il plaît), du sanskrit " lubh, à l’allemand lieben  ou à l’anglais love. Ludwig August Kraus rappelle que le clitoris est appelé " Sedes libidinis " c’est à dire " siège de la libido ". La libido est ainsi présentée comme l’apanage de la sexualité féminine. Cela mis à part, la racine étymologique du terme ne décide pas de son sexe. La libido, lorsqu’elle désigne le rut (de rugire, rugir) ou son équivalent humain, s’appliquera sans discrimination à la " chaleur " sexuelle du mâle et de la femelle. Au terme du chapitre des Nouvelles Conférences sur la psychanalyse  consacré en 1932 à la " féminité ", Freud s’était interrogé sur le sexe de la libido ; et il concluait qu’elle était de nature masculine : " Nous avons donné à la force pulsionnelle de la vie sexuelle, écrivait-il, le nom de libido. La vie sexuelle est dominée par la polarité virilité-féminité ; rien de plus naturel que d’étudier la situation de la libido par rapport à cette opposition. Nous ne serions pas surpris qu’à toute sexualité correspondît une libido particulière ". Cette position sera celle de Mélanie Klein et Ernest Jones. Contrairement à la suite du texte freudien déclarant : " En vérité, cependant, tel n’est pas le cas. Il n’est qu’une seule libido, laquelle se trouve au service de la fonction sexuelle tant mâle que femelle. Si, en nous fondant sur les rapprochements conventionnels faits entre la virilité et l’activité, nous la qualifions de virile, nous nous garderons d’oublier qu’elle représente également des tendances à buts passifs ". Klein et Jones ont contesté cette sexuation de la libido jugée phallocratique. Pour eux les femmes ont un désir spécifique et, naturellement, de nature féminine !

Dans diverses cultures, les dieux ithyphalliques, symbolisés par un pénis en érection, font référence à la fécondité de la nature et, pourrait-on dire avant la lettre, à la pulsion de vie : ils sont invoqués pour se protéger contre la maladie et repousser la mort. Ils sont associés à toutes sortes de rites orgiaques qui ont motivé leur condamnation par les trois monothéismes ! Le Phallus d’Osiris est l’objet que sa sœur Isis ne pourra jamais retrouver et qui sera à la source de son désir et de sa quête ! La légende égyptienne le désigne ainsi comme signifiant le désir dans son universalité et non dans sa liaison (contingente) à l’image d’un autre.

Appartenant au corps de l’homme, il est perdu, distinct du Sujet, et ne peut lui être identifié ! " Il est signifiant de la perte même que le sujet subit par le morcellement du signifiant. " Lacan est ainsi fondé à faire du Phallus le signifiant même du désir, en l’écrivant avec une majuscule et en le catégorisant selon les registres de l’Imaginaire (" Phallus de la mère ") et du Symbolique (Phallus du Père). Le désir est la métonymie du manque à être et le phallus représente la métonymie du désir. La libido n’est autre que l’énergie psychique du Désir ! Tentative impossible d’Etre le Phallus ou de l’Avoir ! Nous verrons que le yoga en connaît au moins trois ! (Phallus de la base, du cœur et de la tête) ... A ceci près qu’on l’insère dans un triangle pointe en bas qui l’abouche à l’ouverture qu’il a pour fonction d’obturer.

Voir l'intéressant texte de Litza Guttieres-Green :
Le Masculin et le Féminin chez Freud, Winnicott et les autres
 
 

Le Refoulement et son sexe
 
 

Dans le refoulement : " le souvenir dégage la même puanteur qu’un objet actuel. De même que nous détournons avec dégoût notre organe sensoriel (tête et nez) des objets puants, de même le préconscient et notre compréhension consciente se détournent du souvenir. C’est là ce qu’on nomme refoulement. " Les représentations refoulées font pression pour faire retour dans l’univers conscient et le maintien du processus dépense une grande quantité d’énergie. La première fixation responsable de toutes les " attractions refoulantes " est appelée refoulement originaire et s’explique par l’effraction du pare excitation, à savoir l’éblouissement perceptif probablement contemporain de la naissance ou des premiers jours de la vie qui mettent le nouveau-né en présence d’excitations sur dimensionnées, notamment au niveau externe (lumière, sons), au niveau interne (faim, soif, douleur) et à la jonction de ces deux niveaux (respiration)... Il s’agit d’excitations non gérables...

Le pare-excitation a pour Freud une signification physiologique. " Il situe les organes sensoriels sous le pare-excitation global ". On trouve dans les recherches contemporaines relatives aux oto-émissions-acoustiques du nouveau-né une éclatante confirmation du bien fondé d’une telle approche.

Freud devine aussi qu’il existe des fluctuations cycliques du système perception-conscience ce que les recherches les plus récentes sur l’attention spontanée ou volontaire confirment pleinement (" inexcitabilité périodique ") !

Le refoulement originaire et le refoulement en général ont partie liée avec le ça même si le Surmoi intervient dialectiquement. L’énergie du refoulement attire les représentations vers les zones de fixation qui sont, en dernière analyse, responsables de ce processus. Elle a un caractère " passif ", " primitif ", " originaire " et se rattache symboliquement à la Terre Mère. Ce mécanisme fait appel au principe de Constance.

Si ce mécanisme a quelque rapport avec la réalité, nous devrions être en mesure d’en déceler les effets non seulement chez l’être humain, mais plus généralement chez tout mammifère : c’est dire que nous devrions être en mesure de créer chez le chien ou le chat une pathologie névrotique en favorisant une " fixation " à un stade très précoce de son développement.

Il ne s’agit pas d’envisager la tension, issue d’une énergie non liquidée, mais des vicissitudes d’organisations stratifiées. Freud écrit " Je pars de l’hypothèse que notre mécanisme psychique s’est établi par un processus de stratification : les matériaux présents sous forme de traces mnémoniques se trouvent de temps en temps remaniés suivant les circonstances nouvelles. Ce qu’il y a d’essentiellement neuf dans ma théorie, c’est l’idée que la mémoire est présente non pas une seule mais plusieurs fois et qu’elle se compose de diverses sortes de signes. "

On distinguera cinq registres, correspondant :

Nous sommes là devant des " groupes de représentations " avec lesquels la tension endogène (somatique) prend contact, de manière à " susciter de la libido psychique ". Dans la perspective d’une stratification, ces " groupes " se déterminent comme des types d’enregistrement de signes.

D’un côté, sur le versant organique, les sources de l’excitation se stratifient génétiquement dans leur inhérence à des " zones " corporelles ;

de l’autre côté, du " contact " de ces sources diversifiées avec la diversité génétiquement ordonnée des couches de signes surgissent des types spécifiques d’organisations psychiques libidinales.

Le refoulement s’appuie sur deux hypothèses auxiliaires :

l’abandon de " zones " anciennes

Il s’agit de l’abandon d’anciennes zones sexuelles [...] les régions anale, buccale et pharyngienne. Cet abandon se fait de deux manières :

leur aspect et leur représentation ne doivent plus provoquer l’excitation ;

les sensations internes qui en émanent ne fournissent plus d’apport à la libido, comme le feraient les organes sexuels eux-mêmes [...].

l’action différée.

La décharge sexuelle (genre de sécrétion que l’on doit ressentir exactement comme un état intérieur de la libido) ne se produit pas seulement

par des stimuli périphériques des organes sexuels ;

par une excitation interne provenant de ces organes ;

mais aussi à partir des représentations (donc de traces mnésiques), c’est-à-dire par la voie de l’après-coup (action différée).

De cette action différée dérivera le refoulement : en effet, poursuit Freud, " il peut normalement y avoir une action différée non névrotique, et c’est d’elle que peut émaner la compulsion. Une semblable action différée, cependant, agit en connexion avec les souvenirs d’excitation venant de zones sexuelles abandonnées ; or il n’en résulte aucune décharge libidinale, mais bien une décharge de déplaisir, une sensation interne analogue au dégoût ressenti dans le cas d’un objet ". Ce dégoût qui nous détourne d’un objet à l’odeur nauséabonde.

Le refoulement est plutôt une attraction du refoulé originaire sur les contenus qui seront refoulés qu’une éjection par le moi de contenus dont il ne voudrait pas. Ce mécanisme du refoulement en tant qu’ " attraction " par le refoulé est ce qui a pu faire dire à Freud que le refoulement serait de nature féminine.

Plus tard Freud reformule, les acquis antérieurs de sa conceptualisation de la libido. Il constate que les incidents de l’enfance qui n’intéressent que les organes génitaux, ne produisent pas de névrose chez l’homme mais seulement une masturbation compulsionnelle. Ces mêmes incidents peuvent aboutir au refoulement et à la névrose, s’ils ont également affecté les deux autres zones sexuelles – la libido se trouvant alors éveillée par une action différée. Un incident se rapportant, par exemple, à l’anus ou à la bouche engendrera uktérieurement une forme de dégoût . C'est qu'une certaine quantité de libido, « empêchée de se muer en acte ou de se traduire psychiquement, se verra contrainte à s’engager dans une voie régressive (comme il arrive dans les rêves) ». « J’ai donc décidé, conclut Freud, de considérer séparément les facteurs déterminant la libido et ceux qui provoquent l’angoisse. J’ai également renoncé à voir dans la libido l’élément mâle et dans le refoulement l’élément femelle

Jung, Adler, Reich

Adler et Jung envisagent le " type " caractériel comme la consécration d’un " intérêt " privilégié, et Freud l’admet aussi. Mais le différend porte sur la conception de l’intérêt. Les deux premiers excluent de la définition de l’intérêt toute référence à l’appétit sexuel, soit que l’intérêt, comme le veut Adler, se réduise à la " revendication virile ", soit qu’il soit assimilé par Jung, sous le terme de " libido ", à l’énergie d’un élan vital Bergsonien.

De la critique de Jung à l’Eros

Jung a développé, en rupture avec Freud, la notion d’une " libido " désexualisée, assimilée, selon ses propres termes, à l’élan vital de Bergson ou à la notion la plus générale d’un " intérêt " existentiel, et qui par ailleurs échapperait à toute détermination contraignante du passé, dans la mesure où elle représenterait l’exigence d’une autonomie d’un sujet tourné vers l’avant.

Ce qui est en jeu dans l’opposition de Freud à Jung, c’est la position accordée à l’objet dans la définition de la libido.

La libido jungienne s’assimile à l’énergie d’une existence singulière s’accomplissant dans le monde, à l’exclusion de toute visée d’objet. C’est pourquoi elle est désexualisée.
 
 

La " Revendication Virile " d’Adler

(non développé)

" L’Orgone " de Reich

(non développé)

l’énergie dans le yoga

Pour le yoga, il existe une source commune à toutes les pulsions, située à la base du tronc. Elle se divise en deux manifestations :

Il y a alternance de ces deux courants.

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