« Le vandalisme c'est dé-truire pour le plaisir de détruire ou d'infliger une marque de sa propre puissance à son adversaire ». Bernard Auriol, psychiatre et psychanalyste porte sur les actes de vandalisme le regard du spécialiste. L'agressivité manifestée « comble une forme d’anxiété » selon Bernard Auriol. Cette anxiété est d'après lui, imputable « à l'environnement de l'enfant avant que de l’être à lui : parents, influence des images télévisées ou ciné-matographiques, phénomènes de groupes et de leaders ».
Le passage à l'acte serait éga-lement le résultat d’un processus avec au centre le désespoir :
« l'enfant répond parfois à une agressivité reçue. S'il a l'impression que l'école ou la société ne lui ouvrent pas de perspective en matière d'intégration sociale, son énergie se transformera et se retournera contre les instruments du travail. L'école en fait partie ».
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Une démonstration que ne dé-ment pas l'inspecteur d'acadé-mie René Dunoyer : « le vanda-lisme n'est pas un acte complètement gratuit. Les élè-ves éprouvent des difficultés pour se situer dans le système. Ils ne se sentent pas chez eux à l'école ; ils ne sont pas bien inté-grés. Ils ont une histoire et des besoins et l'école ne répond pas toujours à ses besoins ».
L'analyse courageuse de Re-né Dunoyer est complétée par un directeur d'école: « les gamins sont livrés à eux-mêmes. Leur défoulement traduit un abandon, résulte d'une incompréhension et indique quelque chose ». Un directeur d'école a trouvé la solution : il ouvre ses lieux pour dédramatiser la situation: « il faut que les enfants s'approprient le lieu et le défendent mê-me en dehors du temps scolaire. Ils surveillent ainsi indirecte-ment l'école puisqu'ils ont des choses à y vivre ».
Cette politique d'ouverture constitue une décision audacieuse qui donne
peut-être du sens à ce lieu qu'est l'école. Car à
entendre Jean-Pierre Drodelot, inspecteur de l'Education Nationale dans les
quartiers de la Reynerie et de Bellefontaine, « beaucoup d'enfants
ne donnent pas beaucoup de sens au savoir et à l'école. Pour eux,
seule la vie active et le travail procurent du sens. En situation diffi-cile,
ils disqualifient l'école au nom du réalisme ». Et
Jean Pierre Drodelot de parler, lui aussi, d'appel... Un appel qui serait la
conséquence selon Bernard Auriol « d'un climat délétère
de désespoir où l'estime de soi et les notions d'espoir ont peu
à peu
disparu ».
Le vandalisme serait alors une quête, un dernier message adressé à la société. Un malaise.
Laurent BENAYOUN
in La Dépêche du Midi, Grand Toulouse, Mardi 28 Mars 1995, p.19
16 Novembre 2010