Dr Bernard Auriol
1- 300
Si on admet que le système adrénergique n'entre en jeu que dans les situations
- des plus minimes aux plus importantes - de stress, l'antagonisation de ce
système ne devrait produire des effets que chez les sujets stressés, en diminuant
leur réaction aux traumatismes : l'effet à attendre serait favorable chez
les sujets hyper- stressables, défavorable chez les sujets normo-stressables soumis à des stress moyens, favorable chez les sujets normo- stressables
soumis à des stress exagérés, etc. On pourrait dès lors, comparer la mise
en jeu du système nor- adrénergique en réponse au stress à celle du système
CRF - ACTH - corticoïdes dans d'autres formes d'agression.
1-310
Les études effectuées sur le comportement des animaux ou des sujets
humains soumis à des drogues bêta - bloquantes ont, dans plusieurs cas,
laissé dans l'ombre l'effet psychotrope de ces agents : propranolol (86),
practolol (45). Il convient de reprendre ces études avec une méthodologie
différente dans laquelle interviendrait l'intensité relative du stress par
rapport aux sujets d'étude et en essayant de spécifier les sujets -
situations mettant en jeu de façon exagérée le système nor- adrénergique :
il est probable qu'une bonne proportion des malades mentaux rentre dans cette
catégorie, notamment ceux atteints d'affections réagissant mal aux drogues qui
agissent surtout sur le système dopaminergique (en particulier les
neuroleptiques incisifs) ou ayant un impact nor - adrénergique global
(alpha- bêta,). En effet. il ne serait pas surprenant qu'au niveau central
comme au niveau périphérique (en cardiologie...) on ait souvent intérêt â ne
bloquer que l’un des deux types de récepteurs.
1- 320
A l'appui de § 1- 310, les travaux de Frankenhauser M. (53) (54)
montrent que toutes les situations caractérisées par la nouveauté,
l'incertitude ou le changement provoquent une augmentation de la sécrétion
d'adrénaline dont l’intensité est étroitement liée à celle de la réaction
subjective au stress. Les sujets qui secrètent
plus d’adrénaline ont tendance à réaliser des performances meilleures en terme
de rapidité, précision, et endurance s'ils travaillent dans des conditions
d'effort modéré, alors que cette tendance est inversée dans des conditions de
travail intensif. La nor- adrénaline ne semble pas, dans sa sécrétion
périphérique, dépendre des mêmes facteurs.
1- 330
D'autres auteurs (43) (53) (56) (100) (142) ont montré que les sujets
soumis à des stress de toute nature voyaient leur taux de nor- adrénaline
et d'adrénaline augmenter ; mais chacun de ces deux corps peut croître de
manière privilégiée suivant la nature de la situation anxiogène et des
dispositions préalables du sujet.
Le système inhibiteur de l’action (SIA) (ou « Behavioral Inhibitory System (BIS) » en anglais) a été mis
en évidence par Henri Laborit au début des années 1970. Il est associé au
système septo-hippocampal, à l’amygdale et aux noyaux de la base. Il reçoit
des input du cortex préfrontal et envoie ses outputs à travers
les fibres noradrénergiques du locus coeruleus et par les fibres
sérotoninergiques du raphé médian. Certains reconnaissent d’ailleurs un
rôle majeur à la sérotonine dans ce système. |
L'anxiété accompagnée d'un renoncement à l'action ou d' une
impossibilité d'agir[1]
se traduirait par une forte sécrétion
d'adrénaline, sans modification très notable de la noradrénaline L'anxiété
accompagnée d'une attitude active ou agressive se caractériserait
biologiquement par une plus forte sécrétion de noradrénaline. On a décrit ces
phénomènes chez le singe rhésus, les joueurs de hockey, les, pilotes
militaires. et leurs passagers, des sujets en situation de compétition par
rapport à une tâche perturbée à dessein. D'un point de vue psycho- pathologique,
l'anxiété du premier type, c'est à dire non accompagnée d'action, que nous
appellerons anxiété "passive", ou "négative", pourrait être corrélée à titre d’hypothèse à
différents mécanismes tels que : refoulement, déni, somatisation, etc... Son
abolition par un quelconque procédé pouvant donner le jour à d'autres formes
d'anxiété et en particulier à l'anxiété "active", "positive" dont nous avons parlé. Cette anxiété
"positive" se manifesterait au plan psycho- pathologique par
des "passages" à l'acte", des "perversions", actes
délinquanciels, activité pragmatique et socialement utile, expression des
émotions profondes, insomnie, manie et hypomanie, etc…
1- 331
Une explication de l'effet des bêta- bloquants sur les névroses
cardiaques et sur l'anxiété névrotique en général (31), (30), (42.) (68), (98),
(137), (143) s'appuie sur les expériences cliniques de Frölich et coll.
(55) ; ils ont montré que chez des patients souffrant de névrose
cardiaque, une perfusion d'isoprénaline pouvait provoquer une crise
d'hystérie ne cédant pas aux placebos, alors qu'elle était rapidement
réversible grâce à une perfusion de propranolol.
1- 340
Comment les taux relatifs de Nor- Adrénaline et d'Adrénaline au
niveau périphérique sont - ils liés à des attitudes et des situations
psychologiques spécifiques ?
On peut prendre en considération les remarques suivantes
a) si ces amines ne passent que très faiblement et en des endroits
sélectifs la barrière hémato- encéphalique, il suffit peut - être de
très faibles quantités, en des lieux particuliers pour déterminer des effets
importants et il n'est pas nécessaire de rapporter toute action psychique des
catécholamines à un effet indirect, périphérique (contre l'opinion de Capon)
(28) qui explique ainsi leur action sur la vigilance (action qui n' est
effective que si la S.R. mésencéphalique est intacte) (11), (19), (20), (22),
(93), (97), (122).
b) l'état du système neuro- végétatif et la distribution des tensions
permanentes dans le système musculaire ont peut-être une portée capitale
(différente de celle que Lange leur attribuait),
c) il peut exister une harmonie fonctionnelle à vectorialité homogène
entre la"périphérie" représentée par deux systèmes (à Adrénaline ou
à Nor- Adrénaline) et l'encéphale représenté en cela par deux (ou
davantage) systèmes centraux (à Nor-Adrénaline, à Dopamine, à Sérotonine,
etc..).
Cet ensemble fonctionnel pouvant, éventuellement, être considéré comme complémentaire ou/et antagoniste d’un système périphérique à acétyl- choline et d'un système central à acétyl-choline (et éventuellement comprenant d’autres médiateurs). L'excès d'un système ou d'un ensemble fonctionnel ou son dysfonctionnement pourrait éventuellement être corrélé à certains grand cadres voisins de la classification nosographique classique, qui mettraient en liaison catécholamines en excès et leptosomie- schizophrénie d’une part, acétyl- choline en excès et pycnie-maniaco- dépressive d'autre part,(très schématiquement et hypothétiquement !).
d) l'état de la "périphérie" n ‘est pas seulement cause ou
conséquence de l’état cérébral, encore moins de l'état psychique.
Périphérie et Centres sont réciproquement cause et conséquent, ici comme dans les systèmes purement (?) biochimiques (endocriniens par exemple), ou purement (?) bio- électriques (Réflexes conditionnés par exemple),
1- 350
Un travail méconnu parait tout à fait intéressant dans sa confrontation
à l’essai clinique que nous présentons, comme le signale son auteur dans
une communication personnelle => les
infiltrations d’anesthésiques au niveau du ganglion stellaire provoqueraient
une amélioration instantanée et spectaculaire dans certaine cas de mélancolie.
Cet effet ne serait pas constant dans sa durée, (83)(84.
Les débat entre tenants de l'émotion « périphérique » et de
l'émotion « centrale » n'est pas clos pour autant (et ne le sera pas
tant qu'on réduira la psychisme au cerveau) (cf aussi § 3- 010)
1 –360
Au cours de notre étude clinique nous avons cru constater que si le
comportement n'était pas toujours amendé de façon spectaculaire, ou suivant
les souhaits du milieu hospitalier, il était assez généralement transformé
dans le sens du passage de 1’anxiété "négative" à l’anxiété
"positive" (cf § 1- 320 et § 1- 330)
; les manifestations observables vont de la manie ou de l’hypomanie dans
quelques cas (par ex § 3- 22)j, à l'agressivité clastique ou plus feutrée
(par ex § 3- 55 et § 3- 17), en passant par la libération d'une
expressivité affective plus diversifiée (par ex, § 3- 17), l'activité
"réaliste" adaptée (§3- 01) ou un activisme accompagné
d'insomnie (par ex § 3- 21).
J'ai eu l'impression que ces différentes façons de réagir étaient liées
à l'histoire du sujet et aux réactions de l'entourage (notamment en fonction de
l'histoire de l'hospitalisation et des conflits latents propres à l'équipe
soignante).
Simultanément, on observait la disparition du délire (par ex. §3- 54),
de symptomes de type névrotique (par ex. § 3- 26), d'attitudes de
retrait, de passivité ou d'autisme (par ex. § 3- 16).
Toutes ces modifications semblent bien dues à l'usage du pindolol et
ne nous ont pas parues explicables par un simple effet placebo ou par la
suppression du traitement antérieur que nous avons parfois maintenu (par ex § 3- 01)
ou qui n'existait pas (par ex § 3- 42).
1- 370
Les travaux d'Atsmon et coll. (5), (6), (7) et ceux de Volk et colt,
(151), qui utilisent du propranolol et de l'oxprénolol semblent conduire à des
conclusions assez différentes.
En effet, ils utilisent avec succès ces bêta- bloquants pour réduire,
non seulement le délire (comme nous cf § 1- 360), mais aussi et surtout
l'agitation psycho- motrice qui l'accompagne ou existe seule. Les
populations traitées comprenaient en effet des maniaques et des psychoses
dissociatives aiguës en phase d'excitation. Dans ces cas, il nous paraîtrait
tout aussi profitable d'essayer un bloquant de la dopamine- bêta- hydroxylase
...
1- 371
La contradiction n'est peut être qu'apparente, dans la mesure ou les
doses employées par ces auteurs sont très supérieures à celles que nous avons
nous même utilisées. Une autre hypothèse serait la suivante : aussi bien
l'oxprénolol que le propranolol sont caractérisés par leur propriété quinidine- like,
distincte de l'action bêta- bloquante et dont le pindolol est quasiment
dépourvu. Cette propriété est liée à des modifications apportées par certaines
drogues au métabolisme cellulaire calcique, On sait l'importance du calcium
dans les phénomènes neuronaux...
Pour trancher ce débat il conviendrait d'examiner si de hautes doses de pindolol ont un effet sédatif similaire à celui des hautes doses d'oxprénolol ou de propranolol. On pourrait aussi traiter des déprimés ou des athymormiques par de faibles doses de propranolol. Au moins dans un cas, de manière assez démonstrative, cette épreuve a été faite (cf § 3- 01) et il nous parait judicieux de retenir l'idée que la différence d'action tient essentiellement à la dose et moins aux propriétés quinidine like du propranolol ou de l'oxprénolol.
quelques notes le 18 Décembre 2007