Ecriture et variations du Caractère

(Revue La Graphologie ; 1, 125, 43-44, Janvier 1972)

Bernard Auriol

  Certains caractérologues prétendent définir l'individu à l'aide d'une formule qui rendrait compte de son « caractère », et qui serait valable pratiquement pendant toute la durée de sa vie. Il s'agit sous une forme remaniée (par simple amputation des données biologiques) de la très ancienne et respectable théorie des tempéraments. Dans cette façon de voir le vrai et l'irréel se mêlent inex­tricablement et nous nous proposons d'essayer de démêler quelque peu cet écheveau.


La doctrine des tempéraments sous une forme plus « scientifique » a été remise en honneur par des travaux modernes ‑ je veux parler de Kretschmer, Sheldon, etc. -, mais elle ne peut sous cette forme avoir de valeur « prédictive » puisqu'il s'agit de simples corrélations statistiques tendant à prouver  sans doute qu'il est plus probable de trouver tel trait de caractère dans le cadre d'un tempérament défini, mais qui ne nous assure pas qu'on I’ y trouvera...

Cette remarque concerne évidemment toutes les typologies... D'autre part, classer un individu en fonction de son degré actuel d'émotivité, d'activité, de retentissement, etc. ... ne signifie pas que ce même degré se retrouvera trois ans ou même trois mois après... Par conséquent cette appréciation actuelle peut rendre probable les types de comportement qui y sont rattachés par la caractérologie mais uniquement dans l'instant présent (entendu en un sens large).

Que le degré d'émotivité varie est susceptible de variation, je n'en veux pour preuve que les effets du climat, de l'ionisation, de la situation sociale, ou encore l'action des tranquillisants et des neuroleptiques...

Par rapport aux variations du degré d'activité, les mêmes remarques peuvent être faites et nous avons montré au Congrès de Monaco qui avait pour objet les rapports de la caractérologie et de la psychiatrie que l'auto observation du schizophrène avant et après chimiothérapie accuse une différence statistiquement significative de son degré d'activité caractérologique. L'observation des mêmes malades montre évidemment la même chose : diminution de l'athy­mormie, de l'inhibition psychomotrice, de l'indifférence à l'ambiance, etc. Le retentissement était également affecté dans le sens d'une diminution de la secondarité...

Qu'on ne nous objecte pas que c'est l'intervention biologique qui est seule en cause, que c'est en modifiant le  « tempérament » que nous avons modifié le caractère... Outre qu'il nous paraît rétrograde de faire appel au vieux dualisme cartésien, une autre remarque permet d'affirmer que les conditions sociologiques elles aussi peuvent modifier la formule caractérielle : ainsi notre étude a montré qu'il existait une différence significative (au seuil de .01) d'un point de vue statistique entre les schizophrènes anciennement hospitalisés et ceux qui !'avaient été plus récemment...

Cette simple note pour nous inviter à la prudence dans la prédiction du com­portement et pour suggérer aux utilisateurs de la graphologie de préciser au mieux la situation dans laquelle se trouvera le candidat dont on veut prévoir les réactions.

Bernard AURIOL.

 

Nous pensons que Bernard Auriol a raison de nous inciter à la prudence, mais que les variations dont il parle n'excluent pas une relative constance dans les données de base d’un tempérament, d'un caractère. L’individu  « normal » ne se définit-il pas par une certaine unité et identité de la personnalité ? [NDLR - Revue "La Grapohologie"]

 

Remarque ultérieure (2010)

  L'étude de la mécanique impliquée dans l'écriture et dans tout acte graphomoteur nous ouvre de très intéressantes perspectives, notamment en ce qui concerne les phénomènes universels dans lesquels tout sujet écrivant est forcément inclus. Il est étrange que les graphologues n'aient pas pris en considération ces phénomènes purement mécaniques, ni même d'ailleurs, nombre de contraintes physiologiques transindividuelles. Il n'est pas moins étrange que les neurophysiologistes intéressés par la graphomotricité soient totalement imperméables aux variations significatives inter-individuelles et intra-individuelles motivées par des phénomènes psycho-sociaux et psychodynamiques.

[Cf. la très belle thèse STAPS de Isabelle SALLAGOÏTY : Dynamique de coordination spontanée de l'écriture, Toulouse III, 2005]

L'étude de l'écriture a fait l'objet d'un intéressant N° de Human Movement Science, 30, 4, 2011

 

Google
  Web auriol.free.fr   


Psychosonique Yogathérapie Psychanalyse & Psychothérapie Dynamique des groupes Eléments Personnels

© Copyright Bernard AURIOL (email : )

MAJ 2 Juillet 2011