Yamina Guelouet, PhD, MD, Psychiatre
Pars 2
Chap 3
Lileyre
Poursuivant les études à l'aide du test dichotique, il nous a paru intéressant de créer une épreuve simple en Français permettant de déterminer quelle était l'oreille préférentielle de chacun des clients d'une consultation de psychothérapie pour l'écoute d'un discours suivi.
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Nous avons d'abord imaginé d'utiliser
une bande "dichotique" utilisée par d'autres chercheurs, mais sa
confection techniquement rigoureuse était ardue, et le bénéfice escompté peut
être trompeur. En effet, ce qui nous intéressait au premier chef était de
déterminer avec quelle oreille le patient était accoutumé à suivre le discours
parlé fluent, et non simplement s'il percevait mieux des fragments courts par
telle ou telle oreille.
Les travaux de HARDYCH et coll. (1977)
ont montré l'importance du traitement de l'information et l'intervention
mnésique dans les épreuves concernant les fonctions hémisphériques
latéralisées. Nous étions d'autant plus fondés à utiliser une épreuve dans
laquelle le sujet devait reconnaître des mots et les confronter dans leur
succession pour leur donner un sens d'ensemble.
On connaît donc deux sortes d'épreuves
dichotiques l'une très précise à tendance pointilliste, l'autre plus globaliste
et d'une facture moins rigoureuse. Nous avons cru bon d'utiliser ce deuxième
type d'épreuve : nous avons simplement enregistré un texte peu connu sur la
piste droite et un texte différent, mais extrait de la même source sur la piste
gauche de la même bande. Les niveaux d’enregistrement sont identiques, le
speaker est unique. L'épreuve dure dix minutes. Le départ des deux textes est
simultané, mais ensuite, le speaker enregistre sans tenir compte en aucune
façon de ce qu'il y a sur l'autre piste (ou de ce qu'il y aura).
Nous disposons actuellement d'une bande
avec voix de femme et d'une autre avec voix d'homme. Nous avons étudié
seulement les résultats par rapport à la voix de femme et nous nous proposons
d'effectuer ultérieurement une étude comparative avec la voix d'homme.
2.
PASSATION DE L'EPREUVE.‑
Le sujet chausse les écouteurs après
qu'on lui ait indiqué qu'il allait entendre raconter des histoires et qu'il
devrait ensuite les raconter. De fait, les histoires parviennent simultanément
l'une à l'oreille droite et l'autre à l'oreille gauche. L'audition terminée, on
lui demande de raconter ce qu'il a entendu. Un certain nombre de sujets optent
rapidement pour l'une des deux histoires et se montrent incapables de retenir
l'autre. S'il s'agit de l'histoire de droite on le dira droitier pour le test
(D). Gaucher dans le cas contraire (G).
Fréquemment, il est incapable de
raconter quoi que ce soit de cohérent et de suivi, mélangeant de manière plus
ou moins désordonnée des éléments appartenant à chacune des deux histoires.
Dans ce dernier cas, le sujet affirme souvent ‑ou montre ‑ que
l'épreuve a constitué pour lui une perturbation, parfois importante. On note
ces sujets comme non latéralisés (dg). Dans des cas exceptionnels, le sujet
peut raconter assez fidèlement les deux histoires, on parle de sujets
ambilatéraux et on les note (DG). Ces derniers sujets posent un intéressant
problème : possèdent-ils la capacité d'analyser et de mémoriser les deux discours
en deux lieux distincts (par exemple dans chacun des deux hémisphères) ou bien
en deux temps distincts (se comportant comme les systèmes informatiques qui
utilisent la technique du time‑sharing) ?
D'autre part, l'écoute d'une piste
paraît favorisée par l'extinction de l'écoute de l'autre : c'est‑à‑dire
la capacité de privilégier une "forme" sur l'autre, en ravalant
cette dernière au rang de "fond" sonore, ceci pouvant à priori être
lié à un choix arbitraire de l'écoutant, à une "meilleure" forme de
l'un des deux discours ou enfin au privilège d'une oreille sur l'autre. On ne
peut éliminer complètement le choix arbitraire de l'écoutant quoiqu'au
subjectif il soit parfois affirmé, parfois nié. Nous avons pu, par contre,
éliminer la supériorité d'une piste sur l'autre en alternant systématiquement
des passations dans lesquelles le fil du casque était placé à droite, avec
d'autres dans lesquelles il était placé à gauche. Ainsi nous avions autant de
sujets qui eurent à écouter la piste A à droite que de sujets qui eurent à
l'écouter à gauche ( et inversement pour la piste B).
L'utilisation d'un test
statistique séquentiel nous permet d'accepter l'hypothèse selon laquelle nos
deux pistes sont équivalentes relativement au fait d'écouter l'histoire droite
ou l'histoire gauche (NS à un seuil de p = 0,10).
|
Fil à G |
Fil à D |
Totaux |
% |
H (%) |
F (%) |
Histoire D |
27 |
26 |
53 |
69 |
48 |
67 |
Histoire G |
6 |
8 |
14 |
18 |
28 |
28 |
dg |
5 |
4 |
9 |
12 |
20 |
3 |
Totaux |
38 |
38 |
76 |
De 5 à 55 ans |
||
DG |
un seul sujet entend les deux
histoires |