Chez les personnes souffrant de lombalgies
chroniques, l'acupuncture, qu'elle respecte les règles traditionnelles
de la discipline ou qu'elle soit simplement simulée, est plus
efficace que la prise de médicaments associée à la kinésithérapie.
Telle est la surprenante conclusion d'une étude financée
par les caisses d'assurance maladie allemandes et publiée,
le 24 septembre, dans le Journal of the American Medi
cal Association. Ce résultat est le fruit d'un essai
clinique très rigoureux qui a été mené sous la direction
du docteur Michael Haake (université de Ratisbonne, Allemagne)
auprès de 1 162 personnes qui souffraient de lombalgies
depuis huit ans en moyenn
Les participants ont été divisés en trois groupes de taille
égale. Dans le premier, les patients étaient pris en charge
avec une acupuncture traditionnelle correspondant à la tradition
chinoise. Les aiguilles étaient introduites à une profondeur
comprise entre 5 et 40 millimètres, en respectant les principaux
"points" et "méridiens" tels qu'ils sont décrits par les manuels
de cette discipline. Dans le deuxième groupe, on simulait
simplement la pratique de l'acupuncture : les aiguilles étaient
enfoncées à une profondeur de 1 à 3 millimètres au niveau
de la zone douloureuse, mais en dehors des "points" et "méridiens"
traditionnels. Le troisième groupe correspondait à une approche
occidentale associant médicaments antalgiques ou anti-inflammatoires
et kinésithérapie.
"PLACEBO"
Au total, après un minimum de dix séances chez les trois
groupes, et six mois après le traitement, le taux d'efficacité
a été respectivement de 47,6 %, 44,2 % et de 27,4 %. Pour
les auteurs de l'étude, l'efficacité comparable de la vraie
et de la fausse acupuncture suggère que le simple fait d'avoir
recours à la pose d'aiguilles intradermiques déclenche un
mécanisme physiologique modifiant la genèse, la transmission
et la perception des sensations douloureuses.
"Il s'agit là d'un travail particulièrement intéressant,
estime le docteur Jean-Jacques Aulas, psychiatre au centre
hospitalier et universitaire de Saint-Etienne (Loire), par
ailleurs spécialiste des travaux concernant l'effet placebo.
Le nombre des patients et les qualités méthodologiques
de cet essai permettent d'en accepter les conclusions. Le
fait qu'il n'y a pas de différence d'efficacité statistiquement
significative entre "vraie" acupuncture et acupuncture factice
n'est peut-être pas l'élément le plus important."
Pour le chercheur, l'essentiel est plutôt qu'une acupuncture
"placebo" est elle-même nettement plus efficace que le traitement
habituellement utilisé dans cette pathologie. "Il est
fort regrettable, commente-t-il, qu'en France, contrairement
à l'Allemagne, la Sécurité sociale n'apporte pas son concours
financier à la réalisation de protocoles de recherche clinique
aussi riches que pragmatiques."
Article paru dans l'édition du
28.09.07.