Prosper, Bernard, Eugène AURIOL

né à Perpignan (Pyrénées-Orientales) le 2 août 1861, mort à Perpignan le 21 juillet 1944. Banquier, principal actionnaire de la banque Auriol, censeur de la Banque de France (succursale de Perpignan), directeur de la caisse d’Épargne de Perpignan, pyrénéiste.

C’est au cœur d’une famille de banquier que naît Prosper Auriol. Il est en effet le fils de Prosper Auriol* (1821-1870) et de Delphines Cazes, et le petit fils de Bernard Auriol* et Catherine Lloubes, sœur de Jean-Jacques Lloubes*. Il est remarquable que l’acte de naissance de Prosper Auriol soit dressé en août 1861 en présence de son père, bien sur mais aussi de son grand père Auriol et de son grand oncle Lloubes, les fondateurs de la Banque Auriol et Lloubes en 1809.

Lorsque Prosper Auriol* père meurt jeune, à 49 ans, le 9 novembre1870, son épouse Delphine Auriol née Cazes poursuit l’activité « pour conserver une situation à ses fils encore mineurs ». Pour cela, elle peut compter sur Isaac Levy*, fondé de pouvoir de la banque, et sur son propre frère, Gustave Cazes*, qui était également très investi dans l’économie viticole. La banque Veuve Auriol & fils réalise alors d’excellentes affaires pendant les années 1870. En effet, les Pyrénées-Orientales et l’Aude sont épargnées par le phylloxéra qui ravage alors le Var, le Gard et l’Hérault. Les prix du vin augmentent considérablement. Les propriétaires prospèrent de la ruine des voisins et s’endettent fortement pour étendre leur production. Le réseau des intermédiaires financiers habituels (les proches puis les notaires) ne suffit plus. En quelques années, les banques locales se développent et se partagent entre le financement du négoce des vins et les prêts sur hypothèques aux propriétaires pour l’achat et la plantation de vignobles. Les inspecteurs de la Banque de France présentent la Banque Veuve Auriol comme « une bonne maison, disposant de dépôts sûrs issus de la famille essentiellement ». Elle réalise d’excellentes opérations avec les grands propriétaires, les négociants importants de la place comme Alfred Sauvy*, mais son principal client est l’entreprise de papiers à cigarettes Bardou-Job.

En 1886, Prosper Auriol est associé officiellement dans la société qui prend la forme d’une Société en Nom Collectif. Le capital de 1 Million de francs est ainsi réparti : 700 000 F pour Mme Auriol et 300 000 F pour Prosper. Puis une place est faite en 1890 à son frère, Georges, de cinq ans son cadet, lors de la constitution d’une nouvelle SNC pour une durée de 20 ans, avec un capital réparti en 400 000 F pour Mme Auriol et 300 000 F pour chaque frère.


L’arrivée de Prosper et de Georges correspond à une phase plus difficile de la vie de la Banque. En effet, de grandes maisons du négoce traversent difficilement la décennie 1890. En 1892-1893, par suite de mauvaises affaires viticoles et dans des conditions liées au rétablissement du protectionnisme par Jules Méline, toutes les banques en subissent les conséquences. La Maison perd en deux ans près de 200 000 F. Mais la surface financière de la famille et la faiblesse des « mauvais papiers » lui permet de résister et de ne pas avoir à craindre un mouvement général de retrait des fonds déposés. A nouveau en 1902, la faillite de négociants clients de la banque entraîne des difficultés passagères. Les perspectives sont cependant nettement meilleures après 1905. La banque Auriol apparaît alors clairement comme la première banque locale de la place. Elle a réussi à s'imposer dans tout le Roussillon et jouit d'une confiance absolue de la Banque de France. Elle réunit, en 1911, 14 millions de francs de papier commercial le plus souvent à courte échéance. Les inspecteurs saluent leur belle clientèle et sont heureux de voir qu’ils  « vivent simplement, et ne dépensent pas leurs bénéfices ou leurs revenus ». Signe de cette réussite, Prosper Auriol entre comme censeur de la Banque de France (succursale de Perpignan) en 1910. Il va y jouer un rôle de premier plan pendant la Première Guerre mondiale, mettant sa connaissance de l’économie locale au service de l’organisme financier. La fortune de la famille est alors estimée à 3 millions de francs. En décembre 1924, les deux frères associés, Prosper et Georges Auriol, âgés respectivement de 64 et 59 ans, abandonnent l’activité bancaire en laissant une maison en pleine prospérité, qui selon le directeur de la succursale de la banque de France, devait être « l’orgueil du Roussillon et des banques particulières de province ».

Pendant presque toute sa vie professionnelle, Prosper Auriol joue également un rôle important dans le développement de la Caisse d’Epargne de Perpignan, suivant ainsi son oncle Gustave Cazes. Il avait pris rang dès 1883 sur les listes des administrateurs puis des directeurs de cette institution, créée précocement à Perpignan sous la Monarchie de Juillet. Il reste dans cet organisme soit comme directeur, soit comme directeur honoraire, jusqu’aux années 1930. Il demeure en outre censeur de la banque de France, suivant avec une extrême assiduité les séances de la succursale, jusqu’à sa mort en 1944. Il était selon le directeur de la Banque, dans la succursale de Perpignan, « comme dans sa seconde maison ».

            Bien entendu, Prosper Auriol fut un personnage important et apprécié de la vie perpignanaise. Il était membre de la Chambre de commerce de Perpignan, et à plusieurs reprises, secrétaire du bureau de l’organisme consulaire. Cultivé et appréciant la littérature, il fut un membre actif de la Société Agricole Scientifique et Littéraire des Pyrénées-Orientales, et plus particulièrement secrétaire de la section des lettres. Il est même président de la SASL pendant la période troublée de la crise viticole de 1907. C’est à lui que le préfet Dautresme* aurait conseillé de faire planter aux viticulteurs catalans pins et des amandiers pour remplacer la vigne et mettre ainsi fin à la surproduction. Il a, sous sa direction, relancé la politique de publication des bulletins de la Société. Il laissa à la SASL sa place en 1909 au docteur Donnezan*.

Il fut également un des principaux animateurs du pyrénéisme dans les Pyrénées-Orientales. Il est membre et organisateur de la section du Club Alpin Français (CAF) du Roussillon (puis du Canigou), créée en 1881 à Perpignan par le colonel Fulcran, directeur du génie dans la ville et quelques notables locaux, comme les docteurs Donnezan et de Lamer. La section devient rapidement un lieu de sociabilité pour les élites roussillonnaises. Pour Numa Broc, tout ce que Perpignan compte de médecins, d’avocats, de riches propriétaires, se retrouve au CAF. Mais au-delà des mondanités, on s’occupe aussi de montagne. Prosper Auriol est un véritable pyrénéiste. il connaissait parfaitement toutes les montagnes catalanes, parcourues tant en courses, escalades, que randonnées, jusqu’à un âge très avancé. Il participe par exemple à l’excursion collective des 14 et 15 juillet 1894 dans le massif du Canigou dans la reconnaissance pour construire le refuge Arago avec Soulier*, le président de la section locale du CAF dont Georges Auriol, son frère, est le trésorier. Il est reconnu comme étant l’initiateur du ski dans les Pyrénées. C’est en 1901, sur les pentes du Col de la Quillane, à proximité de Mont-Louis (Pyrénées-Orientales), qu’on lui attribue la première descente à ski dans les Pyrénées, entouré par ses amis du CAF. Les skis étaient pour cette occasion, prêtés par le capitaine Clerc, fondateur de l’école militaire de ski de Briançon. Chaque année, Auriol et ses amis renouvellent leurs sorties. Le 21 janvier 1903, par exemple, ils font une démonstration de descente à ski au plan d’Ambulla, au dessus de Villefranche de Conflent (Pyrénées-Orientales). Cette fois-ci, c’est sur des skis ramenés de Suède. Ce n’est que la même année qu’Henri Sallenave, de Pau, réalisait la première descente dans les Pyrénées centrales. Entre 1908 et 1911, Prosper Auriol fait partie du petit groupe de passionné, en compagnie de son frère, de Jacques Deixonne et de Jean Escarra, futur président national du CAF, qui ouvre dans le massif du Canigou les voies les plus difficiles, dans le mode du pur alpinisme (arête Quazémi Canigou 1908, brêche Durier, 1911). Il faudra attendre les années 1960 pour que de nouvelles voies soient ouverte dans le massif. En 1921, Prosper Auriol, en compagnie d’Edmond Baxo (du CAF) demande au Maréchal Joffre de consentir à donner son nom à un pic anonyme du massif du Canigou. L’inauguration du pic Joffre a lieu lors de l’été 1921.

ŒUVRES : Dans les bulletins de la SASL : « Résumé des travaux de la section des Lettres de 1881 à 1883 », XXVI, pp.163-17 ; « Résumé des travaux de la section des Lettres en 1886 », XXVIII, pp.169-170 ; « Compte-rendu sur « Ma Gerbe », poésies de M. Raymond Lassaire », XXVI, pp.173-174 ; « Compte-rendu sur l'Atlantide de Verdaguer, traduction de M. Justin Pétratx », XXVI, pp.175-176 ; « Compte-rendu de la section agricole en 1889 » XXXI, pp.119-126 ; « Rapport sur les récompenses agricoles en 1895 » XXXVII, pp.15-26 ; « Les gorges de Saint Aniol et la Mare de Deu del Mont (alta Garrotxe) », Bulletin de la section du Canigou, 1907-1908, pp 125-137 – « En Capcir », Bulletin de la section du Canigou, 1911, p 144-148.

SOURCES. AVP 1E 72 - ADPO, 1M 795, 8M 33 à 50 - Arch. Banque de France (Paris), Rapports d’Inspection 1877-1924, Dossier des conseillers, PV des séances du conseil – Bulletin trimestriel de la section du Canigou (CAF), 1907-1911, Bulletin Pyrénéen été 1921, Bulletin SASL, 1914- p 425-430 ; le Roussillon, 5 août 1944- BONET, 2004, p. 83-84 – BROC, 2004, p 685-687 - POSTEL-VINAY, 1997, p 322-323 - POUTENSAN, 1976, p. 124-125 - RIBAS, 1993, p 280, 304-305

BROC (Numa), « Perpignan la pyrénéiste » dans  SALA (Raymon) et ROS (Michelle), Perpignan une et plurielle, Canet, Le Trabucaire, 2004, p 683-688.

Nicolas MARTY
Maître de conférences d’histoire contemporaine,
Université de Perpignan Via Domitia
centre de Recherches sur l'Histoire des Sociétés Méditerranéennes

 

Cliquer ici pour lire la biographie de son père (Prosper Auriol père)

et ici pour une étude sur le Nom Auriol

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7 Février 2007

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