En partant de la pratique du
Coaching, il s’agit ici de questionner et d’approfondir les différences entre
Coaching et Psychothérapie.
La
possibilité d’exercer et de développer une activité d’accompagnement
diversifiée – tant sur les sphères du professionnel que du privé – telle le
coaching, qui ne s’inscrit pas réellement dans le vaste champ du Développement
Personnel et qui pourrait être assimilé
à une forme de psychothérapie, est l’expression d’un besoin non satisfait par
les autres formes d’accompagnement et d’aide.
Jean-Antoine
Malarewicz (4) constate : « Nous
sommes dans une société de réparateurs, et tout ce qui peut ressembler à ce
type d’activité fascine certaines personnes. Le besoin de protéger est répandu,
il peut se négocier dans le monde du travail de bien des manières notamment
dans le coaching ».
François
Délivré (3) propose d’identifier les limites possibles entre le domaine de la
(psycho)thérapie et celui du coaching à partir du tableau suivant :
Domaine de la (Psycho)Thérapie |
Domaine du Coaching en Entreprise |
Analyse
de la demande Contrat Diagnostic Cadre
de référence Changement |
|
Forte
utilisation du transfert (dans certaine thérapie) |
Conscience
du transfert et franchissement d’une étape d’autonomie |
Plutôt
le passé |
Plutôt
le présent et l’avenir |
La
vie personnelle et familiale |
La
vie professionnelle |
La
régression |
L’histoire
sociale et professionnelle, la situation présente, les projets |
La
prise de conscience par le client de la construction archaïque du
schéma d’identité. La partie figée de la personnalité
élaborée pendant l’enfance |
Les
options concrètes, pour vivre en autonomie. Les besoins à satisfaire,
réalistes, en tenant compte du monde environnant |
Le
travail émotionnel |
L’identification,
l’expression et l’utilisation des émotions en situation professionnelle |
L’origine
des croyances |
Le
changement des croyances |
Le
projet de vie |
Le
projet professionnel |
La
sexualité |
Les
relations hommes - femmes dans le travail |
Les
impasses (cf. AT) du second degré (conflit entre deux éléments
archaïque de l’Enfant, c’est à dire introjection des messages parentaux
et besoins) et du troisième degré (conflit entre l’Enfant Adapté et
l’Enfant Libre) |
Les
impasses du premier degré (conflit entre les valeurs du Parent
et les envies de l’Enfant) |
|
|
Sur
Internet, média grand public, les termes Psychothérapie, Psychanalyse, Psychologie et Thérapie, sont définis
de la manière suivante :
- Psychothérapie : « ensemble des
techniques psychologiques destinées à permettre à une personne de recouvrer la
santé, tant psychologiquement que physiologiquement » … « Les psychothérapies (thérapies
par la psyché) sont un ensemble de pratiques nées
à la fin du XIX siècle, issues de l'hypnose
puis de la psychanalyse. Ces pratiques sont « l'art
de soigner par l'esprit » des souffrances tant psychiques que somatiques
dans le cadre d'une relation à un psychothérapeute. « La psychothérapie
est souvent considérée à tort comme un soin de l'esprit ». Résumant les
indications de la psychothérapie Bernheim écrit dans « De la
suggestion » : « … les maux de ventre et digestifs liés à une
affection organique peuvent aussi être exagérés par le psychisme et
justiciables dans une certaine mesure de la suggestion. On le voit, le champ de
la psychothérapie est très vaste ; elle peut intervenir utilement dans
toutes les maladies ; mais elle intervient surtout contre l’élément
psycho-nerveux de ces maladies ». Les approches sont nombreuses et
correspondent à des références théorico-cliniques très différentes voire
contradictoires ».
- Psychanalyse : « étude de la
signification des comportements inconscients, d'après la théorie de Sigmund
Freud (1896) ».
- Psychologie : « étude de la vie psychique,
individuelle, familiale, professionnelle et sociale, des êtres humains ».
- Thérapie : « ensemble des
techniques permettant de recouvrer l'état de Santé, tant physique que
psychologique. Fait d'accompagner une personne vers le Bien-être, jusqu'à un
équilibre psychocorporel stable et durable. Pour aller « mieux que
mieux », le Coaching
est plus indiqué ».
- Thérapie brève : « c'est une pratique
psychothérapique qui, au contraire de certaines approches, ne nécessitera pas
d'attendre un résultat tangible 3 ou 4 ans. Généralement, avec des approches
comme l'Hypnose Ericksonienne et
La
lecture de ces points de vue d’experts du coaching et de ces définitions concernant la
psychothérapie peut conduire aux réflexions ou conclusions suivantes :
- Un thérapeute exerçant le
métier de coach, aurait sur ce dernier (qui ne serait pas aussi thérapeute), un
avantage professionnel certain, puisque qu’il serait en mesure de s’affranchir
des frontières entre conscient et inconscient, professionnel et personnel
(au-delà du privé).
En
fait, l’exercice du coaching en milieu professionnel nécessite de pouvoir intervenir sur la droite
du curseur ((3) coaching de managers et coaching de structure). Ainsi, un
psychothérapeute n’ayant pas d’expérience suffisante de l’entreprise, de ses
rouages et de son environnement, ni de « l’important » (1)
(contraintes culturelles, organisationnelles, managériales, professionnelles)
ne pourra accompagner de manière efficiente son client, manager ou dirigeant,
ainsi que l’équipe ou l’organisation.
- Inversement, un coach non
formé aux « thérapies par la psyché » risque de trouver rapidement
ses limites concernant
« l’essentiel » (1) de son client (programmations de l’intrapsychique,
psychologique, existentiel, spirituel)
En
fait, l’exercice du Coaching Professionnel ou du Life Coaching (domaine de la
vie privé) s’intéresse à la pointe émergée de l’intrapsychique, au
« comment » du passage, par le coaché, d’une situation présente à un
objectif futur.
Cependant,
par son écoute, sa posture d’accompagnant et non de conseil, l’usage de
Toutefois, si le coach est amené à s’intéresser au
passé, au « pourquoi » de la situation présente, s’il veut ou doit
interroger la partie immergé de l’intrapsychique, il devra disposer des outils
lui permettant de s’affranchir des frontières internes du coaché ou orienter
son client vers un confère en disposant ou vers un thérapeute.
Ainsi,
la frontière entre coaching et psychothérapie peut-elle se situer, ou
s’observer dans la pratique, au niveau :
- du professionnel, par choix
ou de part le champ de ses savoir-faire,
- des limites du
« contrat » posées par le professionnel, la personne (client ou
patient) ou l’entreprise,
- de la nature de la demande
et du contenu et du processus d’intervention.
Cependant,
même s’il existe des zones de recouvrement entre les deux pratiques, le coaching
n’est pas une psychothérapie. En effet le métier de coach se distingue de
celui de thérapeute de part le savoir-faire nécessaire et par les sphères
d’intervention.
Il
est en effet possible, lorsqu’on observe ces métiers avec le souhait d’en
définir les contours, de tracer la frontière qui les sépare.
Selon
Jacques-Antoine Malarewicz, il suffit d’établir des distinctions entre 3
domaines de la vie du coaché (4) :
1. la sphère professionnelle est celle qui concerne le contexte de travail
et toutes les interactions qui s’y déploient.
2. la sphère personnelle est celle qui constitue l’individu dans ses
multiples dimensions, qu’il s’agisse de son caractère, de sa personnalité ou de
son histoire. Nous sommes donc dans le domaine de la psychologie et de
nombreuses notions ont été proposées pour décrire l’économie générale de
l’individu. Cette sphère individuelle est impliquée dans la vie professionnelle
dans un constant va-et-vient entre le groupe et la personne.
3. la sphère privée renvoie à la vie affective et émotionnelle de la
personne dans ses relations conjugales, familiales ou amoureuses. A l’instant
où chacun quitte son travail, il se
retrouve dans sa vie privée.
Cette
approche par les champs d’intervention est intéressante car objective. Elle
permet de s’affranchir de la subjectivité que pourrait induire l’approche par
les savoir-faire. En effet rien n’interdit à un professionnel de cumuler une
pratique de coach et de thérapeute.
Même
si aucune des sphères ci-dessus identifiée n’est « indifférente » ni
« étrangère » aux deux autres – ceci en accord avec l’approche
holistique de l’humain, l’irréductibilité de la complexité et
l’intersubjectivité « proposée » par les systèmes en actions –
ce découpage permet les associations suivantes :
- le Coaching Professionnel
s’adresse à la sphère professionnelle et concerne l’interface entre les sphères
professionnelle et personnelle du coaché. Dans ce travail d’accompagnement pour
un changement le coach appréhende le coaché en tant qu’individu membre d’un
groupe professionnel. Il s’intéresse exclusivement à sa dimension personnelle
immergée dans sa dimension professionnelle.
- le Life Coaching s’adresse à
la sphère privée et concerne l’interface entre les sphères privée et
personnelle du coaché. Dans son travail, le coach de vie appréhende son client
en tant qu’individu en relation familiale et sociale. Il s’intéresse
exclusivement au présent et au futur de la dimension personnelle immergée dans
celle privée.
- une Psychothérapie implique
essentiellement la sphère personnelle (voire privée dans une démarche de couple
par exemple). Une démarche vers un psychothérapeute peut être aussi initiée à
partir d’une souffrance vécue par l’individu dans l’une de ses sphères privée
ou professionnelle. Le psychothérapeute appréhende le patient en tant
qu’individu. Il s’intéresse exclusivement à la dimension personnelle dans et
avec toute son histoire passée et présente.
D’autres
éléments de frontières entre coaching et psychothérapie ressortent de
l’observation de faits et des pratiques :
- le plus souvent la décision
de s’engager dans un Life Coaching ou une Psychothérapie provient de la personne elle-même, en questionnement ou en
situation de souffrance. Alors que dans le cas d’un Coaching Professionnel
l’entreprise est généralement à l’origine de cette décision.
- le choix d’un coaching
centré sur la personne ou d’une thérapie est la plus part du temps une décision
prise par l’individu. Ce choix est le résultat de l’existence, dans la tête de
la personne, d’une frontière entre ces deux types d’accompagnement,
- en général c’est le client
(cas du coaching), ou le patient (cas de la thérapie), qui prend en charge les
implications financières de sa démarche. Lors d’un Coaching Professionnel,
c’est l’entreprise qui assume la charge financière,
- la formation spécifique de psychothérapeute
recouvre très partiellement celle de coach. De même le coach ne reçoit pas la
formation d’un psychothérapeute. Ce n’est que par des actes volontaires (formations
et pratiques) qu’un professionnel peut être coach et psychothérapeute. Dans ce
cas le positionnement précis de la frontière entre Life Coaching (coaching
centré sur la personne) et Psychothérapie (thérapie par la psyché) est du
ressort du libre arbitre du professionnel compétent qui décidera, en relation
avec son client, du champ d’intervention utile ou nécessaire,
- une différence importante
est qu’en Psychothérapie le patient est l’unique client du psychothérapeute (exception faite des thérapies de couple ou familiales),
alors qu’en Coaching Professionnel au moins 2 clients, le coaché et
l’entreprise, sont en relation avec le coach. Ils sont en droit de faire valoir
leurs prérogatives en situation de coaching. (En coaching professionnel, le « contrat », ou accord entre
les parties, est essentiel. Il comprend 3 dimensions : le contrat
d’affaire (objectifs, conditions), le contrat relationnel (modalités informels)
et le contrat secret (enjeux relationnels et psychologiques). De plus ce
« contrat » n’est pas que bilatéral. Il met en jeu aussi
l’institution. D’où la notion avancée par Fanita English de « contrat
triangulaire », voire polygonal.)
L’acceptation
de frontières entre Coaching et Thérapie est particulièrement sensible en ce
qui concernant le Coaching Professionnel. En effet il ne semble pas sain de
voir l’entreprise se mêler de la vie privée de ses collaborateurs.
Ainsi
la confusion, entretenue ou pas, entre coaching et psychothérapie participe de
l’intrusion des exigences professionnelles dans l’intimité des personnes.
Une
autre manière d’apprécier les limites entre Coaching et Psychothérapie est
d’explorer quelques spécificités de chacune de ces pratiques.
La
posture de coach est celle d’un pair. Ce n‘est jamais le cas d’un thérapeute.
En
effet une des principales qualités nécessaire au coach est de savoir méta
communiquer, voire sur communiquer, tout en se situant dans la marginalité.
C’est
ainsi qu’il peut prétendre avoir utilement communiqué avec son client (individu
ou équipe) tout en construisant une relation basé sur la parité. Cette parité
ne se situe pas dans le domaine des compétences professionnelles ou
personnelles. Elle se joue dans la compétence relationnelle.
Cependant,
parité ne signifie pas égalité. Le coach aura ainsi établi avec le coaché une
relation autorisant la confrontation. Il aura ainsi créé les conditions de
l’apprentissage de l’autonomie pour son client. De même il aura créé les
conditions au sein d’une équipe d’une dynamique de groupe par l’inclusion (partage des représentations), la
régulation et la déclusion (temps de
séparation).
Cette
parité de relation s’établit dans l’espace d’intersubjectivité coach-coaché en
tant que lieu et catalyseur de co-construction du processus d’autonomie (concept d’Analyse Transactionnelle :
dépendance, contre-dépendance,
indépendance, interdépendance) qui concerne aussi bien les individus que
les équipes.
Cette
parité trouve un écho particulier dans le cas de coaching de dirigeants ou de
cadres dirigeants. En effet « c’est
bien parce qu’il arrive que le coaché, dans sa solitude hiérarchique, n’a pas
de pair autour de lui, qu’il trouve dans la parole du coach ce qu’il ne peut
attendre et espérer de ses collaborateurs » (4).
Cette
parité relationnelle est essentielle. Elle donne au coach la liberté de parole
et d’action utile à l’accompagnement d’un dirigeant dans sont identité
professionnelle, et au coaché la liberté de quitter « sa
souveraineté ».
|
|
Comme
tout professionnel d’accompagnement au changement le coach doit avoir d’abord
et avant tout de bonnes compétences relationnelles. Cependant, deux postulats
essentiels président à une démarche de coaching :
- le coach ne dispose pas de
la solution,
- la solution est chez le
coaché.
Grâce
à la nature de la relation établie, par
une démarche de type maïeutique, l’usage d’outils et approches qui répondent
aux besoins identifiés, le coach accompagne son client vers sa propre solution.
Ainsi,
et quel que soit le type de coaching, le coach participe à l’interaction au
même titre que son client. De la nature et de la qualité de cette relation
émerge la solution retenue par le coaché.
Ceci
est la conséquence du système que constitue le coach et son coaché. Bien qu’il
en soit de même du thérapeute et de son patient, des nuances ou différences
s’introduisent entre les postures de coach et de thérapeute.
A
partir du moment où un individu fait parti d’un système, qu’il soit acteur ou
passif, (voire même momentanément absent), il ne peut prétendre à la
neutralité.
Cela
se traduit pour le coach en terme de savoir-être et
savoir-faire relationnel, par :
- pouvoir être à parité,
associé dans la relation, avec un interlocuteur et donc avec son client. Et
dans cette compétence relationnelle démontrer sa capacité à se mette en
« position basse » (i.e. visiblement pour l’interlocuteur, ne pas
disposer de la solution), tout en montrant la capacité de garder l’initiative
des enjeux dans chaque phase du processus du coaching.
- pouvoir se dissocier dans
une situation donnée, c’est à dire être à la fois acteur et spectateur. Alors
que le thérapeute entretien constamment la dissociation.
Ainsi,
cette capacité de dissociation tout en étant en parité constitue une différence
notable entre les postures types de coach et de psychothérapeute.
Le
coach construit à chaque instant un ensemble d’interactions avec le coaché dans
un mode de parité. Ceci tout en conservant l’initiative de cette construction,
expression du processus et du sens de la démarche de coaching.
Si
le coach est acteur il doit aussi être spectateur conscient. C'est-à-dire qu’il
exerce une capacité relationnelle essentielle à son métier, la
métacommunication. Ainsi, tout en étant dans l’interaction, il est capable, à
chaque instant, et de manière fluide, d’en parler. Ceci grâce à un va-et-vient
constant entre les positions d’acteur et de spectateur.
A
la fois observateur et acteur, il observe sans se distancier. Il n’oublie
jamais qu’il est lui-même contenu dans ce qu’il observe et acteur immédiatement
présent dans la relation à l’autre.
Ceci
en s’intéressant pratiquement exclusivement au présent et au futur de son
client. Alors que le psychothérapeute, lui-même partie consciente du système
qu’il constitue avec son patient, acteur et observateur, notamment des éléments
transférentiels constitutifs de la relation, voire de la thérapie, s’intéresse
au passé et au présent.
Nous
avons vu que les sphères du Coaching et du Développement
Personnel pouvaient être considérées plus ou moins disjointes.
Concernant
le Développement Personnel, la frontière qui le sépare de
Les
professionnels dans un souci d’éclaircissement ou de pré carré, ainsi que les
utilisateurs avertis considèrent que généralement
Cependant
cela se discute. En particulier, le coach peut éluder la question, mais le
coaching centré sur la personne, que ce soit dans le « Life
Coaching » ou lors de phases d’un « Coaching Professionnel »,
pose inévitablement la question de la frontière thérapeutique.
En
effet, quelle que soient la motivation et la partie de lui-même que le client
et le coach abordent lors de séances, la question se pose pour le
professionnel responsable : est-ce du développement personnel, du coaching ou
de la thérapie, et quelle thérapie ?
Ceci,
que le travail sur la personne même fasse partie ou non du contrat initial,
qu’il constitue le cœur même du coaching
(« life coaching ») ou qu’il survienne inopinément ou à
l’initiative motivée d’une des parties en présence.
Ainsi
est posée la question de la frontière thérapeutique, telle une fausse limite.
Le
coaching est une forme spécifique d’accompagnement des personnes et des
équipes. Elle s’occupe de la partie émergée de l’iceberg, laissant la partie
immergée et la résolution des problématiques qu’elle révèle, aux formes
d’accompagnement apparentées à la psychothérapie.
Cependant
le coaching est aussi une forme intégrative d’accompagnement. C'est-à-dire
qu’elle considère le client et son environnement dans son ensemble, sans pour
autant s’immiscer dans ce qui relève de dessous la surface de flottaison.
C'est-à-dire que le coach et son client (ou ses clients) focalisent leur
travail sur l’ici et le maintenant de la problématique de la sphère privée,
professionnelle ou managériale, tout en s’attachant à élargir le champ des
possibles. Ceci, en restant dans le présent et tourné vers la réalisation du
futur souhaité ; et généralement sans chercher à entrer dans les
structures sous-jacentes liées à l’histoire passée, à la psychologie plus ou
moins profonde ou à la vie intérieure des personnes.
La
spécificité du coaching réside dans le fait qu’il n’a pas pour objet la
réparation de l’histoire de vie de la personne ou de l’équipe coachée. Le
coaching s’intéresse au vécu du sujet, c’est à dire au présent et à son
extension (par continuité, changement ou consolidation) souhaitée par lui.
Cette relation d’aide se déploie au plus à partir d’un processus
d’actualisation de l’histoire du sujet, et essentiellement dans un processus de
préparation de son futur. Il ne d’agit pas de procéder à un retour dans le
passé tel que dans un travail thérapeutique.
Naturellement
le passé du coaché (ou de l’équipe) peut être abordé, de même que des
difficultés d’ordre psychologique ou relationnelle.
Ceci
même distingue, selon la terminologie de l’école de Palo Alto (7), le
« changement de niveau 1 » qui porte sur les comportements, du
« changement de niveau 2 » qui
touche aux structures plus ou moins profondes de la personne (attitudes,
croyances, valeurs, systèmes de représentation).
Ainsi,
s’intéresser au passé, à l’intrapsychique, au système (personne(s), équipe,
histoire, …) dans ses parties et son ensemble, est nécessaire pour susciter un
changement profond de niveau
Ainsi
la pratique du coaching a beaucoup à gagner de l’expérience (reconnue et
codifiée) plus ancienne des psychothérapies. Cet apport concerne tant la
posture que le déroulé d’un coaching.
En
effet le coach, tel le thérapeute doit continûment être en éveil :
- à l’écoute du coaché et
observateur de la relation ainsi créée entre coaché et coach.
- et vigilant dans
l’intersubjectivité, afin de détecter les phénomènes pouvant parasiter
l’accompagnement (tels que : transferts et contre-transfert, processus
parallèle ou processus secondaire et « hot potato » - cf. notion
exprimée par Fanita English autour du concept d’épiscénario de l’A.T.).
L’objectif
du coach, comme le thérapeute, est :
- que son accompagnement
s’exerce avec une neutralité suffisante (malgré l’intersubjectivité
inévitable), qu’il soit pertinent et juste,
- qu’il puisse procéder aux
réajustements, confrontations bienveillantes et régulation nécessaires.
Ainsi,
le coach, tout en étant focalisé sur la partie émergée de l’iceberg, demeure
attentif à ce qui se joue sous la ligne de flottaison pour son client et dans
la relation coaché – coach.
Vincent
Lenhardt déclare (2) à ce sujet :
« Le coach y parvient en mobilisant des ressources initialement
développées dans le champ de la thérapie : l’intelligence émotionnelle, la
mise en œuvre de la « troisième écoute », ou encore d’outils de
diagnostic intégratifs tels que les bio-scénarios …».
L’écoute
est essentielle tant pour le thérapeute que pour le coach.
- la « première
écoute » de l’autre, c'est-à-dire recevoir et considérer le discours
verbal.
- la « deuxième
écoute », c'est-à-dire l’identification et la prise en compte du non
verbal (la voix et le para-verbal, les gestes et expression faciales, …).
- la « troisième
écoute » réside dans le ressenti, « l’écoute » de soi-même (sensation
corporelles, états internes, réactions physiologiques, processus cognitifs, émotions,
fantasmes et comportements externes) qui est source d’information sur soi en
tant qu’émetteur et récepteur de ce que l’autre émet consciemment et
inconsciemment.
La
qualité d’écoute, commune aux métiers d’accompagnement et d’aide, permet
notamment au coach, tout le long de son travail d’accompagnement :
- d’identifier la zone
d’intervention nécessaire (le coaché lui-même, la relation du coaché à la
problématique ou/et à ses interlocuteurs, la relation de ses interlocuteurs à la
problématique, la relation coaché – coach),
- de déjouer, d’éviter ou de
transformer les pièges des projections inconscientes, répétitions d’histoire de
vie, de problèmes et de rôles vécus en d’autres lieux et temps.
« C’est ainsi que la
relation redevenue « juste » peut constituer réellement le lieu d’une
co-élaboration de solutions rétablissant la personne dans sa liberté, sa
responsabilité et son choix de possibles. » Vincent Lenhardt (2).
Nous
nous proposons maintenant d’aborder ce qui différencie le Coaching de
Cette
question intéresse tant la personne en recherche d’un accompagnement, que le
thérapeute ou le coach en phase de qualification de la demande, ou encore
l’entreprise face à l’utilité de faire coacher un manager.
L’identification
d’un vrai besoin de coaching ne doit pas perdre de vue que :
- un coaching a toujours un
objectif, celui de la personne. Le coaching vise à accompagner la personne qui
exprime une volonté de changement pour elle-même,
- le coaching se déroule à
partir et autour de l’axe de la demande initiale, explicite ; et quelle
peut évoluer vers la demande latente, implicite,
- à travers la confrontation
bienveillante, les moments de régulation (cas d’un coaching d’équipe), le rôle
du coach est de permettre à la personne (où à l’équipe) de satisfaire son
besoin exprimé et d’atteindre son objectif,
- concernant le coaching
professionnel commandité par l’entreprise, la personne accompagnée partage a
priori son objectif avec l’entreprise,
- le coaching managérial a
pour finalité de développer la personne dans son parcours
professionnel (« l’important ») en s’appuyant sur ce qui fait
sens pour elle au-delà et dans le champ professionnel
(« l’essentiel »).
Afin
d’éviter le mélange des genres il convient de souligner que des différences de
propos et de démarche :
- le coaching s’intéresse au
« comment faire » ?
- la psychothérapie
s’intéresse au « pourquoi » ?
Par
exemple, le « pourquoi le client paraît-il démotivé » ne présente en
fait peu d’importance pour le coach. Car ceci appartient en priorité à la
personne et à son l’histoire. Pour le coach ce qui est important est
« comment son client va développer sa motivation », si là est sa
demande.
- le coaching s’exerce dans un
espace temps fini, prédéterminé et contractualisé,
- il est rare qu’une
psychothérapie fixe un objectif contractualisé. On sait quand débute une
thérapie, on ne sait que rarement quant
elle se termine.
Le
passage de la demande aux indicateurs de résultats et leur usage constituent
aussi des règles inhérentes au coaching, ce qui le différencie de la
psychothérapie :
- Avoir une demande motivée =
pas de demande exprimée par la personne (ou par l’équipe), pas de coaching.
- Fixer un contrat d’objectifs
coach-coaché (ou triangulaire : coach-entreprise-coaché) = pas de contrat
pas de coaching.
- Fixer (au début du coaching)
des indicateurs de résultats dans le temps = pas d’indicateur de résultat (ou/et
de progression), pas de coaching. Au cours de la session de bouclage ou de
points intermédiaires, le coaché pourra ainsi utiliser les indicateurs de
résultats, pour apprécier ceux de ses objectifs atteints et ceux qui ne le sont
pas. Il est nécessaire que ces indicateurs de résultats soient exprimés par le
coaché, ou pour le moins qu’il les fasse sien.
- Vivre le coaching dans
l’action = pas d’action, pas de coaching. Grâce à ses indicateurs de résultats
le coaché prendra conscience de sa responsabilité dans ses changements (sphères
professionnelle ou personnelle). Ainsi il fera les choix et mènera les actions
nécessaires.
En
conclusion, le coach a pour vocation, durant le coaching, à encourager
l’initiative du coaché, et à s’effacer à l’issue du coaching. Le coaché n’ayant
plus besoin du coach, le coaching est terminé. Le coaching est une marche vers
l’autonomie du coaché.
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Bon
d’accord, le coaching n’est pas une psychothérapie. Mais à y regarder de près,
les choses sont plus complexes :
- le cadre formel du coaching
n’est pas présenté comme un cadre thérapeutique. Cependant de nombreuses
techniques de coaching sont issues de techniques psychothérapeutiques
clairement codifiées. Ainsi ces techniques dérivées peuvent-elles avoir des
effets thérapeutiques à l’insu des protagonistes.
- l’analyse d’une demande de
coaching est essentielle. En effet ce n’est parce qu’une personne sollicite un
coaching que l’indication de coaching est pertinente.
L’identification,
lors d’un questionnement préalable, du « réel » de la personne et de
l’écart entre la situation vécue et celle souhaitée, permet au coach de poser
un diagnostic sur le besoin à satisfaire. Ainsi peut-il répondre à la
question : s’agit-il d’une authentique demande de coaching où d’une
demande de psychothérapie, où faudrait-il envisager les deux types
d’accompagnement ?
De
plus il n’est pas rare qu’un coaching soit demandé parce que pousser la porte
d’une psychothérapie serait trop impliquant. De même il arrive qu’une personne
évoque un problème dans sa sphère
professionnelle lors qu’en fait il souhaite traiter une difficulté ordre
personnelle ou privée (timidité, familiale, affective, …), ou que celle-ci est
sous-jacente.
- dans le Life Coaching, ou
coaching centré sur la personne, les
objectifs à atteindre impliquent l’individu (savoir résoudre un conflit, mieux
communiquer en public, être plus motivé, savoir dire non, …). Une telle demande
s’exprime parfois sur fond psychopathologique. Le coach devra alors savoir
changer de contexte s’il est aussi psychothérapeute, ou adresser son client au
professionnel adéquat dés qu’il en aura repéré
la nécessité.
Sur
ces deux derniers points Rolland Brunner (Psychanalyste,
Vice-président de l’Institut Psychanalyse et Management, cofondateur de
- « Ainsi si le coaché a décidé de faire sa thérapie en douce, sa
thérapie « by the way », avec un coach, laissez-le faire. Après tout
on peut très bien faire jusqu’à un certain point sa thérapie en faisant du
théâtre, de la danse, de l’équitation ou de la voile. Alors pourquoi pas avec
du coaching ? »
- « Le coach se doit d’accompagner son coaché, dans sa régression
facilitée par le transfert. Il doit laisser le coaché exprimer sa souffrance et
sa plainte ; car le fait de dire, c'est-à-dire l’abréaction, a en soi un
effet sédatif ».
Cependant,
Rolland Brunner souligne certaines contre-indications au coaching qui se
situent au niveau d’éventuelles pathologies :
- « le coaching ne peut prendre tout son sens et son efficacité que
pour des sujets névrotiques, c'est-à-dire de structure « normale » ou
de structure limite, c’est à dire de structure « pseudo névrotique ».
- la structure perverse :
« Il convient de rappeler ici,
qu’avec le pervers, on ne peut être que complice ou moraliste, mais jamais
coach ».
- la structure psychotique :
« l’activation de l’imaginaire par
le processus même de coaching, risque de mettre en route chez le sujet un
processus de décompensation pouvant déboucher sur un accident psychiatrique
majeur, une bouffée délirante par exemple ».
- un sujet souffrant d’une
pathologie psychiatrique avéré.
L’ambigüité
de pratique, parfois cultivée, entre Coaching et Psychothérapie survient en
plus dans un contexte d’évolution de la réglementation
de la profession de psychothérapeute.
Le
premier des droits de la personne qui souhaite un accompagnement est de pouvoir
faire un choix suffisamment éclairé.
Les
débats qui ont précédés la loi encadrant la pratique de la psychothérapie et
l’usage du titre de psychothérapeute (juin 2009), visaient à protéger le public
en lui donnant accès à des professionnels compétents lorsqu’il a recours à un
psychothérapeute.
Au
préalable, il a fallu définir ce qu’est la psychothérapie, ainsi que ce qui la
différencie des autres formes d’intervention dans le domaine de la santé mentale
et des relations humaines.
Selon
le rapport Trudeau, l’élément principal est que la psychothérapie « est un traitement psychologique pour un
trouble mental, pour des perturbations comportementales ou pour tout autre
problème entraînant une souffrance ou une détresse psychologique »
Par
exclusion du champ de la psychothérapie, et bien qu’il n’y ait pas une
définition unique et officielle du coaching, il apparaît ainsi que le coaching
n’est pas une psychothérapie. Aucun professionnel ne doit donc prétendre offrir
un traitement sous l’appellation de coaching.
A
travers ses différentes définitions d’auteurs et d’associations, le coaching se
décrit par des objectifs de développement de la personne et des équipes dans
leur rôle ou dans un contexte donné.
Qu’il
soit pratiqué par des psychologues ou non, comme toute activité
professionnelle, le coaching nécessite une formation spécifique et une
expérience appropriée.
En
effet un psychologue clinicien n’ayant jamais travaillé en entreprise serait
mal inspiré de s’improviser coach managérial ou d’organisation. De même un
coach non suffisamment formé aux techniques psychologiques ne pourrait se
déclaré psychothérapeute.
Chacun
des organismes compétents, que ce soit ceux défendant les intérêts des
psychothérapeutes (le Syndicat des
Psychologues en Exercice Liberal- SPEL, …) ou les intérêts des coachs (
Parmi
les règles essentielles, rappelons l’importance pour le client que soient bien
clarifiés les objectifs, les méthodes et le cadre de l’intervention proposée.
Seule
une bonne évaluation (de quoi s’agit-il, quelle est la situation ?
Ecologie de la demande, …) permet de savoir si la personne peut être aidée par
un coaching ou une psychothérapie.
De
plus cette évaluation permet au professionnel de déterminer le contenu de
l’intervention et d’en piloter le processus.
Selon
Vincent Lenhardt (1) « il est
indispensable, au préalable et en permanence pendant le travail de coaching, de
gérer les paramètres de la relation coach-client (de la définition du réel
à l’élaboration d’un contrat minimum)… Faute de ce travail préalable, le
positionnement du coach risque d’être « à côté de la plaque ».
Pour
Rose-Marie Charest (Présidente de l’ordre
des Psychologues du Québec) « seule
une bonne connaissance des limites de sa propre compétence et de l’expertise
développée par d’autres collègues pourra guider la personne vers la ressource
la plus appropriée pour elle. La rigueur n’est pas un frein au développement de nouvelles pratiques. Elle
en est la base ».
Pratique et limites du coaching
En synthèse, il s’agit ici
d’éclairer la pratique du Coaching en précisant ses limites vis à vis du
Développement Personnel et de
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Bibliographie
(1)
- Vincent Lenhardt : « Les responsables porteurs de sens ». Ed. Insep Consulting
(2)
- Vincent Lenhardt : « Au cœur de la relation d’aide ». Ed. InterEditions
(3)
- François Délivré : « Le métier de coach ». Ed. d’Organisation
(4)
- Jean-Antoine Malarewicz : « Réussir son
coaching – Une approche systémique». Ed.
Village Mondial
(5)
- Charles Baudouin : « De l'instinct à l'esprit ». Ed. Imago
(6)
- Bernard Auriol : «Yoga et
Psychothérapie ». Ed. Privat
(7) - Paul Watzlawick, Richard Fisch, et John H. Weakland: « Changements. Paradoxes
et psychothérapie ». Ed. Seuil
© Patrice Sammut (email : patrice.sammut@wanadoo.fr)
6 Novembre 2009