“More” un film ambigu au sujet des toxicomanies

Dr Bernard Auriol

 

« More », le premier film de Barbet Schroeder a revêtu les caractères d’un mythe qui manifeste la déconvenue – assortie d’une nostalgie - que la drogue ne soit que ce qu’elle est ! Une expérience de mirages, finalement vouée à la sécheresse et au désespoir.

 

L'héroïne en particulier – et la marginalité constituent le thème central du film. Généralement, on en retient surtout la qualité plastique, l’hédonisme mal construit, en perte d’Epicure. Il s’agit bien de la description abusivement poétisée d’une descente aux enfers. On se donne comme idéal de se brûler les yeux dans la contemplation d’un soleil noir qui conduit à la mort : « soleil aveuglant d'Ibiza, musique originale des Pink Floyd, précision documentaire de la mise en scène » (Sylvain Lefort).

 



 

Barbet Schroeder a déclaré, à propos de son apparition hitchcokienne dans le film : "Avec ce personnage, j'enterre un peu de mon moi passé". Il l’enterre, mais en a-t-il fait le deuil ? Par moment la description et la dénonciation ne sont pas loin d’une forme de complaisance et peut-être de regret, comme celui de ces anciens combattants qui décrivent avec délice les souffrances qu’ils durent subir ! Dennis Harvey remarque que More nous peint le tableau convenu du manque d’enracinement européen lié à la dérive de la contre-culture soixante-huitarde. Comme dans d’autres films qu’il a dirigés, Schroeder se place en observateur « objectif » des addictions toxicomaniaques et de la folie qu’engendre la prise de contrôle d’un autrui dépendant. Il nous perd dans les labyrinthes de « l’ego » et du vouloir.

 

Stefan, étudiant allemand fraîchement diplômé, part en quête de lui-même en s’adonnant aux excès décadents du “plaisir”. Il va en stop à Paris pour dépasser ses limites, aller vers « more » en terme de sexe et de drogues. Il tombe amoureux d’Estelle, américaine droguée à l’héroïne, et il la suit jusqu’à l’île mythique d’Ibiza.. Sous son influence, il tombe peu à peu dans la spirale infernale de la dépendance. Leurs tempéraments sont opposés sous certains aspects : il tend à garder la « maîtrise », le contrôle, elle fend la bise sans cure des conséquences. Ils partagent pourtant une même personnalité « dépendante »,  assoiffée de jouissance instantanée. Leur temps perd peu à peu toute structure, leur accrochage à la dope les font décrocher de la réalité. D’instants de plaisir en mauvais trips, Stefan vit une véritable descente aux enfers, où la plongée dans la délinquance, les rechutes et l’autodestruction permanente le mènent à un drame final inéluctable…

 

Filmographie de Barbet Schroeder


More (1969), Sing Sing (1971; documentaire),La vallée (1972), Général Idi Amin Dada (1974 ; documentaire), Maîtresse (1976), Koko, le gorille qui parle (Koko a Talking Gorilla 1977 ; documentaire), Tricheurs (1983), The Charles Bukowski Tapes (1983; documentaire), Barfly (1987), Reversal of fortune (1990),  Le mystère Von Bulow (1991),  Single white female (1992) , J.F. partagerait appartement (1992), Kiss of Death (1995), Before and after (1996),  Le poids du déshonneur (1996), Desperate measures  (1997), L’enjeu (1998), La vierge des tueurs (Our Lady of the Assassins , 2000), Calculs Meurtriers (Murder by Numbers) (2002).

 

 

 

Réalisation :

B. Schroeder 

Barbet Schroeder (c) D.R.

 

 

 



Scénario : Barbet Schroeder et Paul Gégauff,

Photo : Nestor Almendros,

Montage : Rita Roland, Denise de Casabianca,

Musique : Pink Floyd,

Interprétation : Mimsy Farmer (Estelle), Klaus Grunberg (Boy), Heinz Engelmann (Wolf), Michel Chanderli (Charlie), Georges Montant (Seller), Louise Wink (Cathy) ;

Distribution Les Films du Losange, 1969, Luxembourg - 116'

 

 

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29 Septembre 2002