Extraits d'oeuvres littéraires contenant l'expression
"bouche-bée".

Dr Bernard Auriol

Auteur Inconnu => l’Assassiné perpétuel, pp. 178

Le commissaire essaie d'imaginer la scène... L'homme ou la femme aurait pu évidemment le maintenir pendant que l'autre frappait. Mais dans ce cas, ils auraient été littéralement recouverts de sang. Or - et c'est un point qui l'a toujours troublé- on n'a pas retrouvé la moindre trace de sang sur Paul et Isabelle Chenier. Le policier prononce lentement :

- Mais alors?

Alors, l'hypothèse la plus vraisemblable, c'est que Raoul Chenier s'est frappé lui-même.

Le commissaire Dupré en reste bouche bée.

- Il a pu faire cela ?... C'est une chose possible?

Le médecin répond d'une voix grave

- Dans certains cas d'aliénation mentale, la résistance à la douleur dépasse tout ce qu'on peut imaginer...

Extrême surprise

LES CAPUCINS DU DIABLE

10 mai 1960. C'est le soir. Giorgio Canetto, riche fermier de Mazarini, un bourg de Sicile, termine de dîner en compagnie de sa femme et de son jeune fils, quand on frappe à la porte avec insistance. C'est le fils qui se lève de table pour aller ouvrir. Mais, après avoir regardé par la fenêtre quel est ce visiteur nocturne, il revient tout surpris trouver son père :

- Papa, c'est un capucin!

Très intrigué à son tour, Giorgio Canetto va ouvrir. Que peut bien lui vouloir un capucin à la tombée de la nuit?

Effectivement, l'homme qui se tient sur le seuil est vêtu d'une robe de bure, son capuchon pointu est enfoncé jusqu'aux yeux. Malgré cela, Giorgio le reconnaît : c'est le père Vùicenzo, le supérieur du monastère qui se trouve non loin de Mazarini.

Le père ôte son capuchon. Son visage aux cheveux blancs exprime la gravité.

- Monsieur Canetto, je suis venu pour une mission ... délicate. Je vais vous demander de l'argent ... beaucoup d'argent : 2 millions de lires.

C'est tellement énorme que, après être resté un moment bouche bée, Giorgio Canetto éclate de rire.

Extrême surprise


Natalie Babbitt

La source enchantée

( TUCK EVERLASTING traduit par ROSE-MARIE VASSALLO)

Plus tard, beaucoup plus tard, lorsqu'elle voulut repasser dans sa tête le film des événements, Winnie ne put trouver, pour les minutes qui suivirent, qu'une suite d'images floues. Elle se revoyait d'abord agenouillée sur le sol, en train de répéter qu'elle voulait boire de cette eau; et la minute d'après, sans savoir comment, elle se retrouvait dans les airs, happée par une poigne solide, bouche bée, incapable de crier, puis à califourchon sur la croupe dansante de la grosse jument, encadrée de Miles et Jesse, au petit trot, à ses côtés, tandis que Mae courait devant, soufflant comme un boeuf, la bride à la main.

Enlevée! Des quantités de fois, en imagination, Winnie avait été victime de toutes sortes d'enlèvements. Mais jamais, au grand jamais, la scène vécue en rêve n'avait ressemblé à celle qui se déroulait là, pour de bon, en grandeur réelle. Elle s'était toujours vue entourée d'une troupe de fiers-à-bras à longues moustaches, qui s'emparaient d'elle et la roulaient dans une couverture, puis l'emportaient comme un sac de patates alors qu'elle implorait leur pitié. Alors que là, contre toute attente, ses kidnappeurs semblaient encore plus affolés qu'elle, et que c'étaient eux qui, humblement, imploraient sa compréhension!

Extrême surprise

Azouz Begag.

Le gone du du Chaâba

La sonnerie de 10 heures retentit. Le premier cours de français prend fin. Comme les autres élèves, je range mes affaires dans mon cartable et m'apprête à sortir de la classe, lorsque Monsieur Loubon me pose une dernière question, en arabe cette fois, un arabe algérien, comme on parle à la maison. Il me dit :

- Tu comprends l'arabe ?

En français, je lui réponds

- Oui, je parle toujours arabe avec mes parents.

- Allez, au revoir, à lundi prochain, conclut-il en souriant.

Mon voisin, immigré de là tour Eiffel m'observe comme si j'étais un dieu. Cette fois, il est bouche bée.

- Tu le connaissais d'avant, le prof ? demande-t-il curieusement.

- Non, lui dis-je. C'est la première fois que je le vois.

- Putain! s'esclaffe-t-il. T'es veinard, toi!

=> admiration doublée d’étonnement

 

 

Evelyne Brisou-Pellen

LE DÉFI DES DRUIDES

- Je ne peux pas vous dire mon nom, commença-t-elle d'une voix ferme : j'en ai eu trop. Je suis née dans un pays où on parle la même langue qu'ici, mais c'est loin vers le sud, en Hispanie je crois. J'ai été prise en otage par les Romains, puis vendue à un marchand grec, qui m'a échangée contre de l'étain au port de Corbilo (note), chez les Namnètes, et mon nouveau propriétaire m'a revendue à un chef romain qui voulait m'expédier à Rome, comme cadeau à sa femme.

Les quatre garçons en restaient bouche bée.

(…)

- Simon voudrait savoir, dit Sencha, comment tu t'es enfuie.

La jeune fille eut un fin sourire. Pour la première fois, son visage s'adoucit. Elle fixa le petit garçon (…) et dit :

- Tu vois, Simon, je sais ce que c'est que d'être vendue. Je connais les maîtres, je sais ce qu'on peut attendre d'eux. Alors, au marché de Corbilo, je me suis montrée sage et patiente : si on se révolte ouvertement, on est frappé, et ça ne sert à rien, je l'ai appris depuis longtemps. J'ai aujourd'hui seize ans, et j'ai vu le monde. Le Romain m'a achetée, et m'a fait monter dans une charrette pleine de sacs. J'ai cru comprendre qu'il était venu avec ses hommes chercher du ravitaillement et qu'ils repartaient tous chez le peuple des Andes, vers l'est, où ils avaient leurs quartiers d'hiver.

Elle se tourna de nouveau vers Simon qui écoutait passionnément.

=> Admiration et Etonnement collectifs

Dino Buzzati (Nouvelles traduites de l'italien par Jacqueline Remillet)

LE K

- Tu n'aurais pas vu un K par hasard ? ricanaient les autres en touchant du fer.

- Pourquoi riez-vous ? Pourquoi touchez-vous du fer ?

- Parce que le K est une bête qui ne pardonne pas. Et si jamais elle se mettait à suivre le navire, cela voudrait dire que l'un de nous est perdu." (…)

Et un soir, tandis que son magnifique navire était ancré au large du port où il était né, il sentit sa fin prochaine. Alors il appela le capitaine, en qui il avait une totale confiance, et lui enjoignit de ne pas s'opposer à ce qu'il allait tenter. L'autre, sur l'honneur, promit.

Ayant obtenu cette assurance, Stefano révéla alors au capitaine qui l'écoutait bouche bée, l'histoire du K qui avait continué de le suivre pendant presque cinquante ans, inutilement.

"Il m'a escorté d'un bout à l'autre du monde, dit-il, avec une fidélité que même le plus noble ami n'aurait pas témoignée. Maintenant je suis sur le point de mourir. Lui aussi doit être terriblement vieux et fatigué. Je ne peux pas tromper son attente."

(il part en barque pour se battre contre le K et mourir)

Très étonné et attentif

Italo Calvino

Marcovaldo ou les saisons en ville

Médium poche, pp. 9 sq.

- Papa ! Regarde le monsieur, là, tout ce qu'il a déjà pris ! s'écria Michelino.

Alors le père, levant la tête, vit Amadis, debout près d'eux, tenant également sous le bras un panier, plein de champignons.

- Ah ! vous les ramassez aussi ? dit le balayeur. Y sont bons à manger alors ? Moi, j'en ai ramassé un peu ; mais je savais pas si on pouvait s'y fier... un peu plus loin dans l'avenue, y en a qui sont encore plus gros... Bon, maintenant que je sais, je vais affranchir mes parents qui sont là-bas à se demander s'y faut les ramasser ou non...

Il s'éloigna à grandes enjambées.

Marcovaldo demeura bouche bée : des champignons encore plus gros et qu'il n'avait même pas remarqués, une récolte inespérée qu'on lui soufflait comme ça, sous le nez. Il demeura un moment immobile, comme pétrifié de colère, de rage.

Etonnement et déception, rage


Georges Courteline

Courteline est tombé sur un cocher qui se trompe sans cesse et qui oublie la destination de la course (Avenue Trudaine). Il se met en colère ! Le cocher, demande humblement qu’il lui indique le chemin pas à pas. Il explique à la fin :

— Paris, monsieur, mais je le connais comme personne! Ça fait plus de trente ans que je conduis.

— Et vous vous perdez encore?

— Je ne me perds pas : je suis diabétique.

Courteline en resta bouche bée, se demandant si l'homme se payait sa tête

— Et alors? Quel rapport y a-t-il?

— Ça m'a ôté la mémoire, lui expliqua le cocher descendu de son siège Un client me donne une adresse : au coin de la rue je l'ai oubliée. J'ai beau me la répéter pour m'en souvenir, il n'y a pas moyen, ça me fond dans la caboche.

Expression d’étonnement et même d’incompréhension face à l’absurde

 Le Train perdu

Claude Farrère

Tiphaigne Hoff, le chef de gare, agita à bout de bras son fanal (lanterne), et cria -par habitude- "En arrière, les voyageurs!" tandis que le train 1815, gémissant de tous ses freins serrés, entrait en gare. Par habitude: car il n'y avait pas un seul voyageur sur le quai. Pas un seul: Tiphaigne Hoff, d'un coup d'oeil, le constata, non sans regret.

"Ces sacrés trains de nuit! grogna-t-il; jamais un chat."

(…)

Et les trois minutes d'arrêt écoulées, il cria, par habitude: "En voiture!" avant de donner le coup de sifflet réglementaire. Mais, soudain, il resta bouche bée: il aurait juré, l'instant d'avant, que le quai, d'un bout à l'autre, était désert; et voilà que deux voyageurs y avaient surgi comme d'une trappe (sorti d'on ne sait où)! Deux voyageurs, un très grand, un très petit, tous deux prêts à monter en wagon.

"En voiture!" répéta tout de même Tiphaigne Hoff, criant plus fort. Et il s'avança, car ces deux voyageurs ne se hâtaient point.

En vérité, je vous le dis, c'étaient deux drôles de voyageurs! Tiphaigne Hoff, ahuri (très étonné) déjà de leur apparition subite et un brin mystérieuse, écarquilla les yeux en les voyants de près.

Extrême surprise à la vue d’une présence soudaine et insolite


Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel

Le Système Ribadier

Comédie en trois actes

Acte II
Scène IX

Les Mêmes, moins madame Petypon et Etienne

Aussitôt les deux personnages partis, les deux hommes se regardent, bouche bée, en hochant la tête.

Mongicourt, devant le canapé. - Eh ben! mon vieux!...

Petypon, à droite au milieu de la scène. - C'est raide!

Mongicourt. - Plutôt!

Ils ne peuvent s'empêcher de rire.

(…)

La Môme. - Vêts-moi! (Voyant Petypon qui la regarde bouche bée.) Donne-moi un vêtement, quoi!

Mongicourt, avec le plus grand sérieux. - Vêts-la.

Petypon. - Ah! "vêts-moi"!... Eh! comment veux-tu que je te vête?... ma femme a la manie de tout enfermer!...

Etonnement

Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel

Le Système Ribadier

Comédie en trois actes

Scène XXII

Petypon, étonné de cet accueil, les regarde tous deux bouche bée.

 étonnement


Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel

Le Système Ribadier

Comédie en trois actes

Acte III

Scène III

Le Duc. - De quoi?... euh!... (Brusquement, pivotant sur les talons.) J'peux pas vous le dire!

Il remonte à droite.

Gabrielle, se levant, absolument ahurie. - Comment?

Le Duc, se retournant vers Gabrielle. - Non, madame, non! ne m'interrogez pas! parlons de ce que vous voudrez; mais quant à vous dire l'objet qui m'amène, n'y comptez pas!

Il remonte fond droit.

Gabrielle. - Hein? (A part.) Eh bien! en voilà un original! (Haut.) Mais, pardon, monsieur... alors, pourquoi êtes-vous ici?

Le Duc. - Ca, madame... (Pirouettant sur lui-même, et sur un ton malicieux.) c'est mon affaire!

Gabrielle, bouche bée. - Ah?

(…)

Il sort de droite en remportant son bouquet.

Gabrielle, reste un temps comme médusée, puis, tout en reposant la chaise au-dessus du canapé. - Mais, qu'est-ce que c'est que ce toqué-là?...(…) Il vient me déranger pour me dire que la Touraine est le verger de la France! Il en a un toupet!

médusée


Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel

La Main passe!

 

Pièce en quatre actes

Scène IV

Monsieur Coustouillu, ne vous occupez pas de ce que vous dit mon mari, et venez me dire bonjour.

(…)

Coustouillu, qui est redescendu, à Francine. - Madame...! (Il lui donne une vigoureuse poignée de main. Allant à Chanal et lui baisant la main.) Cher ami...

Chanal, narquois. - Non, mon vieux, c'est le contraire.

Coustouillu. - Oh!

Il fait mine de retourner à Francine.

Chanal. - Non, va, ça va bien! (Le faisant passer pour le présenter à Hubertin qui, depuis l'entrée de Coustouillu, est resté bouche bée devant la scène qui se joue devant lui.) Tiens, je te présente monsieur Hubertin qui désire vivement faire ta connaissance.

Surpris et intéressé par un spectacle


Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel

 La Main passe!

Pièce en quatre actes

Scêne VIII

Massenay, protestant. - Oh! Permets!... Je n'ai pas pu dire une chose que je ne savais pas! Je t'ai confié que Coustouillu était tellement amoureux d'une femme mariée que lorsqu'il était en sa présence il en devenait complètement idiot... voilà tout... Alors, toi, tu m'as répondu: "C'est ma femme!" C'est pas la même chose.

Chanal. - Oui, enfin, ça revient au même!... (A Francine.) Eh bien! hein? J'espère qu'en voilà une bonne? Tu ne t'en serais jamais doutée?

Francine, avec le plus grand calme. - Moi?... Je le savais!

Chanal, ahuri, bouche bée, regarde Massenay avec de grands yeux, regarde sa femme, puis. - Tu savais qu'il était amoureux de toi?...

Etonné que l’autre ne soit pas étonnée


Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel

La Main passe!

Pièce en quatre actes
Scêne VI

Francine, passant outre. - C'est bien! je suis à vous! faites de moi ce qu'il vous plaira. (…)

Il la couvre de baisers goulus.

Francine. - C'est ça! Allez! Allez!

Coustouillu. - Oui.

Nouveaux baisers.

Francine. - Allez, allez, c'est ça!

A ce moment paraît Chanal venant du cabinet de travail. Il reste cloué sur le seuil de la porte devant la scène qu'il a sous les yeux. Bouche bée, impuissant à pousser un cri, il lève de grands bras en l'air, pivote sur lui-même et rentre précipitamment dans le cabinet de Massenay, - tout ceci sans que le couple tout à son affaire se soit aperçu de sa présence. Chanal n'est pas sitôt sorti que l'on sonne à la cantonade.

Francine, se dégageant brusquement de l'étreinte de Coustouillu et se levant d'un bond. - On a sonné! vite, venez!

Extrême surprise


Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel

La Main passe!

Pièce en quatre actes
Scène X

Francine, descend entre piano et mur, et arrivée devant le canapé, sur un ton persifleur. - Eh! bien, voilà!... j'ai choisi un amant!

Massenay, gouailleur. - Ah?

(…)

Massenay. - Parfait! Parfait! Et... quel est celui qui?

Francine. - Oh! Ça c'est mon secret!

 (…)

Chanal, bas à Massenay. - Parbleu! C'est bien ça: c'est Coustouillu!

Massenay, haussant les épaules. - Ah! ouat, Coustouillu!

Chanal. - Bien! bien! N'empêche que si tu le voyais entrer ne bafouillant plus... et parlant comme tout le monde...!

Etienne, annonçant. - Monsieur Coustouillu!

Entrée de Coustouillu entièrement transformé: il est à l'aise, le ton dégagé, le geste large et parle d'abondance.

Coustouillu. - Allez, Etienne! inutile de m'annoncer. (Sans transition tout en descendant vers Massenay et Chanal qui coude à coude l'un contre l'autre le regardent bouche bée.) Bonjour, mon cher Massenay! Comment ça va aujourd'hui? Quel temps, hein! Un soleil radieux! Je passais devant tes fenêtres, je me suis dit: "Je vais monter lui serrer la main!" Tu as bonne mine tu sais! C'est vrai, il a bonne mine.

Massenay, n'en croyant pas ses oreilles. - Il parle!(…)

Extrême surprise

Georges Feydeau ; texte établi par Henry Gidel 

On purge bébé!

Pièce en un acte

Follavoine. – (…) Alors tu ne sais pas... tu ne sais pas qu'aujourd'hui le gouvernement n'a plus qu'un objectif: améliorer le sort du soldat! On le soigne, on le dorlote, on le met dans du coton; dernièrement on a été jusqu'à lui coller des pantoufles!

(…)

Follavoine. - Et naturellement on ne veut pas en rester là. C'est comme cela que maintenant on vient de décider, afin que les hommes ne soient plus exposés à attraper froid en descendant la nuit par le vent, par la pluie, que désormais chaque soldat de l'armée française aurait son vase de nuit!

Julie, ébahie. - Non!

Follavoine. - Personnel et à son matricule.

Julie, bouche bée. - Ah!... ce que ça en fera!

Follavoine. - Conséquence: prochainement, adjudication de cette nouvelle... fourniture militaire; et moi, comme fabricant de porcelaine, j'ai décidé de soumissionner. Et c'est ici que Chouilloux apparaît comme le Deus ex machina!...

Etonnement admiratif

Elisabeth Gille

Un paysage de cendres

Les vantardises concernant ses parents dont Léa accablait ses compagnes, luxe de détails sur son lit à baldaquin dans sa chambre, à Paris, sur les robinets en or de la salle de bains, sur ses robes, ses jouets - sa maison de poupées, ses dînettes, sa boîte de perles pour enfiler des colliers -, et que les petites provinciales écoutaient bouche bée sans pouvoir s'empêcher d'y croire un peu, elle ne les débitait jamais en présence de Bénédicte. Elle ne lui montrait pas non plus le petit carnet qu'elle cachait sous son oreiller et dans lequel elle consignait les anecdotes qu'elle raconterait à son père et à sa mère quand ils reviendraient: mauvais tours joués à ses camarades, cahiers déchirés, bonbons volés, brimades que les autres lui faisaient subir, cheveux tirés, insultes comme ce surnom de ( Bébé Cadum" qu'on lui jetait constamment à la figure et qui lui faisait sortir ses griffes.

Ecoute passionnée

Contes de Grimm

LES TROIS À QUI LA CHANCE SOURIT

Un père appela un jour ses trois fils. Au premier il donna un coq, au deuxième une faux et au troisième un chat.
(…)

Le deuxième frère décida :
- J'irai, moi aussi, dans le monde ! On verra si j'ai autant de chance.
Il marcha et marcha, et rien n'indiquait qu'il aurait autant de réussite avec sa faux ; partout il rencontrait des paysans avec une faux sur l'épaule. Un 'jour, enfin, le destin le dirigea sur une île dont les habitants n'avaient jamais vu de faux de leur vie. Lorsque le seigle était mûr, les villageois amenaient des canons sur les champs et tiraient sur le blé. C'était, tout compte fait, pur hasard : un coup ils tiraient trop haut, un coup ils touchaient les épis à la place des tiges, et beaucoup de graines étaient ainsi perdues sans parler du fracas pendant la moisson. Insoutenable !
Le garçon s'en alla dans le champ et commença à faucher. Il fauchait sans faire de bruit et si vite que les gens le regardaient bouche bée, retenant leur souffle. Ils s'empressèrent de lui donner ce qu'il voulait en échange de la faux et lui amenèrent un cheval avec un chargement d'or aussi lourd qu'il pouvait porter.

Admiration étonnée, avec rétention du souffle.

Michel Houellebecq

Les particules élémentaires

Troisième partie

Illimité émotionnel

 1

Débarrassé des dossiers et des livres qui encombraient ses rayonnages, le bureau de Desplechin paraissait immense. "Eh oui... fit-il avec un sourire discret. Je pars en retraite à la fin du mois. " Djerzinski en resta bouche bée. (…). En quinze ans de vie professionnelle, Desplechin était la seule personne avec qui il ait souhaité établir un contact dépassant le cadre de la simple juxtaposition de hasard, purement utilitaire, indéfiniment ennuyeuse, qui constitue le climat naturel de la vie de bureau. Eh bien c'était raté.

Surprise amorce de regret

Michel Houellebecq

Particules élémentaires

2

"Eh bien..." le médecin avait l'air terriblement vieux, compétent et triste, "je crois malheureusement qu'il n'y a aucun doute: vous avez un cancer de l'utérus au stade pré-envahissant." Il rassujettit ses lunettes sur son nez, examina les feuillets à nouveau; l'impression de compétence générale en fut sensiblement augmentée. (…)." Il jeta un regard à Annabelle : chose ennuyeuse elle ne réagissait pas, elle restait complètement bouche bée; c'était probablement le prélude à une crise. On recommandait en général aux praticiens d'orienter la patiente vers une psychothérapie de soutien - il avait préparé une petite liste d'adresses - et surtout d'insister sur une idée forte: la fin de la fertilité ne signifiait nullement la fin de la vie sexuelle; certaines patientes, au contraire, en voyaient leurs désirs sensiblement augmentés.

- « Donc, on va m'enlever l'utérus.. », dit-elle avec incrédulité.

Surprise refusée
 
 

La ligne verte

Stephen King ( 1996 ),  Editions J'ai Lu , 1996, pour la traduction française.:

(The two dead girls traduit de l'américain par Philippe Rouard)

Adaptation : Grégory Braeme, octobre 1999.

Premier épisode : deux petites filles mortes.

Le corps de Delacroix s'est projeté en avant avec la raideur d'un pantin, s'est rejeté en arrière, et a recommencé. Percy le regardait, bouche bée d'horreur. Il s'était attendu à quelque chose, mais pas ça.

Sentiment d’horreur

La ligne verte

Stephen King ( 1996 ),  Editions J'ai Lu , 1996, pour la traduction française.:

(The two dead girls traduit de l'américain par Philippe Rouard)

Adaptation : Grégory Braeme, octobre 1999.

Premier épisode : deux petites filles mortes.

- Qu'est-ce qu'on va faire ? a gémi Harry. Bon Dieu, Paul, qu'est-ce qu'on va faire ?

- On peut rien faire, a dit Brutal. On est coincés. C'est pas ton avis, Paul ?

Ca s'était mis à circuler très vite dans ma tête. J'ai regardé Harry et Dean, qui levaient vers moi des yeux de gosses apeurés. J'ai regardé Percy, qui se tenait bouche bée, les bras ballants. Enfin j'ai regardé mon vieil ami, Brutus Howell.

- Ca va aller, j'ai dit.

Désarmé, bras ballants

Jack London

La ruée à la rivière de la Squaw.

Breck fit mine de refuser, mais il était entouré de visages menaçants. A regret, il fouilla dans sa poche. Comme il en retirait la boîte à poivre, elle cogna contre un objet évidemment dur.
" Sortez tout ce que vous avez là ! " tonna Shunk Wilson.
Et à tous apparut l'énorme lingot, d'un or jaune, comme aucun n'en avait encore vu. Shunk Wilson resta bouche bée. Une demi-douzaine de gens, sitôt le premier coup d'oeil jeté, se précipitèrent vers la porte et, après s'être bousculés en s'injuriant, ils franchirent le seuil et furent catapultés au-dehors. Le juge vida le contenu de la boîte à poivre sur la table, et la vue des pépites d'or brut en chassa encore une demi-douzaine.

=> on voit ici que l’expression utilisée par le traducteur fait état de la surprise seule, sans qu’il y ait quelque chose à écouter.

Jack London

Nam-Bok le menteur

Des exclamations d'incrédulité s'élevèrent, et Koogah, qui comptait de nombreuses années, secoua la tête.
" Si chaque bidarka était un grain de sable ", poursuivit Nam-Bok d'un ton provocant, " et s'il y avait autant de bidarkas que de grains de sable sur cette plage, elles ne parviendraient toujours pas à faire un canot aussi grand que celui que j'ai vu le matin du quatrième jour. Il était immense et on l'appelait une goélette. Et alors, j'ai vu cette chose étonnante, cette grande goélette, s'avancer vers moi, et dedans j'ai vu des hommes...
- Arrête, Ô Nam-Bok ! " interrompit Opee-Kwan. "Quelle espèce d'hommes était-ce donc? - des hommes très grands?
- Non, des hommes ordinaires, comme toi et moi.
- Et le grand canot, il allait vite ?
- Oui, très.
- Ses flancs étaient élevés et les hommes de petite taille. " Opee-Kwan posa ces prémisses avec assurance. "Ils ramaient donc avec de longues pagaies?"
Nam-Bok sourit de toutes ses dents. " Il n'y avait pas de pagaies ", dit-il.
Un long silence tomba sur l'assistance demeurée
bouche bée. Opee-Kwan emprunta la pipe de Koogah et tira deux ou trois bouffées d'un air contemplatif. L'une des jeunes femmes fut prise d'un fou rire nerveux, ce qui lui attira des regards furibonds.

=> l’expression est appliqué de manière paradoxale à tout un groupe : comme si tous les membres du groupe prenaient cette expression du visage. Il s’agit ici d’une application décalée, méta^phorique exprimant l’étonnement général…

Jack London

Nam-Bok le menteur

Il se retourna brusquement pour faire face au chef. "Opee-Kwan, tu as déjà entendu le lion de mer mugir de colère. Eh bien, essaie de voir dans ta tête des lions de mer aussi nombreux que les vagues de l'océan, essaie de voir encore tous ces lions de mer réunis en un seul qui se mettrait à mugir, voilà comment mugissait la chose que j'entendis. "
Les pêcheurs s'exclamèrent de stupéfaction et OpeeKwan en resta
bouche bée, la mâchoire tombante.


" Et au loin, je vis un monstre semblable à mille baleines. Il n'avait qu'un oeil, il vomissait de la fumée et soufflait par le nez avec un vacarme incroyable. Alors, j'ai pris peur et, les jambes flageolantes, je me suis mis à courir sur le chemin entre les barres. Mais, le monstre arrivait à la vitesse du vent et j'ai senti son haleine brûlante sur mon visage au moment où j'ai bondi par-dessus les barres de fer. "
Opee-Kwan parvint à remettre sa mâchoire en place. "

Bouche-bée à s’en décrocher la machoire…


DOUBLE MEURTRE A L'ABBAYE

Collection animée par François Faucher, Hélène Wadowski, Joseph Jacquet et Martine Lang

1998, Castor Poche Flammarion, pp.1-64

C'est à ce moment-là qu'Agnès de Montal qui venait d'acheter des gants dans une des boutiques de la foire, en compagnie de Spérie, l'aperçut.

- Mais c'est cette fille espagnole que connaît Guy ?

Et avant que la servante ait pu la retenir, elle écartait de son petit poing les femmes vociférant, en criant :

- Etes-vous folles ? Voulez-vous encourir la colère du vicomte de Pleaux ?

Les femmes la regardaient avec stupeur.

Les écartant toujours, Agnès continuait de leur crier :

- Oui, messire Raymond. Cette femme est sa protégée. Je le sais mieux que quiconque, moi qui, pour Pâques, serai son épouse et votre suzeraine !

Il y avait tant d'autorité dans sa voix, de colère dans ses yeux que les moins hardies des femmes commencèrent à reculer. Quelques hommes qui regardaient en tirèrent d'autres en arrière, leur murmurant de prendre garde. La violence de messire Raymond était connue et redoutée.

 (…)

Agnès saisit Flor par la main et la tira hors du dernier cercle d'irréductibles.

- Venez ! Hâtons-nous ! murmura-t-elle.

Spérie qui était restée plantée, bouche bée, les suivit. Elle ne retrouva ses esprits - et son habituel franc-parler - qu'une fois toutes trois rentrées au logis.

- Vierge Mère, j'ai cru tout de bon tomber ! Mais qu'est-ce qui vous a pris d'aller vous mêler de ce qui ne vous regardait pas ? Risquer de vous faire écharper par ces furies ! Et qu'est-ce que j'aurais dit, moi, au seigneur de Pleaux, pour expliquer votre conduite ? Qu'est-ce que vous allez lui dire, d'ailleurs, pour expliquer votre geste insensé ? Car soyez sûre qu'il lui sera fait rapport - Taillefer a toujours l'oeil où il ne faut pas et que vous allez le voir paraître dare-dare.... Ah, le joli moment que ce sera !

Très grande incompréhension, désapprobation, stupéfaction, impuissance.

Philippe Dumas et Boris Moissard

Contes à l'envers

Le Petit Chaperon Bleu Marine

Neuf en poche, l'école des loisirs

Le loup, par contre, pour terminer par lui, remporte comme je le disais un vif succès auprès de ses congénères des steppes de Sibérie, et s'en trouve fort bien. Il mène grand train de vie, laissant à d'autres le soin de chasser les moutons (il a totalement perdu la main) et s'adonnant pour sa part à des activités plus calmes telles que celle de chroniqueur mondain, où ses talents de conteur font merveille. Il se pavane dans les salons et les lieux à la mode, se répandant en anecdotes croustillantes sur sa vie à Paris, et il en rajoute un peu au besoin, se donnant toujours le beau rôle. On l'écoute bouche bée, on le regarde avec admiration ; les belles louves se battent pour être vues à son côté.

admiration

Paterson

Les tueurs géants

Jess écoutait bouche bée Bill expliquer ce qui se passait dans le monde. Si maman l'avait entendu, elle aurait juré qu'il était un véritable chroniqueur et non "un espèce de hippie".

Admiration et intérêt passionné.

Marcel Proust

Du côté de chez Swann

Un amour de Swann

" Ça sent bon, ça vous prend à la tête, ça vous coupe la respiration, ça vous fait des chatouilles, et pas mèche de savoir avec quoi c'est fait, c'en est sorcier, c'est de la rouerie, c'est du miracle (éclatant tout à fait de rire) : c'en est malhonnête!" Et s'arrêtant, redressant gravement la tête, prenant une note de basse profonde qu'il tâcha de rendre harmonieuse, il ajouta : " Et c'est si loyal ! " Sauf au moment où il avait dit : "plus fort que La Ronde", blasphème qui avait provoqué une protestation de Mme Verdurin qui tenait La Ronde pour le plus grand chef-d'oeuvre de l'univers avec la Neuvième et la Samothrace, et à : "fait avec du caca", qui avait fait jeter à Forcheville un coup d'oeil circulaire sur la table pour voir si le mot passait et avait ensuite amené sur sa bouche un sourire prude et conciliant, tous les convives, excepté Swann, avaient attaché sur le peintre des regards fascinés par l'admiration.

"Ce qu'il m'amuse quand il s'emballe comme ça", s'écria, quand il eut terminé, Mme Verdurin, ravie que la table fût justement si intéressante le jour où M. de Forcheville venait pour la première fois. " Et toi, qu'est-ce que tu as à rester comme cela, bouche bée comme une grande bête ? dit-elle à son mari. Tu sais pourtant qu'il parle bien ; on dirait que c'est la première fois qu'il vous entend. Si vous l'aviez vu pendant que vous parliez, il vous buvait. Et demain il nous récitera tout ce que vous avez dit sans manger un mot.

- Mais non, c'est pas de la blague, dit le peintre, enchanté de son succès, vous avez l'air de croire que je fais le boniment, que c'est du chiqué ; je vous y mènerai voir, vous direz si j'ai exagéré, je vous fiche mon billet que vous revenez plus emballée que moi !

- Mais nous ne croyons pas que vous exagérez, nous voulons seulement que vous mangiez, et que mon mari mange aussi; redonnez de la sole normande à Monsieur, vous voyez bien que la sienne est froide. "

Bouche bée comme une grande bête

pendant que vous parliez, il vous buvait. Et demain il nous récitera tout ce que vous avez dit sans manger un mot.

YANN QUEFFELEC,

LES NOCES BARBARES

Editions Gallimard, 1985

"Le docteur? ... et puis quoi encore! ... Et qu'est-ce t'es allée faire là-haut? Y peut avoir tous les boutons qu'y veut, c'est pas ça qui me rendra une fille honnête à qui j'ai tout donné, tout sacrifié! Pour recevoir quoi, en échange? Un bâtard, oui, et la honte! Va plutôt aider ton père au fournil".

(…)

 Elle remporta le dîner de Ludo qui se coucha l'estomac vide, la pomme contre son nez. Vers minuit, déjà lourd de sommeil, il y planta ses dents avec une allégresse étrange et la dévora.

Il ne se souvenait pas d'avoir habité d'abord l'étage au-dessous, d'avoir eu mal entre sa mère et sa grand-mère qui lui faisait avaler des biberons trop chauds ou trop froids – s'il en crevait ce serait parfait. Ni d'avoir été battu, trimballé, bâillonné dans on berceau – "comme ça on a la paix" Ni d'avoir entendu cauchemarder Nicole au souvenir du viol, voulant mettre au feu, cette plaie! Ni cette nuit-là d'avoir frôlé la mort au fournil: il avait fallu que Monsieur Blanchard ceinturât sa fille et lui arrachât l'enfant, pour l'empêcher d'ouvrir le four où lui-même avait incinéré toutes ses poupées, tous ses baigneurs en apprenant sa grossesse – "ah catin! tu vas pouvoir y jouer, maintenant! et pour de bon, à la maman! "

Après quoi Nanette avait gardé Ludo chez elle avec le secret espoir qu'on le lui laisserait "C'est pas nous qui le réclamerons, avait dit Madame Blanchard. Mais faut pas le montrer, faut jamais l'amener par ici..." Son transfert avait eu lieu de nuit.

C'était alors un enfant craintif et quasi muet, ne répondant pas aux questions, se murant si l'on insistait. Il avait alors trois ans. Il pouvait rester dans son coin des jours entiers, bouche bée, mais aussi bien cherchait à grimper sur les étagères ou le long des rideaux. L'approchait-on, il levait son coude en bouclier devant les yeux comme s'il parait des coups. Nanette passa des mois à l'humaniser, à le consoler, le fit coucher dans son lit quand il avait peur. Elle remonta même de la cave les jouets de Brieuc qu'elle n'avait pu se résoudre à donner. Ludo finit par savoir marcher droit, sourire et mieux parler.

Un an plus tard, et pour la première fois depuis le départ de son fils, Nicole vint dîner chez Nanette à l'improviste. "Mon père m'a conduite. Il avait à faire dans les fermes". Ludo commença par bouder, puis s'approcha de la belle visiteuse qui le toisa d'un regard étrange et l'ignora le restant de la soirée. Il eut beau multiplier les signes à son intention, brandir ses dessins, faire à ses pieds ronfler sa toupie, elle s'en fut comme s'il n'existait pas.

 (…)

Ce fut le premier différend notoire entre les nouveaux époux. Nicole bouda. Micho [l’époux de la mère violée] fit venir de Bordeaux un sapin si long qu'il butait au plafond. Il le déploya dans un coin de la salle à manger et passa deux jours à l'orner de frimas artificiels et de lampions, racines emmaillotées d'un papier d'argent. Ludo contemplait bouche bée cet arbre pavoisé que Micho disait de mèche avec un Père Noël qui descendait la cheminée une fois l'an pour le couvrir de cadeaux.

Des jours entiers, bouche vée ; l’enfant est quasiment autiste à force de rejet et de persécutions

YANN QUEFFELEC, LES NOCES BARBARES

Editions Gallimard, 1985

(…)

TROISIEME PARTIE

Chapitre 14

Dans un fauteuil un vieillard aux mains jointes rêvassait bouche bée.

esprit vacant de la rêverie, demi sommeil

Raymond Radiguet

Le bal du comte d'Orgel

François, lui, eût certes souhaité moins de fêtes, et plus d'intimité. Mais il mettait une émulation d'enfant sage à jouir de ce qu'on lui offrait. Il allait jusqu'à s'appliquer à être un convive agréable. Lui qui eût voulu pouvoir rester sans mot dire, bouche bée devant Mahaut, il se torturait l'esprit pour parler à ses voisines.

Admiration amoureuse

Jules Renard 
 
Journal de Jules Renard 1894-1904
 
 

19 mars.

Le Plaisir de rompre. (…)

A côté d'elle Marinette à un vieux monsieur et une jeune femme qui écoute bouche bée : elle recevra peut-être des claques du vieux monsieur, qui est horripilé. Des mots le suffoquent. Il déchire le programme, le jette, le ramasse pour voir le titre de la pièce. Le nom de Jules Renard l'achève : qu'est-ce que c'est que tout ça ?

Ecoute très intéressée et admirative

Nicolas REVOL

Sale Prof!

Document

Éditions Fixot, Paris, 1999 ISBN 2-221-09028-4

Ils veulent voir "les boîtes en pierre avec dedans les morts en bandelettes". Ils sont très excités. Il y a là les élèves que je reprends régulièrement, qui ont quelques problèmes de comportement. Nous arrivons enfin dans l'une des salles où se trouvent les "sarco" tant attendus. Je me paie gentiment leur tête en leur expliquant qu'il s'agit de baignoires dans lesquelles les Egyptiens se lavaient.

- Des esclaves étaient chargés de les remplir d'eau après les avoir préalablement fait chauffer au feu de bois. Les jours de fête, ils y ajoutaient des essences parfumées, des musiciennes jouaient du tambourin tandis que des esclaves les massaient d'onguents rares.

Ils trouvent ma version excellente. Karim commence à faire l'idiot en imitant une femme qui prendrait un bain. Le gardien de la salle est furieux. Il se jette sur lui et lui demande en hurlant de se tenir tranquille. Autrement...

- Autrement quoi? interroge Karim. Et puis je vois pas ce que je pourrais abîmer. Elle est en pierre vot' baignoire. Elle est solide, elle craint rien. J'peux même pas la rayer.

Sa réponse est si spontanée que le gardien en reste bouche bée. Je m'excuse quand même.

- Mille pardons, monsieur. C'est entièrement ma faute.

En reste bouche bée : Surpris il lui est impossible de répondre à ce qu’il entend

Lynne Reid Banks

L'Indien du placard

Traduit de l'anglais par Laurence Challamel

l'école des loisirs, Paris, pp.30-31

(…)

Il entendit quelque chose en provenance du placard. Un grattement, une rumeur sourde. Il n'y avait pas de doute, c'était un son vivant. Omri alluma la lampe de chevet, et, les yeux écarquillés, se regarda dans le miroir de l'armoire. Il regarda la clé avec son anneau tordu. Les bruits étaient parfaitement perceptibles.

D'une main tremblante, il tourna la clé : l'Indien était là, sur la planche, exactement à la même hauteur que le visage d'Omri. Il avait repris vie.

Ils se regardèrent fixement. Puis Omri demanda d'une voix chevrotante :

- Que t'est-il arrivé ?

- Arrivé moi ? Bon sommeil. Sol froid. Besoin couverture. Nourriture. Feu.

Omri resta bouche bée. Était-ce le petit homme qui lui donnait des ordres ? Il n'y avait aucun doute là-dessus. En effet, il brandissait nettement son couteau.

(…)

Que mangeaient les Indiens ?

stupéfaction

Hans Peter Richter

Mon ami Frédéric

chapitre 8

la balle – 1933

Dès que le passant se fut éloigné, je renvoyai la balle à Frédéric. mon geste le surprit et il manqua la balle. il y eut un bruit clair, un bruit de verre cassé, et la balle me revint, roulant innocemment sur la chaussée.

Bouche bée, Frédéric contemplait les débris de la vitrine, je me penchai pour ramasser la balle sans bien réaliser encore ce qui s'était passé. mais une femme avait surgi devant nous, elle s'en prit à Frédéric et se mit à vociférer en le secouant par le bras. A ses cris, les portes et les fenêtres s'ouvrirent tout autour de nous et très vite les curieux se rassemblèrent.

- Petits brigands! vauriens!

 (…)

- C'est moi, monsieur Schneider, qui ai lancé ma balle, mais je ne l'ai pas fait exprès. Et je lui montrai ma petite balle de caoutchouc mousse. Frédéric m'approuva de la tête.

Mr Schneider parut réfléchir un instant, puis dit à la femme:

- Si vous pouvez répéter sous la foi du serment ce que vous venez de raconter, assignez-moi en justice. Vous savez qui je suis et vous connaissez mon adresse.

La commerçante resta bouche bée.

1.        déconvenue liée à la culpabilité

2.        prise en défaut sans moyen de répondre

Christiane Rochefort

Les petits enfants du siècle

Chapitre VI

J’avais une des jumelles dans les bras, le père avait l'autre. Les gardiens, et les bonnes gens qui passaient prendre leur courrier, les trouvaient vraiment mignonnes, et tellement pareilles.

"Et laquelle est Caroline et laquelle Isabelle?" demanda la femme du gardien.

Papa et moi on se regarda. On ne savait plus. On avait oublié, et comment savoir maintenant. On avait l'air fin, tout le monde se fendait la pipe. Le gardien nous offrit le Martini pour fêter ça; ils aimaient bien voir la Cité s'agrandir, tout ça c'était un peu à eux, leur petit troupeau.

Devant les boites à lettres il y avait un jeune homme blond, que je n'avais jamais vu; il était tourné vers moi, et me regardait, bouche bée, d'un air complètement ahuri. C'était Philippe. Mais je ne le savais pas.

ahuri

Edmond Rostand
Cyrano de Bergerac
 
Edition Fasquelle 1930
 
Premier Acte, Scêne II

LIGNIERE
Vous allez ?

CHRISTIAN
Chez monsieur de Valvert !

LIGNIERE
Prenez garde
C'est lui qui vous tuera !
Lui désignant du coin de l'oeil Roxane.
Restez. On vous regarde.

CHRISTIAN
C'est vrai
!

Il reste en contemplation. Le groupe de tire-laine, à partir de ce moment, le voyant la tête en l'air et bouche bée, se rapproche de lui.

Admiration amoureuse

André Soubiran

L'ILE AUX FOUS

Sur ce plan, je mettais aussi mon espoir dans le surveillant général. Au Quartier, il me paraissait le seul individu qui fût à sa place sans qu'il en résultât un malaise. Le fait est que je ne le vis jamais enchérir sur le règlement ou sur quelque disposition particulièrement vexatoire. Il était le seul à appliquer strictement la discipline sans y ajouter sa jouissance personnelle. Dès qu'il entrait dans la grande salle et commençait à parler de sa grosse voix bonhomme et lente, le vacarme, aussitôt, mollissait, s'affaissait après quelques soubresauts. Tous étaient bouche bée: Tandis qu'avec les gardiens, chaque instant renforçait mon impression d'être dangereusement livré à l'arbitraire; avec lui, je reprenais pied sans un sentiment de risque. J'étais sûr que Mr Farment soutiendrait de son mieux ma candidature à la liberté.

Attention fascinée collective

André Soubiran

L'ILE AUX FOUS

Romano venait de se ranger du côté de ceux qui estiment qu'ils sont les seuls à travailler pendant que les autres se tournent les pouces, sauf quand ils sont occupés à se remplir les poches. Dans le combat qu'il menait depuis quatorze ans contre les psychiatres, son sens profond de la démagogie lui refaisait soudain des alliés.

Sûr de sa victoire, il ne mâchait plus ses termes

" C'est fini! Les innocents n'auront plus à souffrir des exactions des psychiatres. Des Le Guenn, des Lacombe, pour ne citer que les derniers scandales du Quartier, ne pourront plus acheter à prix d'or, une place à laquelle leur état mental ne leur donnait aucun droit... "

Baissant la tête vers mon livre, je fis semblant, dans mon coin, de n'avoir pas entendu. Mais quel immense soulagement! Enfin, Romano avait abattu toutes ses cartes. Piètre jeu! J'avais redouté bien pis, car, ces ragots qui laissaient bouche bée les gardiens, tout en faisant râler de joie Pilon et en enthousiasmant les débiles, aucune importance! Ils ne dépasseraient pas l'enceinte du III. Que pouvait en espérer Romano contre moi? Tout cela, il l'avait -déjà clamé en vain à tous les échos. Et que pouvait-il en espérer pour lui-même? S'il avait pu réussir, à cause de leur stupidité, à regagner la sympathie des infirmiers, jamais il n'obtiendrait d'eux une aide efficace; je les savais trop froussards pour risquer, en sa faveur, le moindre geste.

Etonnement admiratif collectif

marc sullivan

Mélodie pour Nora

La mégère, en face de qui elle avait le malheur d'être assise [dans le train], était offusquée. Se tournant vers la tante de Nora, elle se mit à crier:

- Est-ce que cette morveuse est votre fille, madame?

Molly rougit et, au début, sembla trop intimidée pour parler. Elle balbutia un peu bêtement, mais quand sa voix revint, elle était ferme et maîtrisée.

- Nora, dit-elle, est ma nièce, et elle a assez de soucis comme ça sans devoir supporter des gens comme vous.

La femme resta bouche bée puis se tourna dédaigneusement vers la fenêtre en marmonnant toute seule. Nora fut prise d'une folle envie de la frapper. Molly la rejoignit rapidement.

Affrontée à une refus sec et inattendu

(…)

Nora tenait l'enveloppe à la main. Elle ne voulait pas parler de la nouvelle qu'on venait de lui annoncer, mais elle voulait savoir ce que son père en disait. En fait, elle voulait tout simplement avoir la confirmation qu'il souffrait beaucoup plus du départ de ses frères qu'il n'avait jamais souffert du sien.

- Je peux l'ouvrir pour toi? demanda-t-elle.

Elle resta bouche bée quand Molly lui arracha l'enveloppe des mains.

- Non! dit Molly... Il vaut... Il vaut probablement mieux que tu ne voies pas ce qu'elle contient.

- C'est simplement de l'argent, non?

- Oui, mais... il y a une lettre aussi et, je ne sais pas, mais elle risque d'être triste. Tu ne tiens pas absolument à la voir ?

- Pas vraiment, dit Nora en pensant amèrement qu'elle n'avait pas besoin que Molly la protège de la froideur de son père.

Grande surprise

Tourgueniev

Le médecin de campagne.

On me dresse un lit dans le salon. Je me couche... impossible de m'endormir. Bizarre ! Ce n'était pourtant pas faute de fatigue ! Ma jeune malade ne me sortait pas de l'esprit. Enfin, tout à coup, n'y tenant plus, je me lève. " Allons voir ce qu'elle devient ", me dis-je. La porte de sa chambre donnait dans le salon; je l’ouvris tout doucement; mon coeur battait... Je jetai un regard dans la pièce : la servante dormait, bouche bée; elle ronflait même, la coquine ! La malade, le visage tourné de mon côté, remuait les mains, la pauvre ! Je m'approchai...

(ronfle) Pendant le sommeil

Mark Twain

Les Aventures de Tom Sawyer

Chapitre 16

Le canif perdu

-Amy Lawrence?

Signe de dénégation.

-Gracie Miller?

Même signe.

-Suzanne Harper, est-ce vous?

Même signe. C'était maintenant au tour de Becky Thatcher. La situation était désespérée. D'énervement Tom tremblait de la tête aux pieds.

-Rébecca Thatcher...

Tom la regarda; elle était blême de terreur.

-Avez-vous... Regardez-moi bien en face.

Les mains de Becky se joignirent en un geste de supplication.

-Est-ce vous qui avez déchiré ce livre?

En un éclair Tom vit ce qu'il y avait à faire. Il se leva comme mû par un ressort:

-C'est moi.

Devant un acte dénotant une si incroyable aberration, toute la classe resta bouche bée. Il fallut d'ailleurs à Tom le temps de reprendre ses esprits; et quand il se leva pour subir sa peine, l'étonnement, la reconnaissance, l'espèce d'adoration qu'il put lire dans les yeux de la pauvre Becky étaient tels qu'il se serait offert cent fois pour être fouetté à sa place.

Etonnement et admiration

 Mark Twain

Les Aventures de Tom Sawyer

chapitre 23

Le Tribunal

-J'étais caché, Monsieur le Président.

-Où cela?

-Derrière les ormes qui se trouvent à côté de la tombe.

Joe l'Indien eut un tressaillement presque imperceptible.

-Y avait-il quelqu'un avec vous?

-Oui, Monsieur le Président. J'étais avec...

Attendez. Ne dites pas le nom de votre compagnon, nous le convoquerons en temps utile. Portiez-vous quelque chose avec vous?

Tom hésita.

-Parlez, mon petit; n'ayez pas peur. Il faut avoir le respect de la vérité. Que portiez-vous avec vous?

-C'était... c'était un... chat mort.

Il y eut dans la salle une manifestation d'hilarité à laquelle le président mit fin.

-Nous montrerons le squelette de ce chat. Maintenant, mon petit, racontez ce qui s'est passé. Racontez-le à votre manière, sans rien omettre, et n'ayez pas peur.

Tom commença, en bredouillant d'abord un peu; au fur et à mesure qu'il s'échauffait les mots lui vinrent de plus en plus facilement. Au bout d'un instant on n'entendait plus dans la salle que le son de sa voix. Tous les regards étaient fixés sur lui; chacun retenait son haleine et, sans tenir compte de l'heure, écoutait, bouche bée, la sinistre et passionnante histoire.

Ecoute collective passionnée, respiration arrêtée

Uhlman Fred

L'ami retrouvé.

XV

 Ils se dressaient là, unis, supérieurs, escomptant que les assistants les contempleraient bouche bée, hommage que leur conféraient neuf siècles d'histoire. Ils se décidèrent enfin à gagner leur place.

admiration

JOSÉ MAURO DE VASCONCELOS

MON BEL ORANGER

- Allons, porte-moi, tu vas voir si je ne sais pas lire.

- Attention, Zézé, si c'est une farce, tu vas voir.

Elle me prit dans ses bras et me souleva plus haut que la porte.

- Alors, lis. Que je voie ça !

Et je lus. Je lus la prière qui demandait aux cieux de bénir et de protéger la maison et d'éloigner les esprits mauvais. Jandira me déposa par terre. Elle était bouche bée. 

Surprise incrédule pour quelque chose de très admirable

John Milton,
Paradise Lost (fifth book, 1677)

Meanwhile our primitive great Sire, to meet
His godlike guest, walks forth, without more train
Accompanied than with his own complete
Perfections; in himself was all his state,
More solemn than the tedious pomp that waits
On princes, when their rich retin'ue long
Of horses led and grooms besmeared with gold
Dazzles the crowd and sets them all agape.

admiration

Samuel Taylor Coleridge,
Rime Of The Ancient Mariner (1798)

With throats unslaked, with black lips baked
We could nor laugh nor wail;
Through utter drought all dumb we stood!
I bit my arm, I sucked the blood,
And cried, A sail! a sail!

With throats unslaked, with black lips baked,
Agape they heard me call:
Gramercy! they for joy did grin,
And all at once their breath drew in,
As they were drinking all.

Surprise quasi miraculeuse

 

Google
  Web auriol.free.fr   


Psychosonique Yogathérapie Psychanalyse & Psychothérapie Dynamique des groupes Eléments Personnels

© Copyright Bernard AURIOL (email : )

3 Novembre 2005