« Le trouble dans le féminin de l’homme ».

Dr Françoise Joffrin

 

Je me propose de répondre au texte de L. Danon-Boileau : « Le trouble dans le féminin de l’homme », référé à la problématique du double ainsi qu’à l’articulation du masculin et du féminin. J’ai par ailleurs écrit sur le rôle joué par Tirésias dans le cycle de Thèbes dans une démarche transculturelle qui est celle de ce site, notamment par l’éclairage du tantrisme, en conjoignant les récits mythiques des poètes (Homère, Pausanias) et des tragiques grecs.


 

Je reviendrai sur deux points de l’article : d’abord celui-ci prône le respect d’une ombre, d’un certain trouble dans le féminin qui prévient l’homme de se trouver, dit-il, constamment en lieu et place de voyant aveuglé. L’ombre est corrélative de la problématique du double évoquée par ce texte que nous pouvons étendre, à partir de la polarité sexuée, à toutes les structures doubles du sujet comme les deux axes du langage, nos deux énergies à la manière du Yin et du Yang des chinois, etc. ; à ce propos certaines séquences du mythe de Tirésias nous seront des plus utiles. Sera abordé ensuite le rôle joué par Tirésias concernant la dialectique du savoir et de la vérité dans le cycle thébain.

 

Je fais mienne par ailleurs la position épistémologique de l’auteur concernant les phénomènes psychiques qu’il situe de l’éprouvé corporel, via le cœur et les processus eidétiques de symbolisation. C’est sur ce mode, en effet, que Platon, les philosophes grecs et la tradition en général, nous invitent à élaborer ces processus « du sensible à l’intelligible ». Des précisions sur une telle organisation topique et dynamique dans le cadre du tantrisme sont développées sur ce site. Tantra signifie trame et partant évoque ce que peut tisser ou nouer un sujet au niveau de son être, le corps étant un lieu d’inscription, un tissu de signifiants. Nous retiendrons certains des centres étagés, organisateurs de la psyché, appelés roues ou chakras, au niveau desquels peuvent se décliner les diverses dimensions du féminin et même du masculin… Très succinctement un chakra (que nous chiffrons : le II, le III etc.) est constitué d’un élément perceptif (correspondant à une des zones érogènes de Freud) et d’une sphère d’effectuation, d’intentionnalité, via l’aire de représentation correspondante. Bernard Auriol, à chacune de ces zones, à chacun de ces étages, fait correspondre une pulsion partielle décrite par Freud ou Lacan.

 

Le centre de la gorge appelé Vishudda, le purifié, (le VI) où sont prononcées toutes les voyelles, à la jonction de la parole et du souffle, est le lieu d’arrivée de nos deux courants d’énergie, réels ou métaphoriques, que nous tenterons de préciser. Tout est effectivement trajet, circularité dans le tantrisme et les différents lieux de la psyché peuvent rendre compte de ce que l’auteur nomme bisexualité de fondation, c’est à dire d’indifférenciation (le II) et la bisexualité processuelle, effet d’un travail, se situant « à la fin d’un trajet ».

 

La voie est donc tracée ! Nous nous interrogerons sur l’articulation du masculin et du féminin et partant, sur la bisexualité ou plutôt la bipolarité psychique, dans sa dissymétrie, élément bien connu de la tradition et de certaines cultures, en reliant les divers champs de référence au moyen de la linguistique.

 

L’ombre est la métaphore de la méconnaissance et du savoir inconscient du sujet, métaphore clamée par Œdipe qui, dans « Œdipe à Colone » à la suite de rétractions et de dénis, avoue au chœur (au vers 547) qu’il a tué… « Mais ce meurtre a de quoi se justifier. Voici : j’étais inconscient » - du grec « a-nous » : « nous » désignant l’esprit (noétique, noumène), le conscient, négativé par le « a » privatif ; le vocable « inconscient » apparaît il y a 2400 ans sous la forme de l’adjectif et non du substantif que nous connaissons. Nombres de termes désignent cette lacune dans le tissu signifiant, l’Autre, le blanc, le manque, attachés aussi, surtout chez Freud, à la féminité et au sexe féminin.

 

L’ombre est ce que le sujet a dû mal à reconnaître et à tolérer en lui, ce sont des traits qu’il dévalorise, son côté négatif et qui pourtant s’impose toujours à lui directement ou indirectement dans ses rêves ou par ses symptômes, ou ceux de ses proches. Elle affleure dans les dires du sujet sur le mode de la dénégation, ou simplement avec une notation négative : « Ces handicapés il faudrait tous les tuer » déclare ce père omnipotent qui ne reconnaît pas sa part d’ombre, l’altérité en soi, et ne peut apporter empathie ou tendresse à son fils. La bipolarité de l’ombre, connue dans la tradition par les termes d’animus et d’anima, principes masculin et féminin, est formalisée par Lacan selon les « schémas quantiques de la sexuation » concernant le côté homme et le côté femme, référés à l’UN et l’AUTRE, l’identité sexuée étant le produit d’une identification aux deux lignées paternelles et maternelles, la sexuation exprimant comment un sujet est amené à se déterminer par rapport à la loi phallique et à la castration du fait qu’il parle, la femme n’étant pas toute soumise à la castration. Lacan, subjectivant l’énergie psychique, distingue différents types de jouissances envisagées sous l’angle d’une aspiration, d’un désir, d’une tension de l’énergie psychique, voire d’un excès (plus-de-jouir) à laquelle peuvent être soumises les différentes pulsions partielles. Le signifiant du phallus introduit une division de la jouissance : d’un côté il limite la jouissance, de l’autre il l’autorise par l’effet du refoulement : c’est la jouissance proprement sexuelle déterminée par le langage puisque tributaire du signifiant du phallus, (associée à Vishoudda, le VI). A l’opposé est décrite de tout temps une jouissance hors langage, dans un au-delà de la référence phallique, jouissance autre, éprouvée par les mystique et certaines femmes, jouissance supplémentaire de ceux qui ont commerce avec le divin comme Tirésias. Sur le versant chtonien c’est celle du sujet livré à l’Autre, comme objet de sa jouissance, à connotation incestueuse, appelée jouissance de l’être, non saisie dans sa signification sexuelle. La pièce « Œdipe le Tyran » est l’illustration chez le héros, de cette jouissance de l’être, qui est agi à l’orée de sa vie en étant confié au berger, ou bien agi lui-même dans la confusion, la collusion des générations, alors que l’identité d’un individu est étayée sur la différence des générations et la différence des sexes.

 

Nous devons nous pencher sur l’intervention de Tirésias lors de son apparition au 1er épisode, où est située d’emblée la dialectique du savoir et de la vérité : celui-ci est mis par Œdipe immédiatement en position de sujet supposé savoir « Toi qui scrute tout, Ô Tirésias », et ce dernier se refuse à soutenir une telle place, permettant à Œdipe de découvrir progressivement et par lui-même sa vérité et donc à devenir de proche en proche le clairvoyant. Tirésias occupe donc la position de celui qui sait, mais qui ne peut dire d’emblée la vérité, celle-ci sera révélée à Œdipe aux termes d’une joute verbale, d’une lutte au cours de laquelle Tirésias répond avec maîtrise, en contrepoint, ménageant des écarts chaque fois mesurés aux menaces et à l’agressivité d’Œdipe. C’est lui qui effectue la révélation sur son identité : « J’affirme que c’est toi le meurtrier que tu cherches » , « J’affirme que tu as, sans le savoir avec des êtres qui te sont très proches, les relations les plus honteuses, et que tu ne vois pas quel degré d’infamie tu as atteint » révélations qu’Œdipe assumera de proche en proche au fur et à mesure de l’entrée en scène des divers intervenants, chacun se rétractant au départ : Jocaste èle messager corinthien, qui l’a recueilli sur le Cithéron, et qui annoncera la mort de Polybe « Que je meure si je ne dis pas la vérité ! »…è Le serviteur élevé au palais, qui a confié Œdipe au précédant, et dont la révélation permettra à Œdipe de substituer Laios à Polybe au 4éme épisode.

 

C’est Tirésias qui révèle à Kréon dans « Antigone » sa perversité par la confusion des lois relatives à la vie et à la mort : en effet Kréon maintient un cadavre non recouvert au-dessus du sol, bravant la loi implicite, non écrite qui prescrit d’enterrer ses morts ; et il menace une jeune fille de la murer vivante « je l’emmènerai toute vive au fond d’un sous-terrain creusé dans le rocher » (V. 773).

 

 Concernant la scène des deux serpents ou deux phallus enlacés que vit Tirésias, une des séquences du mythe nous indique qu’Athéna, après l’avoir rendu aveugle, lui aurait donné un bâton pour se conduire. Tirésias, selon certains écrits, est à l’origine du mythe du caducée d’Hermès, mythe indo-européen, retrouvé sur des tablettes de pierre en Inde. Ce caducée est une baguette dénommée axe du monde autour de laquelle s’enroulent en sens inverse ascendant et descendant deux serpents en forme de huit symbolisant nos deux courants opposés et complémentaires, nos deux polarités, métaphoriquement chtonienne, (tournée vers les profondeurs de la terre) et ouranienne, (orientée vers le ciel), de l’indifférencié à l’organisé. La même approche se retrouve par le double enroulement autour du bâton brahmanique des deux courants d’énergie, vecteurs du souffle et des paroles que sont les deux Nadis du tantrisme (du sanskrit : Nad : voie, chemin). L’axe du monde devient l’axe vertébral, et les deux serpents sont les deux conduits (nadis) Ida et Pingala circulant dans notre corporéité de part et d’autre du canal central Shushumna. La finalité du Yoga étant d’orienter les énergies des divers canaux dans cet axe central où circule, d’étage en étage, la kundalini, qui a été comparée à la libido en occident. La kundalini est d’essence féminine, le féminin étant actif en Inde.

 

·        Ida Nadi commence au testicule droit et aboutit à la narine gauche ; sa polarité est métaphoriquement féminine, lunaire.

 

·        Pingala Nadi commence au testicule gauche et va à la narine droite ; sa polarité est métaphoriquement masculine, solaire.

 

Ida rafraîchit et Pingala réchauffe, le yin et le yang des chinois.

 

Leurs voies d’arrivée sont les narines, lieu de filtration de l’air, dont la vibration et la pulsation assurent la parole, laquelle se déroule, comme la musique, dans le temps. Topiquement, elle est le produit du centre vishudda, fort complexe dans le tantrisme, celui de la gestion du monde sonore, et de la phonosensibilité dans son côté expressif et signifiant, selon les lois du langage formulées de Saussure à Martinet, que ce soit au niveau écrit ou oral : le discontinu et le continu de la chaîne signifiante, impliquant :

 

- l’opposition, c’est à dire les écarts différentiels des traits acoustiques qui sous-tendent les phonèmes constitutifs des mots, éléments discontinus de la chaîne parlée, de façon à contraster le réel, de distinguer, d’identifier un objet : ceci est autre que cela.

 

- la commutation, la réversibilité dans le syntagme : la combinatoire, permettant les substitutions au niveau du sens, méthode usitée en hébreu lors d’exercices vocaux en permutant voyelles et consonnes ainsi que pour la lecture d’un texte, avec le chiffrage. Exemple : Rime à Emir, c’est à dire le retournement, la commutation dans le continuum de la chaîne parlée, dans la succession, au moyen d’unités de plus en plus vastes, que cela se situe au plan logique ou mythique.

 

Claude Lévi-Strauss, situe le mythe, qui est langage, dans l’espace ciel-terre avec les relations binaires se situant à tous les niveaux que nous avons étudiés. Il ne s’agit donc pas de relations statiques, mais de « péripéties », de retournements en leurs contraires d’unités dynamiques selon l’axe vertical de l’espace du mythe, analogue à l’espace psychique « du pied à la tête », associant la corporéité au langage. Analysant le mythe d’Œdipe en recueillant toutes ses unités, les mythèmes, à travers la multiplicité des aires géographiques dans lesquelles il apparaît, et surtout au niveau des interprétations des différents auteurs au cours des âges, Lévi-Strauss incorpore la version de Freud. Revenons au mythe de Tirésias qui vit deux serpents en train de s’accoupler. A ce point, les auteurs ne s’accordent plus : ou bien Tirésias sépara les serpents, ou bien il les blessa, ou bien il tua le serpent femelle, ou les deux selon la version et l’interprétation de M. Danon Boileau : le mythe, comme le rêve, permet la libre association. Quoi qu’il en soit, le résultat de son intervention fut qu’il devint lui-même une femme…

 

J’ai cité Vishudda, au niveau de la gorge, le lieu de la parole et de la durée : le fait que Tirésias ait été successivement homme et femme, se mue au niveau de la structure, au niveau de l’organisation topique, en nos deux polarités côté homme /côté femme (réceptivité, intuition, le féminin psychique de l‘auteur). Sur le mandala figure le Dieu Shiva, l’effaceur, dieu de la destruction-reconstruction, représenté sous sa forme androgyne. La moitié gauche de son corps est dorée et l’autre est de la couleur blanche, celle de l’énergie féminine, la Shakti. L’union métaphysique de Shiva (la substance, la conscience) et de Shakti (l’énergie) est le fondement de toute création. Ce centre qui gère le monde sonore peut nous aider à interpréter l’attitude de Tirésias envers les serpents car au niveau structural nous retenons les signifiants : séparer, tuer 2 serpents ou 2 phallus, un axe central. D’abord parce que sexe signifie séparation, division au niveau du genre. D’autre part pour prononcer un mot il convient d’abstraire, de négativer le réel, bref de s’en distancier pour élaborer le symbolique : le mot est le meurtre de la chose, permettant à l’élément sonore d’effectuer ses processus intra-psychiques.

 

 Le signifiant désigne le sujet, c’est la fonction thétique du langage, posant le sujet dans son identité et ses choix selon l’axe paradigmatique, l’axe du choix (paradeigma : le modèle), désignant :

 

- d’une part le sujet existant avec le « Je », l’embrayeur, le shifteur de Jakobson qui nomme le sujet de l’énonciation et nous avons vu avec quelle détermination Tirésias s’adresse au tyran : « J’affirme.. »

 

- d’autre part le sujet sexué, c’est le choix du genre, l’identité chez Tirésias alternant sur le fil du temps, lequel est figuré sur les circuits représentés dans l’iconographie sous forme des vecteurs que nous avons décrits (axe du temps).

 

J’ai évoqué plus haut au niveau du syntagme (la phrase), la commutation, la réversibilité, qui opère un renversement de sens lequel autorise un renversement de la position du sujet dans le transfert, de la passivité à l’activité, du IL au JE, du oui au non. Cela implique que le sujet ne soit plus en rapport d’immédiateté avec le monde et ses objets, ce qui a lieu dans l’établissement d’une distance corrélative du renoncement à la toute puissance sur l’objet du désir. Au moyen de la nomination du monde et de lui-même, le sujet accepte ce qu’il est, mais il peut refuser de voir apparaître à sa conscience l’image de lui-même qu’il n’accepte pas sous forme de « l’ombre » qu’il projettera sur l’Autre. « L’ombre » ou le « double », éléments archétypaux, furent étudiés par Rank (1973) et Jung en une abondante littérature : l’être qui vient au monde se sépare de son double placentaire qui meurt, et pendant ses premiers moments, c’est l’entourage qui est son double. Ce peut être aussi le double hallucinatoire qui s’adresse au sujet, ou selon les cultures le double en tant qu’âme du sujet, qui l’accompagne durant sa vie et lui survit après la mort.

 

Toute l’équivoque de l’ombre se situe dans son oscillation entre ses deux versants : inconscient, inconnu, voire refusé, et son aspect créateur orienté vers l’idéal du Moi et le Soi jungien. L’ombre est dissipée par la dynamique de la chaîne langagière qui toujours opère coupures et rapprochements des unités linguistiques, sans oublier le médiateur, le 3ème terme de la dualité, la copule, laquelle relie, (co apula = couple, dérivant de cum apere = attacher) à la manière du verbe ETRE qui unit le sujet et l’attribut, ou la conjonction ET qui unit deux mots ou deux phrases au sein d’éléments de nature antagonistes, ce que les anciens nommaient « l’union des opposés », la « coincidencia oppositorum » liant le masculin et le féminin, opérant l’articulation entre nature /culture, vie/mort…

 

Lacan dans la « Signification du phallus » (Ecrits, p 692) attribue à celui-ci le rôle de copule au sens symbolique et littéral, dénotant par la logique linguistique un au-delà du lien charnel. Notons que le tantrisme distingue trois types de phallus (lingam) du réel au symbolique sur l’axe vertical de l’être. Par exemple, dans le chakra-racine, le II, celui de la base du corps, se trouve « dans le triangle féminin ou Yoni fiché le Shivalinga mâle » (Avalon) iconographie vénérée sur les autels des temples attestant à quel point le masculin et le féminin sont l’objet de représentations dans cette culture. Ce centre est impliqué, avec le suivant, le III, dans des conduites protectrices et nourricières ( le féminin-maternel ), les deux suivants étant dotés d’une connotation plus séductrice et érotique, le IV et le V.

 

 Il n’est pas certain que Tirésias n’éprouve un trouble dans son féminin, ni qu’il ne subsiste une certaine ombre en lui, mais les faits se passent à un autre niveau chez celui-ci, dans un centre qui transcende les positions identitaires, Ajna ou le TROISIEME ŒIL, le VII, situé entre les deux sourcils. Au niveau des deux pétales de celui-ci nous rencontrons le troisième phallus, décrit dans les textes « brillant comme la foudre ». Celui-ci symbolise plus spécifiquement les valeurs morales, la loi et les interdits rencontrés par le désir. Loi du surmoi archaïque : pas un mot ! tu n’es rien. Loi surmoïque qui dépossède un sujet de sa parole, (la malédiction), et loi symbolique, l’autorisant à assumer son désir dans le bien-dire, loi par laquelle « il reçoit le commandement d’un devoir de devenir » (A. Didier-Weill, 1995). Modalité illustrant la maîtrise avec laquelle Tirésias répond aux tyrans, le situant dans la tragédie du coté de l’éveilleur plutôt que de « l’arpenteur de la scène primitive ».

 

Il s’agit de l’étage de la vision internalisée, de la conscience, lesquelles sont informées par les plans sous-jacents, (passage de la pulsion scopique à AJNA). C’est le plan de la pulsion épistémophilique celle qui sied à Œdipe selon le jeu de mots : Oides=œdème=pieds enflés, mais aussi Oida=je sais. Il a effectivement répondu à l’énigme de la Sphinge : qu’est-ce que l’homme ? C’est à lui maintenant de découvrir l’énigme qu’il représente pour lui-même : il remonte le temps et retrace son histoire en un dialogue initialisé par Tirésias.

 

 Il s’agit aussi de l’approche du réel par la télépathie qui opère directement, dans le silence, sans la médiation du langage. C’est ainsi que par ses perceptions extrasensorielles, grâce à son intuition du présent, du passé et du futur, Tirésias est en relation avec le monde divin en l’occurrence Apollon, dieu de la divination, de la musique et de la poésie. Que ce soit inné ou du fruit de son travail, le sujet parvient à une approche de la réalité par delà les illusions, les traces anciennes, les passions, les émotions ; il accède à la pure conscience, conscience infinie et informelle.

 

Dans la culture qui est la nôtre, c’est aussi le fait de celui qui, au moyen de sa réceptivité, son anima, est à l’écoute de la parole vraie de l’autre dans l’espace vacillant du symbolique. Il a été lui-même à l’écoute de son ombre et de son trouble, de l’innommable, du vide, de l’abîme, mais aussi du féminin en lui, ce qui concerne la question de l’altérité : la femme engendre le même, du même sexe, et l’autre, de sexe différent (F. Héritier), elle est source de l’altérité. L’amour est le passage à l’autre, qui émane de la place que j’accorde à l’autre en moi. L’autre est un visage porteur d’une voix qui m’interpelle et à laquelle je peux répondre. Je suis donc mis(e) en position de répondant(e) et d’écoutant(e). La voix est le lieu des signifiants, comprenant aussi le signifiant du manque, qui nous indique que « tout » ne peut pas se dire. Un défaut, une aporie trouveront leur élaboration dans un au-delà de la parole. Soulignons l’intérêt de démarches comprenant une médiation corporelle s’adressant directement au trouble d’un sujet et des pratiques méditatives tournées vers l’infini et la vacuité, le silence contenant tous les mots passés et à venir.

 voir par ailleurs le texte relatif au livre d'Hélène Vecchiali : « AINSI SOIENT-ILS »


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