OREILLE GAUCHE, OREILLE DROITE

RECHERCHE SUR LA LATERALITE AUDITIVE

Université Paul Sabatier, Toulouse III

U.E.R. Techniques de Réadaptation

 

Mémoire pour l'obtention

du certificat de capacité d'orthophoniste

 

Martine VALIÈRE‑MONTAUD

Gisèle ROTH,

Jean RIBO

 

 

 

Sous la direction de Pierre F. Montaud, orthophoniste

1978

4) ‑ RAPP0RTS ENTRE D0MINANCE   HEMISPHERIQUE_& D0MINANCE  LATERALE

 

Pour beaucoup d'auteurs la latéralité manuelle semble pouvoir être déterminée chez l'enfant avant tout établissement d'une dominance hémisphérique. Cette latéralité s'établit progressivement avec de nombreuses fluctuations et des phases d'ambilatéralité avant qu’elle parvienne à se fixer définitivement.

 

ACKNIN & MASUREL (5) parlent de monolatéralisation, duolatéralisation bilatéralisation et enfin d'unilatéralisation pour décrire les différentes étapes du développement de la latéralité à tous les niveaux : (manualité, vision, audition, locomotion).

 



 

"En ce qui concerne la dominance oculaire SCHZIDMANU et ROBINETTE ont établi que celle‑ci pouvait être objectivée chez la plupart des enfants déjà à 29 mois. CASTENERT testant la préférence manuelle et la prédominance oculaire dans un groupe de 16 enfants à l’âge de 3 ans, puis à l’âge de 7 ans, montre que 12 d'entre eux, soit 75% suivraient une parfaite constance des dominances oculaires alors que le résultat intéressant la dominance manuelle s'étalerait de l'ambidextrie à la droiterie pour la plupart d’entre eux", (MECAEN & J. de AJURIAGUERRA ‑ 4, p 13).

 

Pour MALVERSON auquel font référence les auteurs du bulletin de l'A.S.E.I. (9n°3). “ il existe une légère prévalence manuelle vers la 40° semaine, prévalence qui devient stable à l’âge de 1 an (1’usage de la main droite étant établi

dans 74% des cas) .

Il semble difficile de faire un diagnostic de latéralité avant 5 ans, sauf dans les cas suffisamment tranchés de droiterie ou de gaucherie".

 


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GRAPIN & PERPEPE écrivent (6 p 92) : "La recherche" de la droiterie ou de la gaucherie ""e peut Are commencée dès la fin du mois et l'expérience …. nous a montré qu’après la fin du 12° mois les causes d'erreurs deviennent trop importantes., l’enquette la plus rentable se situe au 7°, 8° et mois".

 

 Ces auteurs estiment qu'à cet âge l'enfant n'est pas encore influencé par l'action éducative de l’entourage.

 

 Nous pouvons penser cependant, à l'inverse de cette remarque, que beaucoup de mères lorsqu'elles donnent un objet à un enfant le placent le plus souvent dans sa main droite par habitude ou par souci d'éducation précoce et il est possible que l'enfant perçoive mieux et plus tôt qu'on ne le croit l'intention maternelle.

 

D0MINANCE CEREBRALE

 

La comparaison morphologique des deux hémisphères sur le plan pondéral, volumétrique et structural ne montre pas de différences assez significatives.

 

La pathologie cérébrale et en particulier l'aphasie montre qu'il existe une asymétrie topographique et fonctionnelle au niveau des deux hémisphères.

 

Nous savons que chez le droitier les lésions de zones du langage dans l'hémisphère gauche entraînent des troubles aphasiques (et lorsque l’atteinte s'étend au lobe frontal il y a hémiplégie droite).

 

On pourrait penser de façon simpliste que le gaucher est l'inverse du droitier. Mais comme le disent GRAPIN & PERPERE : "Les résultats des diverses études faites à ce jour incitent beaucoup d’auteurs à penser que la sénestrie n’est pas toujours simplement une inversion de la dextrie"(6 p 86).

 

Les études nombreuses concernant 19aphasie chez le gaucher nous donnent des renseignements sur l'état de sa dominance hémisphérique.

 

ALAJOUANINE écrit dans "L'APHASIE & LE LANGAGE PATHOLOGIQUE : les gauchers peuvent présenter une aphasie aussi bien par lésions hémisphérique gauches que droites ‑et à l'opposé ‑ qu'ils peuvent ne pas présenter d'aphasie pour les mêmes lésions situées dans la zone du langage qu'elles soient droites ou gaucher ". ( 30,p163)

 


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Quel est alors le rôle de l’hémisphère gauche chez le gaucher ?

 

" Nous sommes fondés à croire " écrit LHERNITTE (6, p 20) "que l’hémisphère gauche même chez le gaucher joue un rôle prééminent dans les fonctions d’expression et de réception verbale ".

 

HECAEN émet quelques hypothèses concernant l'organisation fonctionnelle cérébrale du gaucher ( 6, p 53) “ Si la spécialisation fonctionnelle hémisphérique parait conservée dans ses grandes lignes chez le gaucher, en particulier la prééminence de l'hémisphère gauche, une plus grande ambilatéralité cérébrale, non seulement pour le langage mais aussi pour les diverses fonctions gnosico‑praxiques semble devoir être admise".

 

LHERMITTE dans la revue " Sando " n° 44 reprend également cette idée et parle d'ambicérébralité , c'est à dire précise ‑ t – il "une puissance de leurs deux hémisphères pratiquement équivalente avec une légère prévalence en faveur de l'hémisphère droit".

 

Qu'en est‑il chez l'enfant ?

 

" L'aphasie chez l’enfant " écrit HECAEN ( 6. P 51) revêt un caractère particulier (prédominance de troubles moteurs avec réduction du vocabulaire) elle se dissipe rapidement et complètement le plus souvent, enfin elle est déterminée dans une proportion importante de cas par des lésions droites".

 

Le caractère transitoire de cette aphasie et les possibilités de suppléance qui se manifestent dans celle-ci montrent que la dominance hémisphérique est beaucoup plus labile chez l’enfant que chez l'adulte parce que son cerveau est en voie de développement fonctionnel.

 

On ne peut donc retenir l'idée d'une innéité des zones du langage, zones qui se présenteraient comme définitivement structurées et prêtes à fonctionner avant toute activité de communication.

 


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Cette hypothèse est fondée sur la non existence d'aphasie à la suite de lésions hémisphériques gauches chez l'enfant de moins de 3 ans (observation de Pierre MARIe).

 

"On a de même considéré que les lésions plus tardives n’entraînaient pas ou n'entraîneraient que très provisoirement un dérèglement du langage chez l'enfant (J. de AJURIAGUERRA P 33 " Manuel de psychiatrie de l'enfant").

 

Pour P. MARIE cité par LHERMITTE : "les prétendus centres du langage ne seraient (n’étaient) pas préformés (que) leurs édifications exigeaient (exigeraient) plusieurs années".

 

J. de AJURIAGUERRA emploie les termes de "Préformes d’organisations ”. Les zones du langage se structureraient mesure que s'exerce la fonction communicative.

 

Les études portant sur l'aphasie permettent de remarquer la similitude qui existe entre l'organisation hémisphérique chez le gaucher et chez l'enfant.

 

Nous retrouvons chez l'un et chez l4autre la même possibilité de suppléance en cas de déficit pathologique d’un hémisphère et de même une moindre focalisation des fonctions cérébrales. Ces similitudes n’impliquant pas une identité totale du fonctionnement cérébral de l'enfant et du gaucher.

 

Ces considérations nous amènent à poser la question suivante : Dans quelle mesure peut‑on parler de dominance hémisphérique ?

 

LHERMITTE, HECAEN et J. de AJURIAGUERRA s'accordent à penser que les deux hémisphères interviennent dans les diverses fonctions cérébrales mais à des degrés différents selon la fonction et préfèrent le terme de "privalence" à celui de dominance.

 

LHERMITTE conclut ainsi (6, p 23) "Sans aucun doute (aussi) nous devons reconnaître la réalité d’un hémisphère majeur et d'un hémisphère mineur (le droit) mais je le répète la dominance hémisphérique n’est que relative

 


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Est‑ce parce qu’un enfant est droitier que son hémisphère majeur sera le gauche ou bien est ce parce que l'hémisphère gauche est dominant que le sujet sera droitier ?

 

Pour LHERMITTE (6 ‑ P 20) “ L’établissement d'une main préférentielle n’implique pas la nécessité d'une contre latéralité des dispositifs cérébraux qui sont le substratum des fonctions phasiques".

 

De même GRAPIN & PERPERE disent : "La règle rattachant l'aphasie à des lésions de l'hémisphère opposé à la main préférentielle ne jouerait pleinement que pour les droitiers''. (6p85)

 

D’après HECAEN c'est à partir de la latéralité corporelle que s'installerait la dominance hémisphérique contre latérale. La préférence latérale s'établit chez l'enfant alors que la dominance hémisphérique n'est pas affirmée et cet auteur en donne pour preuve la rareté de l'aphasie ainsi que son caractère réversible. Il rappelle que "P. MARIE à la fin du siècle dernier enseignait que l'installation d’une hémiplégie droite avant l’âge de 12 ans ne s'accompagnait pas d'aphasie". (6 P22)

 

                                               HECAEN implique beaucoup plus étroitement le rôle de la main choisie par l’enfant en tant que inductrice de prévalence hémisphérique. Il pense que "le le de la main droite dans l'écriture pourrait être (ici) capital, les liaisons ainsi nécessaires entre centres moteurs et structures sous tendant la fonction du langage, entraîneraient la prééminence de celles situées à gauche".         (6p54)

 

J. de AJURIAGUERRA (4, P 127) écrit "Une série d'auteurs ont voulu voir dans la dominance oculaire l’origine de la préférence manuelle et certains même de la dominance hémisphérique (GOULD, PARSON) ” ; mais il ajoute : "notons l'argument de fait opposé à cette théorie par BALLARD (cité par WILE) à savoir qu'il existe la mime proportion de droitiers et de gauchers chez les sujets congénitalement aveugles que chez les voyants. Il

 


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HECAEN poursuit en disant "Des patterns dynamiques s'organiseraient dans chaque hémisphère à partir de la latéralisation motrice dûe à une transmission héréditaire susceptible d’être modifiée par les influences du milieu. Mais, lorsque cette latéralisation motrice ne s’établit pas nettement, l’organisation cérébrale tend vers une ambilatéralité fonctionnelle……… et aussi peut être vers une moindre focalisation des représentations".

 

Nous ne prétendons pas avoir fait une étude approfondie des rapports entre la dominance hémisphérique et la dominance latérale. Nous ne savons pas si les hypothèses émises par HECAEN ont pu être vérifiées puisque nous n'avons pas une connaissance exacte de l’état actuel des recherches en ce domaine, aussi donnerons nous sa conclusion :

 

" Une corrélation formelle ne peut donc être établie entre préférence manuelle et dominance hémisphérique bien qu'une certaine liaison existe entre elles deux ”. (6, p55)

 

 

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28 Mai 2003

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