OREILLE GAUCHE, OREILLE DROITE

RECHERCHE SUR LA LATERALITE AUDITIVE

Université Paul Sabatier, Toulouse III

U.E.R. Techniques de Réadaptation

 

Mémoire pour l'obtention

du certificat de capacité d'orthophoniste

 

Martine VALIÈRE‑MONTAUD

Gisèle ROTH,

Jean RIBO

 

 

 

Sous la direction de Pierre F. Montaud, orthophoniste

1978

 

CONCLUSIONS ET HYPOTHESES

 

 

Les résultats exposés dans les tableaux précédents confirment donc notre hypothèse de départ : l'existence d'une latéralité auditive.

 

Nous avons pu constater qu'elle était plus ou moins bien établie et plus ci moins en rapport avec la latéralité générale.

 

nous pensons que cette latéralité auditive intervient dans l’acquisition du langage et dans le développement général de l'individu.

 



 

Connaissant la relation qui peut exister entre une latéralité psychomotrice mal déterminée ou mixte et les troubles du langage, et sachant que l'oreille exerce un contrôle constant de l’expression verbale, nous pensons qu'à fortiori une latéralité auditive indéterminée doit favoriser l'apparition de troubles du langage.

 

Il ressort on effet de notre étude, que le pourcentage le plus fort de sujets mal latéralisés se trouve dans la population en retard scolaire.

 

L'existence de la latéralité auditive et sa fréquente implication dans les troubles du langage devrait nous inciter à ne pas la négliger qu'il s’agisse d'éducation précoce ou de rééducation proprement dite.

 

A.A.TOMATIS et ISI BELLER que nous avons cités pour leurs recherches dans ce domaine ont élaboré des méthodes de rééducation s'appuyant sur l’existence de cette latéralité.

 

Ces méthodes tiennent compte d’une part du rôle essentiel de l'oreille et du contrôle quelle exerce dans la réalisation de la parole et le développement général de la fonction linguistique, d'autre part de l’aspect affectif qui se manifeste dans le désir ou le refus d'écouter la parole.

 

Nous avons déjà souligné l'importance de la composante psychique dans l'établissement de la latéralité psychomotrice et nous pensons que cette composante est également impliquée dans le choix de la dominance auditive.

 

TOMATIS estime que la rééducation de l'écoute doit privilégier l'oreille droite et considère que celle-ci est pour tous les sujets "l'oreille directrice".

 

Il écrit : "Il n'existe pas de gauchers. Il n’est pas plus de vrais gauchers que de faux gauchers, il y  seulement des fixations à gauche pour des raisons éducatives, affectives, psychologiques. Le nombre considérablement plus important de droitiers et la possibilité de modifier une structure gauche en une organisation droitière par simple action de la fonction verbalisante constituent des éléments de défense en faveur de la droite dans le grand procès de la latéralité". A.A. TOMATIS (3, p.108)

 

Cette prise de position très nette est en contradiction avec les résultats de notre épreuve.

 

Le nombre important de droitiers que nous avons pu relever n'exclut pas l’existence de gauchers.

 

Peu importe que cette gaucherie ou cette droiterie aient pour origine des facteurs éducatifs, affectifs, psychologiques ou même neurologiques puisqu'il s'agit là de réalités indéniables dont on doit tenir compte dans toute intervention thérapeutique. Choisir sciemment d'aller contre l'existence de telles réalités est difficilement compatible avec l'élaboration de techniques de rééducation.

 

Eduquer et rééduquer c'est avant tout s'adapter à l’individu tel qu'il est et non décider par avance de ce qu'il doit être.

 

Il nous parait donc important qu’une éducation précoce prenne en compte la latéralité auditive sans chercher à l'établir à priori à droite.

 

Nous savons que l'enfant infirme moteur cérébral fréquemment limité dans ses mouvements ne bénéficie pas toujours d'un apport de stimulations &gales pour les deux oreilles, ce qui entraîne chez lui de véritables déficits auditifs du côté non stimulé.

 

Pour cette raison on conseille aux parents dans le but d’une éducation précoce de changer fréquemment la position de l’enfant et celle de son lit de telle sorte qu'il reçoive une quantité égale de stimulations sur l'une et l'autre oreille.

 

Si cela n'a pas été fait ou si l’on ne constate le déficit que tardivement une véritable rééducation auditive sera entreprise en faveur de l'oreille déficiente.

 

L enfant normal ne subit pas de tels préjudices mais on peut supposer que du fait de la latéralité manuelle de sa mère il recevra davantage de stimulations par une oreille et ce sera le plus souvent la droite. Par exemple une droitière tient son enfant sur la bras gauche lorsqu'elle lui donne le biberon. C'est l'oreille droite qui est donc, à ce moment privilégié, en relation directe avec la parole maternelle.

 

La répétition d'attitudes ainsi orientées favoriserait déjà l'installation d'une latéralité auditive droite, l'oreille la plus fréquemment stimulée devenant quantitativement et qualitativement meilleure.

 

Cet enfant de mère droitière peut être un futur gaucher de par sa position fœtale par exemple, mais l’influence éducative de sa mère orientent 1’établissement de sa latéralité auditive à droite risque de créer un léger handicap pour son développement psycholinguistique. Il semblerait qu'il y ait donc tout intérêt à ce qu'un enfant, quelles que soient ses prédispositions et quelle que soit la latéralité de ses parents reçoive une éducation permettant un développement harmonieux de ses deux capteurs auditifs.

 

Les conseils que l'un donne aux parents de enfants infirmes moteurs cérébraux peuvent très bien être donnés aux parents d'enfants normaux.

 

Ainsi l'enfant qui aura reçu une quantité égale d’informations sur l’une et l'autre oreille sera en mesure de choisir réellement la latéralité qui lui convient.

 

                                         Dans le cadre de la réduction orthophonique lorsque nous sommes en présence d’enfants mal latéralisés sur le plan auditif, il faudrait peut être également envisager une éducation séparée des deux oreilles. Nous connaissons l'importance de l’éducation auditivo-perceptive dans les troubles tels que le retard de parole, bégaiement; dyslexie et dysorthographie. Cette éducation perceptive devrait tenir compte de l'existence de la latéralité auditive et ne pas se limiter à une éducation globale indifférenciée de la perception auditive.

 

                                         On pourrait par exemple, à partir d’enregistrements réalisés sur deux pistes séparées, portant chacune un contenu différent et lues simultanément ,demander à l'enfant de concentrer son attention de façon à n’écouter que l’information reçue sur une oreille. (Cet exercice étant réalisé identiquement pour 1’une et l'autre oreille). Les enregistrements proposés pourraient contenir des bruits, des sons musicaux et bien sûr des mots ou des phrases.

 

Il serait possible même de faire une éducation séparée des deux oreilles en assourdissant l'une tandis que l’autre travaille.

 

La voix retardée telle que nous l'avons utilisée dans notre épreuve pourrait aussi constituer la base l'exercice intéressants.

 

L'effort qui consiste à maîtriser la gêne qu'elle provoque peut être bénéfique pour entraîner un enfant à privilégier certaines informations auditives au dépend de bruits qui peuvent leur être associés. Les informations auditives à privilégier dans cet exercice étant celles qui sont transmises directement par la voix solidienne, les bruits, la voix retardée transmise par le casque.

 

En présence d'un enfant dont la latéralité auditive est nettement déterminée mais en dysharmonie avec sa latéralité générale il semblerait que l'on puisse adopter deux attitudes : soit respecter le choix déjà établi et développer les aptitudes perceptives des deux oreilles, soit entreprendre de déplacer la dominance auditive de façon à ce qu'elle corresponde à la latéralité globale. Dans ce cas on éduquera plus spécialement l'oreille que l’on désire rendre dominante. Cette dernière solution ne sera adoptée qu'avec une extrême prudence.

 

La recherche reste ouverte en ce qui concerne la mise au point d'exercices perceptifs auditifs ne nécessitant pas l’utilisation systématique d'un matériel technique complexe.

 

En effet, l'utilisation permanente d’un tel matériel peut avoir un effet négatif si elle établit une distance entre le rééducateur et l'enfant, distance dont représentation la plus significative est l’isolement de l’enfant en cabine.

 

Le simple fait de faire varier au cours de la rééducation la position que l'on occupe lorsqu’on travaille avec un enfant est déjà un moyen de jouer sur sa latéralité auditive.

 

Nous savons qu'il n'est pas souhaitable d'éduquer la latéralité de façon segmentaire et pensons que l4ducation de la latéralité auditive devrait s'intégrer dans une éducation de la latéralité générale. Il ressort de notre étude que les latéralités hétérogènes constituent un terrain fragile propice à l’installation de troubles de la latéralité et de troubles du langage.

 

Nous pensons donc qu'une collaboration étroite avec les différents intervenants de l’équipe psychothérapeutique, notamment les psychorééducateurs et les orthoptistes, est absolument nécessaire.

 


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Il est évident qu'une telle action éducative ne peut être entreprise qu'à condition de posséder un outil permettant de déterminer de façon précise la latéralité auditive.

 

Notre travail a constitué une simple approche et nous nous sommes bien défendus de lui conférer une valeur de test.

 

Pour que notre épreuve devienne un test il faudrait qu'elle soit étalonnée selon les critères définis par la statistique et donc qu'elle soit proposée à une population normalisée ce qui permettrait de tenir compte de variables telles que le sexe et le milieu socioculturel.

 

D'autre part les différents items devraient être affinés en vue d'une détermination précise de la latéralité

auditive quel que soit l’âge du sujet. En effet notre épreuve n’a pas permis d'estimer de manière sûre la latéralité auditive

de sujets dont l’âge était inférieur à 7 ans ou supérieur à13 ans.

 

Face à des sujets dont le langage est encore peu élaboré il serait certainement nécessaire de mettre au point des épreuves non linguistiques et face à des sujets adolescents ou adultes des épreuves utilisant un matériel linguistique plus complexe.

 

Des épreuves suffisamment fines et précises pourraient peut‑être rendre possible la mise en évidence des phases de développement de la latéralité relevées par DELACATO : mono – auralité, duo auraliti, binauralité et stéréo ‑ auralité (5 P.15,16); cela permettrait certainement de mieux conduire la rééducation et peut‑être de procéder comme le font Mr. et Mme ACKNIN en ce qui concerne la latéralité oculaire.

 

Ceux‑ci devant un enfant mal lateralisé recherchent le stade auquel se trouve finie la latéralité de

l'enfant et provoquent le retour à un stade antérieur pour que le développement reprenne sur de meilleures bases. ‑ un stade ne

pouvant être atteint que si les stades antérieurs ont été correctement franchis.

 

Cette façon de procéder n'est elle pas déjà largement utilisée dans toute pratique orthophonique ?!

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Psychosonique Yogathérapie Psychanalyse & Psychothérapie Dynamique des groupes Eléments Personnels

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28 Mai 2003

©Martine VALIÈRE-MONTAUD, Gisèle ROTH, Jean RIBO