Melissa PIZARRO-GONZALES , Fabien DELLA MAESTRA , Elodie BOUAZZA
et Elsa MOREL-CIVERA
École (Ryu)
Voie (Do)
Paix (Wa)
PIZARRO-GONZALES Melissa, DELLA MAESTRA Fabien, BOUAZZA Elodie et MOREL-CIVERA Elsa
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La lame du sabre coupa l'air. Un éclair bleuté d'acier jaillit! Le Katana était passé à un cheveu de la tête du vieil homme qui, avait esquivé l'attaque. Les spectateurs retenaient leur souffle l'homme qui tenait le sabre repris sa posture, évalua la distance et attaqua de nouveau, visant à couper la tête de son partenaire. Il se lança, accompagnant son attaque d'un kiai. Le sabre s'arrêta juste au dessus de la tête de Maître Ohtsuka qui stoppa la lame en la claquant entre ses deux mains: technique caractéristique du kata Bassai sho. C'était à Long Beach lors des 3e championnats du Monde de Karaté.
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Hironori Ohtsuka naquit le 1er juin 1892 à Shimodate City,
dans la préfecture d'Ibaragi. Son père le Docteur Tokujirô Otsuka avait une
clinique de médecine. Second de quatre enfants, Otsuka Sensei écoutait les
excitants exploits de l'oncle de sa mère, un guerrier Samurai, ce sont ces
récits qui l’incite à étudier les arts martiaux. C'est sûrement la première
vision d'Otsuka Sensei qui le guidera plus tard aux principes et aux
philosophies du karaté Wado.
Sa pratique d’un art martial commença dans l’année de ses
6 ans avec l’apprentissage du Jujutsu sous la direction de son oncle, Chojirô
Ebashi, et de son père, le Docteur Tokujirô Ohtsuka. En 1905, il deviendra
l’élève de Shinsaburô Nakayama, grand maître de l’école Shindô-Yoshin de
Ju-jutsu qui l’entraînera au Ju-jutsu ainsi qu’au Kendo. L’enseignement de
cette école repose sur un principe traditionnel présent dans de nombreux arts
martiaux japonais : celui de l'harmonisation des mouvements du corps avec ceux
de la nature. Les principes particuliers de cette école vont dans la même
optique : les techniques de défense et de contre-attaque se doivent d'être à la
fois efficaces, respectueuses de la logique du corps, agréables à effectuer et
en parfaite harmonie avec les lois naturelles. La formation fournie par cette
école de Ju-jutsu lui donna alors une connaissance étendue de techniques de
saisies, luxations, contre-prises et autres ainsi qu’un certain savoir en
matière de percussions. Entre 1912 et 1917, parallèlement à ses études de
commerce à l'Université de Waseda et son apprentissage de la médecine
traditionnelle japonaise, Ohtsuka s’intéresse à plusieurs disciplines mais
surtout à différentes formes de Kenpo présentes au Japon, afin d’approfondir sa
connaissance en atemi afin de rendre sa façon de combattre très complète. En 1917,
il entre à la banque Kawazaki mais il envisage déjà de consacrer sa vie aux
arts martiaux ; sa famille y étant très fortement opposée il reporte son projet
de plusieurs années. En 1921, il obtient son certificat de maîtrise générale
(menkyo-kaiden) de l'école Shindô-Yoshin des mains de Nakayama qui le désigne
comme son successeur officiel et quatrième maître du Ju-jutsu Shindô-Yoshin ;
et cela seulement à 29 ans ce qui est un fait tout à fait exceptionnel.
L’année suivante, Ohtsuka apprend par l’intermédiaire d’un
journal que l'empereur Hiro Hito a assisté à une démonstration de Tode de style
Shurite et que Gichin Funakoshi, habitant d’Okinawa et futur fondateur du
Karaté de style Shotokan, doit à nouveau exposer son art à Tokyo. Pousser par
la curiosité Hironori Ohtsuka se rend à Tokyo. Il y rencontre Gichin Funakoshi
au gymnase Meishojuku, le maître l’accepte comme élève. C’est donc en juillet
1922 que commence l’apprentissage de Hironori Ohtsuka au Karaté Shotokan.
Hironori Ohtsuka aborde ainsi le Karaté en pensant y trouver des éléments
complémentaires lui permettant de parfaire son Jujutsu. A l’époque
l'instruction du karaté se faisait presque uniquement par les katas qui se
trouvaient au nombre de quinze. Gichin Funakoshi lui explique que ces kata
peuvent être appris en cinq ans pour une personne n’ayant pas d’expérience en
art martial mais qu’un expert dans une discipline de Budo peut les connaître en
deux ans. Gichin Funakoshi lui explique aussi que la progression à un niveau
plus élevé dépend de la qualité de l'entraînement de chacun. Hironori Ohtsuka,
devenu élève de Gichin Funakoshi, apprendra ces kata en un an et demi mais
Ohtsuka trouve que, de son point de vue d’expert en Jujutsu, ces kata
comportent des éléments inapplicables en combat. En 1927, il quitte la banque
Kawasaki de Shimodate City pour devenir spécialiste médicale en traitements
pour les blessures occasionner par les arts martiaux et pour s'impliquer
d'avantage dans l’étude du Karaté. Deux ans plus tard, celui-ci obtient son diplôme
de médecine traditionnelle et ouvre sa première école de Karaté à l’Université
de Tokyo où il restera cinq ans sous la direction de Funakoshi Sensei. Pendant
ces 5 années, Ohtsuka travailla avec des maîtres de différents styles de Karaté
: entre autres Jigoro Kano (fondateur du Judo), Morihei Ueshiba(fondateur de
l’Aïkido), Yoshitaka Konishi (futur fondateur du style Ryobukai qui se base sur
des techniques de Kendo comme le Wado-ryu se base sur le Jujutsu) Kenwa Mabuni
(fondateur du style Shito-Ryu) et Choki Motobu (pratiquant du style Naha-Te) ;
c’est Konishi qui permet la rencontre entre Ohtsuka et Manubi. Ce dernier vient
d’arriver d’Okinawa, en 1928, Ohtsuka lui énonce donc ses doutes quant à
l’efficacité des kata actuels et lui expose ses différentes tentatives pour
trouver des kata plus proche de la réalité. Le savoir de Manubi est une
bénédiction pour Ohtsuka qui n’a pas pu effectuer de voyage à Okinawa, ce
savoir lui permet de faire progresser sa réflexion sur les kata. C’est à ce
moment que des désaccords naissent entre Gichin Funakoshi et Hironori Ohtsuka,
ce dernier voulait développer le coté combat du Karaté ce que Funakoshi
trouvait dangereux car la nature profonde du Karaté était basée sur des
techniques mortelles. Les divergences entre ces deux hommes étaient présentes
depuis le début, l’équilibre restait précaire malgré le fait que Ohtsuka
partageait un certain enrichissement avec Funakoshi. La stabilité de cette
relation se brise quand la démarche d’Ohtsuka apparaît outrancière aux yeux de Funakoshi.
En effet, Hironori Otsuka commence à ressentir la nécessité de faire des
exercices de combat libre en empruntant des modèles tantôt à la Boxe, tantôt au
Kendo. Cette évolution est naturelle pour Hironori Otsuka qui a déjà pratiqué
pendant dix-sept ans le Jujutsu où les kata sont une préparation au combat,
tandis qu'elle est inadmissible pour Funakoshi. Celui-ci commence alors à
critiquer Otsuka: « Il modifie l'essentiel du Karaté en y apportant trop
d'éléments de Jujutsu ». La différence de leur démarche rend dès lors la
séparation impossible à éviter.
Hironori Ohtsuka, s'écartant de Gichin Funakoshi, continue
à construire son art en alliant Karaté et Jujutsu. Certains groupes
d’étudiants, préférant sa démarche car voulant essayer l’efficacité de leur art
dans des combats, le suivent. Cet aspect étant interdit par Funakoshi crée deux
courants dans l’école du maître. Le groupe qui suit Hironori Otsuka formera
plus tard l'école Wado-Ryu. Durant cette formation les techniques d’atemi que
Hironori Otsuka avait appris du Karaté pour les adapter dans l’instruction du
Jujutsu. En mai 1934, il inaugure sa première école, le Dai Nippon Karaté
Shinko Club puis change de nom pour Dai Nippon Karaté-do Shinbu-Kai qui ensuite
devient Ko-Shu Wado-Ryu Karaté Jutsu, le nom devient plus court pour Wado
Karaté Jutsu et finalement change pour Wado-Ryu. Conjointement à son travail
dans la médecine traditionnelle, il commence à enseigner dans son dojo et dans
quelques clubs universitaires. Quatre ans plus tard il obtient le titre de
renshi (maître de troisième rang) par le Butoku-kai, au même moment il cesse
l’exercice de la médecine traditionnelle et se focalise sur la pratique du
Karaté. Durant l’année 1940, Otsuka Sensei enregistre son style au Budokukai de
Kyoto, devenant ainsi un des quatre grands styles du Karaté japonais avec le
Shotokan-ryu, le Goju-ryu et le Shito-ryu. Deux ans plus tard, au centre de la
guerre il reçoit le titre de kyoshi (maître de deuxième rang). En 1944, le
développement de règles pour la compétition de combat (kumite) est en marche,
c’est le premier style de Karaté à avancer dans cette voie. Ces règlements
seront plus tard adaptés aux compétitions de Karaté moderne. Mais le fracas de
la guerre vient anéantir ce qui restait des pratiquants de Karaté qui sont
parti mourir au front. La guerre se termine ne laissant aucun dojo à Tokyo.
C’est après 1946 que le Karaté, reçoit de nouveaux pratiquants qui par leur
énergie et leur passion réchauffent l’atmosphère froide et morne de la défaite.
Pour ces étudiants d’après guerre l’entraînement du Karaté leur permet de faire
le deuil de leurs camarades morts au combat. Hironori Ohtsuka recommence à
enseigner dans les clubs universitaires. L’interdiction d’enseigner les arts
martiaux levés en 1951, il fonde la Zen Nippon Karaté Renmei ("Fédération
de Karate de tout le Japon", qui reste néanmoins une organisation privée
de Wado-ryu). Quinze ans plus tard, il reçoit des mains de l’empereur Hiro Hito
le rang de Kun-Go-To (le 5e ordre du mérite du trésor sacré) et le décore avec
la médaille de Soko-Kyokujitsu-Sho, pour ses efforts dans le développement et
la promotion du Karaté. En 1972, il acquiert une nouvelle récompense : la
médaille Shodai Karaté-do Mejin Judan qui est l’intermédiaire de la
certification de deux associations de Karaté, la "All Japan Karaté-Do
Federation" et la "International Martial Arts Federation, Kokusai
Budo In", qui lui attribue le 10ème dan, le premier dans l’histoire du
Karaté, il obtient donc le même statut que Kyuzo Mifune dans le Judo et Hakuko
Nakayama dans le Kendo. Neuf ans après il abandonne sa fonction de Grand Maître
et nomme son fils aîné, Jiro Otsuka, comme le second Grand Maître ; ce dernier
change alors de nom pour Hironori Ohtsuka II. Après avoir obtenu un certificat
de maîtrise générale de Jujutsu, créé un nouveau style de Karaté et obtenu un
10ème dan dans son art ; Hironori Ohtsuka s’éteint à 90 ans de sa belle mort le
29 janvier 1982, laissant à son deuxième fils Jiro Ohtsuka (celui ci a
repris depuis le prénom de son père) le soin de continuer la diffusion du
Karaté Wado Ryu à travers le Monde. Maître Ohtsuka père avait commencé à
pratiquer le Jiu-Jitsu à l'âge de 6 ans, son Karaté restera imprégné de cette
pratique. Sa découverte du Karaté il la fera lors de sa rencontre avec Maître
Funakoshi venu à Tokyo pour une démonstration dans un Dojo local. Après de
longues années passées avec Maître Funakoshi, Maître Ohtsuka crée son propre
style baptisé en 1940 « Wado Ryu ou la voie de l'harmonie ». Ohtsuka
Sensei avait construit son style autour de 9 Katas dont 5 fondamentaux.
Maître Otsuka menait une vie débordante, il avait l' habitude dès son
lever, de se concentrer sur son éthique et de pratiquer énergiquement pendant
20 minutes. Il se concentrait sur une seule technique par jour. Il clamait à
qui voulait l'entendre que le secret de sa longévité résidait dans le fait de
ne jamais s'attarder dans le passé, de se concentrer sur le présent et
d'organiser le futur. Le Karaté Wado Ryu est pratiqué actuellement par des
centaines de milliers de pratiquants à travers le Monde.
L'emblème du Wado Ryu fut dans un premier temps un oiseau qui étend ses
ailes et entre lesquelles se dresse un poing (Wado Kai) puis Maître Ohtsuka
changea le nom de son style en Wado Ryu, l'oiseau aux ailes déployées est resté
mais le poing à été remplacé par un Kanji qui signifie paix.
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« L'efficacité ne s'apprécie guère par l'art martial en lui-même,
mais par la qualité même du pratiquant. Tous les arts ont une finalité d'efficacité,
c'est le pratiquant qui est, à la base, inefficace... »
Gichin Funakoshi
Les Katas de la méthodes Wado Ryu sont au nombre de 16 dont certains de conception
plus moderne expriment clairement l'essence de l'École.
Certaines techniques de poings du Karaté Wado Ryu se trouvent uniquement dans
cette méthode, tel que Jun Tsuki No Tsukikomi, Gyaku Tsuki No Tsukikomi, Tobi
Komi Tsuki, Tobi Komi Nagashi Tsuki, le Wado Ryu se caractérise aussi par des
positions plus hautes que dans les autres Styles et un travail important des
esquives et de la self défense.
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6 Mars 2006