L'utilisation Psychothérapique de la

Relaxation par le Training Autogène

Introduction aux Méthodes de Relaxation

Dr Bernard Auriol

CHAPITRE IV

Dans le prolongement de l’œuvre de Freud (quoique en portant l'accent sur ses premières découvertes à propos de l'hypnose, de la catharsis et du rêve), Schultz et bien d'autres, en parallèle avec lui, ou à sa suite, ont utilisé la détente du corps pour favoriser la survenue d'images, de sensations et d'émotions en rapport avec la problématique inconsciente du client. Ce matériel se trouve généralement repris par un travail d'élaboration en face à face destiné à permettre une socialisation de ces contenus et expériences dans une relation au thérapeute comparable à ce qui existe dans les psychothérapies d'orientation psychanalytique (p.o.p.)

1.       Le cycle supérieur du Training Autogène (T.A.)

Schultz ne propose le cycle supérieur qu'après la pratique deux ans durant du premier cycle. Il insiste sur la nécessité que ce cycle supérieur soit conduit par un analyste. Dans l'état actuel de la psychothérapie et de la psychanalyse, il semble tout aussi prudent de dire : « sera compétent celui qui aura vécu une thérapie personnelle suffisamment prolongée et profonde (de type analytique orthodoxe ou non), une expérience de relaxation suffisamment profonde et prolongée (par le T.A. ou une autre technique) et une expérience de l'imagerie mentale personnelle approfondie (par l'une ou l'autre des techniques que je cite). Ces conditions me paraissent nécessaires et suffisantes pour permettre à quelqu'un - ayant naturellement un minimum de connaissances théoriques (dont les diplômes universitaires ne sont une garantie ni nécessaire ni suffisante) - d'utiliser le deuxième cycle du T.A. ou l'une des autres techniques auxquelles je fais allusion dans la suite de ce chapitre.


Description

Le sujet sachant se relaxer de manière immédiate est prié de loucher vers le haut et le milieu, en regardant vers le centre du front[1] afin de favoriser une déconnexion organismique plus totale encore. Le patient doit alors laisser surgir dans son imagination une couleur « quelconque » (découverte de la couleur propre). Le thérapeute intervient ensuite pour proposer d'autres couleurs, puis des représentations d'objets concrets, quotidiens. Par la suite, on propose des thèmes abstraits « le Bonheur »,

l'Amour », la « Justice », etc. Après quoi on invitera le sujet à laisser se dérouler une expérience représentant l'état d'âme le plus intense et le plus souhaité[2]. On suggère alors la représentation d'une personne aimée, neutre et détestée. Puis une représentation de soi-même ou de sa propre action afin de déterminer « ce que je fais de faux ». On « questionne » enfin l'inconscient sur un certain nombre de « valeurs existentielles », dégageant ainsi la devise qui servira à la personne pour se réaliser, se développer.

2.       TECHNIQUE DE DESOILLE : RÊVE EVEILLÉ ET ONIROTHÉRAPIE

De cette façon de travailler se rapproche la technique d'imagerie mentale de Virel et Frétigny que ces auteurs[3] résument ainsi on utilise des « cycles hebdomadaires ou bimensuels » comportant trois phases

1.     une phase « maïeutique » réservée à la discussion « analytique »

2.     une phase onirique qui se subdivise en période de relaxation (type training autogène) et période d'imagerie mentale (onirodrame);

3.     une phase de maturation, séparant deux consultations successives et pendant laquelle le patient s'affronte à la réalité et à des consignes du thérapeute. En fait, cette technique diffère peu de celle du « Rêve Eveillé Dirigé de Desoille » (R.E.D.D.). La scission de Virel et Frétigny par rapport au groupe du Rêve Eveillé semble pouvoir s'expliquer, comme bien souvent dans les cercles analytiques, par des motivations de prestige personnel (être chef d'une « Ecole »). Ces querelles de clocher se sont amplifiées à un degré extrême à partir du problème de la succession de J. Lacan. Le groupe des analystes utilisant le Rêve Eveillé Dirigé de Desoille, atteint par ce virus de discorde, a changé de nom et s'est scindé en groupes rivaux. On peut donc rapprocher du deuxième cycle de T.A. et de la technique Virel, le Rêve Eveillé Dirigé de Desoille auquel Virel doit lui-même sa formation. Le Rêve Eveillé est historiquement né de la conjonction entre un ingénieur (Desoille) passionné de psychologie et un colonel (Caslant) porteur infidèle de techniques yogis tibétaines[4].

4.     Le R.E.D.D. se déroule ainsi : on alterne deux types de séances

a.      séances de divan : Séances de Divan (en relaxation : qui s'approfondit d'elle-même grâce à l'imagerie mentale).Le thérapeute propose (ou non) un thème de départ, c'est-à-dire verbalise une image de départ dont un catalogue de thèmes standards existe mais dont un grand nombre sera spécifique du client considéré. Le client est amené par des techniques simples à préciser le plus possible son imagerie. Il est invité à évoluer dans cette imagerie. Le thérapeute propose très fréquemment pendant la séance d'en parcourir l'axe vertical. On constate que de nombreux clients sont extrêmement limités par rapport à cet axe. Les résistances à dépasser ne concernent pas seulement cet axe mais également d'autres dimensions de l'espace, certains types d'images, etc. Personnellement j'ai émis l'hypothèse[5] que le parcours de cet axe renvoyait à l'espace corporel considéré sous l'angle de centres énergétiques étagés, tels que les décrivent le Yoga et la Bioénergie (Reich-Lowen) dont on peut proposer différents exercices en corrélation avec les séances. Classiquement, un compte rendu écrit (ou dessiné) est demandé au client dans l'intervalle de deux séances.

b.     séances de fauteuil. La séance de fauteuil est généralement consacrée à des associations concernant le scénario de R.E.D.D.  récits de rêves, d'événements de la vie quotidienne, de souvenirs plus ou moins anciens, de réactions concernant le thérapeute, etc. En règle, le rationnel y prend sa revanche sur l’onirique. Pratiquement, une séance hebdomadaire suffit généralement à assurer une évolution telle que la personne décide de terminer l'expérience dans une fourchette de durée qui se situe entre 6 mois et 6 ans, la moyenne étant de l'ordre de 2 à 3 ans. Il existe des critères objectifs permettant de définir l'étape de la cure à laquelle on se trouve. Ces critères ne sont pas ceux de la psychanalyse, quoique les auteurs récents aient tendance à se référer à la théorie freudienne et à ses développements. Desoille décrit une évolution du scénario en trois étapes :

1. régime des images personnelles qui font référence directe à la vie du sujet, à ses souvenirs, à sa problématique consciente

2. régime des images mythiques qui rejoignent le monde de la fable, du conte de fée, du folklore et qui dépassent parfois l'individu

3. régime des images mystiques, de lumière, sans contenu précis. Domaine de sentiments universels ou océaniques. « L ' existence des types de représentation décrits (images mythiques et mystiques) offre un intérêt considérable pour la psychothérapie. L'expérience montre, en effet, que c'est au niveau des images de la fable que l'action du psychothérapeute est la plus efficace et que, si le sujet désire cultiver au maximum ses tendances les plus généreuses (socialisation des instincts), c'est au niveau des images mystiques qu'il découvrira ses possibilités en ce domaine[6] ». C'est là que nous rejoignons, par l'autre bout pour ainsi dire, la relaxation, car si une certaine détente est un préalable et une condition du R.E.D.D., le déroulement de la cure en entraîne l'approfondissement jusqu'à ce quatrième état de conscience fait d'unité, de totalité et de bonheur dont nous avons déjà parlé.

La technique du R.E.D.D. provoque un certain nombre de modifications physiologiques, mais les études en ce domaine sont très rares. R. Desoille écrit, à propos des sujets obtenant au cours de la séance des images « mystiques » :

« J'ai fait quelques mesures sur des sujets très entraînés que l'on doit considérer comme normaux. Ces mesures mettent en évidence

- un faible abaissement de la température rectale après une séance d'une heure (environ un à deux dixièmes de degrés centigrades)

- une régularisation et un ralentissement du pouls

- un ralentissement de la respiration

- une baisse qui peut atteindre de quinze à vingt pour cent du métabolisme respiratoire avec un sujet très entraîné ».

Il poursuit :

« Il y a donc un ralentissement de la vie végétative du sujet, pendant une séance, analogue à celui que l'on constate au cours du sommeil profond. Il est donc permis de dire que, pendant sa séance, sans dormir le moins du monde, le sujet se trouve dans un état voisin du sommeil, ce qui explique déjà en grande partie l'effet sédatif du R.E.D.D. éprouvée par le sujet, hormis les rares séances où il éprouve de fortes émotions (environ 5 % en moyenne tout au plus). A cet état, comme dans l'hypnose et le sommeil, doit donc correspondre une inhibition plus ou moins accusée du cortex. On comprend ainsi que, au cours d'un R.E.D.D., certaines liaisons temporaires comme celles que considère Pavlov dans la description qu'il donne du processus nerveux de la perception, soient momentanément rompues, ce qui conduit à une simplification croissante des images. Mais c'est surtout l'action de freinage du cortex sur les centres sous-corticaux qui est diminuée, ce qui assure une liberté d'expression des sentiments que l'on constate sur tous les sujets. Nous apercevons, en même temps, les raisons qui rendent nécessaire un entraînement progressif pour atteindre ce résultat par une activité nerveuse nouvelle qui n'est ni celle du sommeil profond ni celle de l'état de veille normal, mais dont il reste maître en en gardant le souvenir exact ».  

c. Le rêve éveillé analytique     

Reprenant la première intention et la première intuition de R. Desoille, ses élèves ont développé leur pratique dans le sens psychanalytique, insistant moins sur son impact neurophysiologique ou comportemental que sur la démarche globale, l'approche de l'inconscient, le fonctionnement, et le sens de l'imaginaire tel qu'il s'y manifeste, la relation à l'analyste, les résistances, l'interprétation, etc.

C'est la raison qui a conduit le groupe de ces praticiens à se définir comme « analystes de Rêve Eveillé » en supprimant le terme « Dirigé » qui lui faisait suite. Suppression quelque peu discutable. A vouloir échapper aux critiques que ne manquait pas de susciter ce terme (notamment dans l'époque post-68) et à supposer qu'on entreprenne d'être cohérent avec ce qu'il désigne, il faudrait laisser la parole se dérouler en associations libres, purement et simplement selon le protocole de l'analyse freudienne orthodoxe ; on ne voit plus, alors, pourquoi maintenir la référence à Desoille (qui est à son tour supprimée dans le titre du groupe) ni comment prétendre avoir une pratique originale...

En pratique, il existe donc une certaine « directivité », au moins celle qui conduit le sujet à s'engager dans une attitude créatrice ; celle qui permet aussi bien à l'enfant inventant ses personnages qu'à l'adulte auteur d'un film de susciter tout un univers imaginé, plus ou moins éloigné de l'expérience quotidienne... Monde de la B.D., du film, du roman ou de la rêverie toute simple... Le sujet se donne un minimum de contraintes assurant quelque continuité au scénario, inventant quelque « rebondissement » de l'action pour passer d'un contenu mental à celui qui en serait consciemment trop différent.

L'appel au monde des images a des conséquences extrêmement intéressantes : métamorphoses qui « surprennent » le sujet, rencontre d'images très parlantes, effet sublimatoire de l'axe vertical, facilité à évoquer les contenus ou attitudes « archaïques », disparition de la rationalisation et du verbiage, etc. De ce point de vue, et avec les transpositions nécessaires, on pourrait comparer le rêve éveillé au psychodrame plus qu'à une psychothérapie non-directive.

3.UTILISATION ANALYTIQUE DU TRAINING AUTOGENE

P.Geissman utilise la production imagée du Training Autogène dans une perspective psychanalytique. Sa technique est semblable à celle du R.E.D.D. à ceci près que le caractère directif est abandonné et aussi que le sujet est encouragé à effectuer des séances en l'absence du thérapeute (éventuellement devant un magnétophone qui l'enregistre).

M.     Sapir[7] et son école de relaxation « de sens analytique

utilisent le protocole du training autogène en le modifiant considérablement dans son esprit et quelques détails essentiels. En particulier, les formules d'induction, très brèves et sobres, voulues par Schultz cèdent la place à tout un discours riche en métaphores qui enlève au training sa visée autogène mais renforcerait les possibilités de fantasmatisation du sujet. De très grandes variations sont encouragées chez le thérapeute qui s'exprime en fonction de sa personnalité et de celle du patient, de ce qui a été vécu lors des séances précédentes, de l'attitude actuelle du relaxé, etc. Après la relaxation le patient est appelé à verbaliser ce qu'il a éprouvé ou imaginé. Le langage mis ici très en avant, en nommant les parties du corps et les sensations éprouvées ou proposées joue son rôle naturel de nomination, créatrice de différenciation et de structure, mais aussi intervient de manière plus paradoxale et ambiguë lorsque le thérapeute assigne à l'autre tel ou tel vécu corporel précis, ce qui constitue à proprement parler la « suggestion verbale ». On se doute que le sens des mots n'est pas ici seul en cause  les sonorités vocales, le rythme, la syntaxe, etc. jouent un très grand rôle dont certains effets peuvent se comprendre à partir de ce que j'évoque ailleurs de l'action des sons et des musiques (chap. 14). Jusqu'aux phonèmes employés : ils pourraient. selon l'antique théorie des mantras[8] (cf. chap. 9) s'adresser, selon le type de leur prononciation, à différents topos de l'organisme, à la fois au point de vue psychanalytique et somatique. On propose également des séances silencieuses, sans induction. Au cours de certaines séances le relaxateur touche son client. de manière minutieuse (surtout les extrémités). Les séances peuvent se pratiquer en groupe ou non. Quand il s'agit de groupe (moins de dix dans tous les cas), il y a deux relaxateurs, un homme et une femme.

Cette technique vise à une « régression » profonde, c'est-à-dire à permettre un vécu analogue à celui du nourrisson, ceci dans un cadre défini qui évite de s'y perdre en permettant de vivre cela comme un jeu, pas tout à fait « pour de vrai » (cf. le Rêve Eveillé Analytique). On a rapproché du 2e cycle du T.A. un ensemble de techniques que je me contente d'énumérer :

1.     le drame symbolique (ou visions catathymiques expérimentales de Rechenberger)

2.     la narco-analyse (l'état second est obtenu chimiquement et on ne peut faire que quelques séances), utilisée surtout pour dépasser les troubles liés à un choc intense, brutal et récent :

3.     l'hypno-analyse (la relaxation est remplacée par un état d'hypnose).

4.       L’HYPNOSE ACTIVE GRADUÉE[9] (E. Kretschmer et D. Langen).

Dans cette technique, on obtient une relaxation par la pesanteur et la chaleur (Schultz), puis on approfondit par fixation du pouce du médecin (comme dans l’hypnose). Parallèlement, une analyse des conflits et de leur psychogenèse, menée de manière directive, permet de dégager des formules aphoristiques (dès lors utilisées pendant l'état hypnotique obtenu). Plus tard, le patient exécutera seul la déconnexion et utilisera sans l'aide du thérapeute la formule retenue. Kretschmer n'hésite pas à mordancer sa psychothérapie par de légères doses d'insuline ou une cure de sommeil avec usage de neuroleptiques, en particulier dans les cas de névrose obsessionnelle.

La méthode de l'hypnose active graduée aurait donné des résultats spécialement intéressants chez les alcooliques invétérés.

Cette technique est préconisée également pour certains états « frontières » ( borderline).

5.       LA RÉÉDUCATION PSYCHOTONIQUE DE  AJURIAGUERRA[10].

De Ajuriaguerra et ses collaborateurs ont entrepris d'utiliser au niveau thérapeutique le dialogue tonico-émotionnel qui. reliant le

relaxateur à son client, rappelle ce premier échange de tensions et de détentes qui exprimaient le nourrisson à sa mère. L'enfant insatisfait se contracte jusqu'aux larmes, comblé il se détend jusqu'au sourire béat. Plus tard il marquera ses désirs, ses refus ou ses craintes par des tensions musculaires plus localisées.

Dans la rééducation psychotonique, les résistances à la détente sont comprises comme des « défenses » au sens psychanalytique du terme et leur élaboration puis leur sédation autorisent des remaniements féconds de la personnalité : comme dans le cas, décrit par Schultz[11], d'un de ses élèves « pour lequel tout le Training fut l'expression d'une réaction négative. La mise au jour analytique d'une haine envers le père conduisit à un nouvel équilibre » de la personnalité permettant l'apprentissage de la décontraction.

L'ensemble de ce traitement sera spécialement recommandé chez les tiqueurs, les bègues, et les hyper-émotifs.

Le thérapeute cherche à donner au patient le sentiment qu'il est « compris, accepté tel qu'il est, puis tel qu'il voudrait devenir, reconnu».

6.       UTILISATION DU TRAINING AUTOGÈNE EN GROUPE

Sapir[12]  et ses amis utilisent une technique de groupe dans laquelle un couple de relaxateurs émet une induction verbale abondante, variée, fonction des circonstances. Le ton de voix, le caractère maternant, réparateur, rapprochent cette méthode de la sophronisation (« Training Autogène Modifié ») à cette différence près (qui est importante) qu'ici les relaxateurs tiennent grand compte de la théorisation psychanalytique des stades pré-verbaux  du développement  infantile.  Jarreau  et  Klotz[13] emploient une méthode proche de celle de Ajuriaguerra et dans laquelle l'efficacité (indéniable) ne s'appuie pas sur une élaboration théorique de type psychanalytique. Elle paraît plus facilement transmissible et utilisable par un grand nombre de thérapeutes.

7. TECHNIQUES REICHIENNES ET NÉO-REICHIENNES 

Le courant Californien, très influencé par W. Reich (qui fut responsable de la « technique analytique » avant sa rupture avec le Maître viennois), emploie non seulement l'association libre (tout dire) mais aussi des techniques corporelles (massages, pressions, mouvements, postures, respirations, réflexes neurovégétatifs, etc.) destinés à amener l'expression de contenus inaccessibles à la technique classique. Le transfert est moins pris en considération que la catharsis, la chaleur du thérapeute remplaçant souvent la « neutralité » classique.

a.       Végétothérapie caractéro-analytique et Bioénergie[14]

W.     Reich a imaginé sa technique pour venir à bout de symptômes que l'analyse orthodoxe ne parvenait pas à réduire et qu'on s'était résolu à considérer comme inaccessibles au traitement, pour la raison qu'ils feraient partie de la définition même de l'individu, de son caractère congénital. Il avait remarqué l'association de ces « résistances caractérielles » avec certaines attitudes corporelles qu'il s'était mis à interpréter, renvoyant au patient le mépris » exprimé par sa bouche, voire son bassin et cependant absent de son discours. Par la suite, fort de quelque succès, il alla plus loin en agissant directement sur le corps, estimant que les tensions (cuirasse musculaire) inhibaient la libre circulation de l'énergie et devaient être dénouées ; A. Lowen insiste à son tour sur cette part de la technique et propose de nombreux exercices visant à favoriser les décharges émotionnelles et les « revécus » émotionnels. Il ne s'agit pas seulement d'amoindrir les tensions, mais plutôt d'aller les chercher et de les rendre accessibles pour traiter le matériel dont elles représentent une face accessible.

Janov, quoique niant l'évidence des influences qu'il a subi. s'inscrit dans le courant reichien. Il prive l'organisme de son client de toutes les compensations et fausses assurances pour l'obliger à extérioriser les stresses les plus anciens et les plus fondamentaux, il espère ainsi les traiter définitivement et rendre à un fonctionnement complètement sain et naturel celui qui s'est confié à ses soins. Les résultats sont parfois évidents mais, contrairement aux affirmations de l'auteur, des échecs et des déconvenues ne sont pas introuvables...

Gestalt de Perls et Relaxation[15]

Cette école, créée par Perls, fait référence à l'idée qu'une interaction entre l'individu et son environnement a dans le meilleur des cas une forme achevée, satisfaisante pour l'organisme et que l'inhibition d'un tel processus entraînerait une sorte de cicatrice psychosomatique dont on pourrait venir à bout en suscitant un revécu complété (ce qui est plus extensif qu'une simple décharge émotionnelle ou catharsis) de ce qui était engrangé comme « Gestalt incomplète » dans le système nerveux. Pour ce faire, le contact entre le client et son thérapeute est d'une importance capitale (où l'on reconnaîtra un avatar du transfert/ contre-transfert freudien). Ce contact met en scène extérieurement ce qui se passe à l'intérieur des protagonistes, spécialement de celui qui est demandeur d'une évolution personnelle.

Les gestaltistes décrivent quatre formes de la résistance  la confluence qui évite l'affrontement ou même la simple différence, la rétroflexion qui empêche l'expression des mouvements à l'extérieur (à rapprocher de l'inhibition de l'action, illustrée dans le film de H. Laborit « Mon Oncle d'Amérique »), l'introjection qui fait entrer dans le « for(t) intérieur » ce qui fut enjoint ou suggéré par le milieu éducatif, la projection qui fait illusoirement lire au dehors ce qui nous appartient mais dont nous nous défendons.

Par ces mécanismes, l'organisme du patient tend à se défendre contre tout changement et à se crisper sur ses positions anciennes, y compris les sources d'angoisse et de tension que sont les gestalts incomplètes du passé. Lever ces résistances, achever les mauvaises formes, libérera de grandes quantités d'énergie et produira un sentiment de détente. Bien entendu, on pourra alors observer les effets physiologiques que nous connaissons bien au niveau respiratoire, cardio-vasculaire et musculaire...

La Gestalt, comme les techniques de relaxation met l'accent sur la conscience actuelle globale, l'expérience en cours, le vécu immédiat, fut-il relaté à une préhistoire... D'où l'utilisation de procédés bien connus par les reichiens et les yogis : usage du souffle et de diverses mises en jeu corporelles et de mises en scène voisines du psychodrame.

Selon cette approche, toute relaxation pourrait conduire à la prise de conscience de gestalts inachevées perturbatrices et toute résolution des résistances amener une meilleure présence à soi relaxée, de sorte qu'on devrait observer une amélioration progressive du fonctionnement global de la personne.

*

*        *

Ces auteurs demandent tous à leurs clients de se servir de leur corps plutôt que de leur « tête » ; ils représentent ainsi une sorte de contrepoids à certaines cures analytiques trop rationalisantes, lesquelles prennent prétexte de ce que l ' « inconscient est structuré comme un langage » (J. Lacan) pour laisser s'épanouir une verbigération creuse indéfinie. Reconnaissons, en même temps, que c'est dans le sillage du maître parisien que les tentatives les plus riches et les plus originales ont vu le jour en France depuis les années soixante ; elles ont permis une approche analytique des techniques de créativité, des techniques corporelles (« analyse corporelle » de J. de La Robertie par ex.), du rêve éveillé, du fonctionnement des institutions soignantes, etc.

                                                                  (tableau p.63)

 

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Psychosonique Yogathérapie Psychanalyse & Psychothérapie Dynamique des groupes Eléments Personnels

© Copyright Bernard AURIOL (email : )

29 Décembre 2002


 

[1] Vers le lieu du  « troisième œil »,  centre Ajna du Yoga, où s'établirait la connexion du disciple à son Maître spirituel (Gourou). Au cours de l'analgésie par l'acupuncture, on a avantage, comme l'ont montré les médecins chinois. à masser vigoureusement ce point. Dans le  « rebirth »,  il peut être utile d'agir de même. Rappelons-nous enfin que l'hypnose est largement favorisée si on demande au client de fixer un point rapproché, au-dessus des yeux, central (par exemple le pouce de l'hypnotiseur, un objet brillant, etc.).

[2] « Recherche du sentiment propre » :   cf. GEISSMAN et DURAND DE BOUSINGEN, op. Cit., p. 36.

[3] R. FRÉTIGNY et A. VIREL, L'imagerie mentale, Mont-Blanc. 1968.

[4] 4. E. CASLANT, Le développement des facultés supra-normales, Véga, 1950 ; Evans WENTZ, Le Livre des morts thibétains ou Bardo Thödol, Maisonneuve, Paris, 1970;  Anagarika GOVINDA, Les fondements de la mystique thibétaine, Albin Michel, 1960 ; Evans WENTZ,  Le Yoga thibétain et les doctrines secrètes ou  Les sept livres de la Sagesse du Grand Sentier, Maisonneuve, 1970.

[5] B. AURIOL.  « Yoga et R.E.D.D. », in Cahiers de l'institut du Rêve Eveillé Dirigé, n° 2, déc. 1977, p. 47  F. BELMAIN,  « A propos de la communication sur le Yoga », même référence, pp. 48-49.

[6] R. DESOILLE, Théorie et pratique du Rêve Eveillé Dirigé, Mont-Blanc, 1961, pp. 44-45 et sq.

[7] M. SAPIR, Les psychothérapies de relaxation chez l'adulte, E.M.C., Psy, 37820  B10, 4-1974.

[8] I. FONAGY,  La Vive Voix, essais de psychophonétique, Payot, 1983 ; B. AURIOL,  A propos des Chakras, Congrès d ' Audio Psycho Phonologie de La Plaine-sur-Mer, mars 1985 (Actes publiés par 1'AFAPP en sept. 1986 sous le titre : La Musique, les Sons, au service des médecins, éducateurs et pédagogues, pp. 125-141); C. DELANCHE, L'énergie par les mantras, Vital, 71, 71-74, août 1986).

[9] E. KRETSCHMER, « Hypnose fractionnée active », in La Relaxation, Expansion,1964, 3e éd., pp. 299-308 ; D. LANGEN, « Méthode de l'hypnose active gra­duée », in La Relaxation, op. cit., pp. 377-48.

[10] J. DE AJURIAGUERRA et Coll.,  « Tonus corporel et relation avec autrui », in La Relaxation, Expansion, op. Cit., pp. 241-298.

[11] SCHULTZ, in  Le Training Autogène, op cit., 3e éd. fse., 1974, p. 111.

[12] M. SAPIR, La Relaxation : son approche psychanalytique, Dunod. 1975.

[13] R. JARREAU et R. KLOTZ,  « Méthode de relaxation analytique », in  La Relaxation, op. cit., pp. 25-37 ; cf. aussi J.C. BENOIT et coll., « L'abord corporel thérapeutique à partir de l'Autogène Training de Schultz », in Actualités psychiatriques, 1, 1978, pp. 8-17.

[14] W. REICH, La fonction de l'orgasme, L'Arche, 1970 ;  L 'analyse caractérielle, Payot, 1971 ;  A. LOWEN,  La dépression nerveuse et le corps, Tchou, 1976 ;  Le Plaisir, Tchou, 1976 ;  La Bioénergie, Tchou, 1977 ;  A. JANOV,  Le cri primaI, Flammarion, 1975 ; A. et L. LOWEN, Pratique de la Bio-Energie, Tchou, 1977 ; Un atelier d'exercices bio-énergétiques avec A. et L. LOWEN, P. Girod, vidéo-cassette VHS, Agapé, 184 rue Saint Maur, 75010 Paris.

[15] Lire AMBROSI. La gestalt revisitée, Privat ; DELACROIX J.-M., La Gestalt, une thérapie mal connue en France, in Psvchologie, 114, 7,    1979 ;  PERLS F.-S.,  Rêver et existence en Gestalt Thérapie (Gestalt therapy verbatim, 1969), Epi (trad. fse.) 1972 ;  Ma Gestalt Therapy,  une poubelle vue du dedans et du dehors, Tchou, 1976 ;  Le moi, la faim et l'agressivité (Ego, Hunger and Agression. 1947), Tchou (trad. Fse.,  1978) ;  PETIT M., La Gestalt-Thérapie de l ' ici et maintenant, ESF, 1984.