" con la
moral corregimos los errores de nuestros instintos, y con el amor los errores
de nuestra moral"
"avec la morale nous corrigeons les erreurs de nos instincts, et avec
l'amour les erreurs de notre morale"
José Ortega y Gasset
L' espace, dans lequel évolue le sujet par son regard et ses gestes, semble universellement structuré en forme de corps humain: avec un haut et un bas, une droite et une gauche, un avant et un arrière, dont les significations, rejoignent celles que l'Inde attribue à la tête et aux pieds, aux cotés droit et gauche, etc. (cf. schémas)
D'autres cultures que l'indo-aryenne ont élaboré un schéma de l'homme comportant des significations très voisines malgré la distance culturelle:
Plutôt que de tenter une description détaillée de ces centres, je vous prie de vous reporter aux ouvrages classiques en la matière d'Arthur Avalon (1950) et de Maryse Choisy (1963), etc.
Je rappelle tout de même qu'ils constituent un système hiérarchisé complexe en rapport avec les stades supposés de l'évolution spirituelle. Ils intègrent une topologie anatomique dans laquelle le haut est valorisé par rapport au bas (qui lui est plus ou moins subordonné d'une façon tout à fait comparable aux modèles de Jackson, Janet, Ey, etc. ) et un point de vue ontogénétique, dans lequel le début est en bas et l'objectif final en haut.
Un tel système dépasse largement l'anatomie, la physiologie et la psychologie, même s'il intègre ces disciplines. Il se réfère en effet, à une conception globalisante dans laquelle les frontières entre physique et métaphysique s'évanouissent. Ce point de vue permet alors de nouvelles distinctions, ésotériques pour notre culture: l'opposition simple entre l'âme et le corps cède le pas à l'articulation de multiples entités de statut ontologique intermédiaire: "corps causal", "corps astral", "corps éthérique", etc. Les chakras sont des "roues" représentées par des "lotus" et reliés entre eux par des canaux "subtils" les "nadis". Nous assimilerons ces centres à la "tranche de corps" respective qu'ils régissent, réduisant notre investigation (sommaire) à ce qui peut se saisir dans le cadre scientifique, c'est à dire d'un point de vue phénoménal.
Encore faut-il préciser que cette castration que nous nous imposons du domaine le plus subtil, le plus élevé, le plus connecté au champ métaphysique, est toute provisoire. Déjà apparaissent les prolégomènes de développements futurs de l'épistémologie, tels que seraient intégrés à la Science Empirique, le versant descriptible et corrélable de l'expérience spirituelle. Par exemple le Pr S.P. Srivastava développe, à l'Université où il enseigne (Lakhimpur-Kheri, Inde), tous les degrés d'une science yogique avec la prétention tout à fait respectable d'abolir la frontière "dure" qui schize notre pensée, peut être depuis Kant.
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1. Le Sahasrara
Il concerne l'Unité transcendante, l'Absolu et n'a pas de traduction phénoménale immédiate, de ce fait, pour rester dans la perspective que j'ai annoncée, je n'en dirai rien, sinon qu'on le symbolisme par un lotus à mille pétales situé au-dessus du sommet du crane. Je pense que c'est une erreur de lui attribuer quelque connexion directe avec l'épiphyse ou tout autre organe.
La pensée Teilhardienne lui fait une place inventant pour cela le terme d' amorisation: il s'agit d'une activation de l'Amour dans le cadre de l'Evolution. (Teilhard de Chardin, in "Le Coeur de la Matière", X). "Il ne fallait rien de moins que la conjonction du Christ avec le point Oméga pour que, dans un jaillissement d'étincelles, se produisit à mes yeux l'extraordinaire phénomène d'un embrasement général du Monde : par amorisation totale". Il écrit ailleurs "Un Univers amorisé, qu'est-ce autre chose qu'un univers excité, activé, à l'extrême de ses puissances vitales" (Teilhard de Chardin, Oeuvres, VII, 274). Ce chakra est pour la tradition hindoue le siège de l'âme.
2. LeMuladhara
Il se situe à la base du corps et porte l'énergie fondamentale "Kundalini" dont on peut rapprocher, sans les identifier l'une à l'autre, la Libido. C'est une source abondante d'impressions agréables; fortes sensations organiques de repos.
Le matérialisme, l'enracinement, la suggestibilité, les élans fusionnels, le besoin de sécurité, l'attachement aux lieux, à l'habitat sont des traits de personnalité bien reliés à ce centre "de base".
La Kabbale l'appelle "Malkout", le Royaume.
En français le terme "s'éprendre de" évoque le latin "prehendere" qui a la même origine que la "proie" ou que "prédateur"; ici, le sens est passif et signifie "être la proie de", "sous l'emprise de", autrement dit "ne plus s'appartenir" mais être possédé par l'autre, se donner à lui comme le royaume se soumet au roi. On peut rapprocher la racine de celle de "lierre", plante grimpante qui s'accroche à son support, comme le bébé à sa maman dont il est "accro"...
Thérèse d'Avila évoque pour sa "première demeure" du château de l'âme (1577) les scrupules obsédants. Ceci suggère un lien avec la névrose obsessionnelle et le besoin de sécurisation par les rites et les répétitions stéréotypées à fonction plus ou moins magique.
L'organe d'action est représenté par les pieds (qui portent le corps), l'organe de perception sera l'odorat. Au niveau psychanalytique, il s'agit des premières relations du nourrisson à sa mère qu'il reconnaît à l'odeur. Il se fait porter, manipuler, soigner par elle ("Holding" et "Nursing"). Il est possible de faire reculer le début du stade maturant ces fonctions à la période fœtale et amusant de constater que la région osseuse correspondante, le coccyx, en grec "kokkux" (cf. en sanskrit "kokila", qui désignait le "coucou indien", eudynamis orientalis, renommé pour son chant) a reçu de Galien un nom d'oiseau connu pour ses tendances parasitaires : le coucou... Cet animal est un des symboles d'Héra dont le nom signifie "Satisfaction". Fille, comme son époux, de la Terre et du Ciel autrefois unis, elle personnifie la Nostalgie de l'unité perdue (dont on a pu faire la définition de l'amour). Bien connue pour sa jalousie, elle pourchasse toutes les séductrices qui détournent Zeus de son devoir. Rivalité du manque fondamental et des petites satisfactions quotidiennes. Elle est la mère de toutes les causes.
On connaît deux usages du mot coucou liés à la mesure du temps (le chronomètre de marine et certaines horloges sont appelés des "coucous"). Ceci évoque les satisfactions rythmiques de la période entourant la naissance et l'automate de Baudoin. On désigne également par "coucou" le narcisse sauvage (primaire dirait Freud !)...
En Anglais, le mot "sake" est employé uniquement dans des expressions où il représente le soin, l'intérêt qu'on prend pour quelqu'un. L'étymologie du mot permet de le rapprocher de "sache" en allemand et de la racine commune plus ancienne *sako (chose, cause, affaire, accusation, crime). On le rapproche de forsake (abandonner, délaisser), keepsake (souvenir de soi donné à quelqu'un), namesake (homonyme d'une personne), ransack (qui signifiait "rechercher quelqu'un dans la maison" pour devenir "fouiller", "piller la maison"), sackless (innocent, incontesté) et seek (essayer d'obtenir ou de trouver). On a pu rapprocher ces termes de « sagus », « sagire », « sagax », « presagus », « sagacitas » mots qui se réfèrent au fait d'avoir "du flair" tel le chien à la recherche d'un gibier. Ce terme doit bien à rattacher au chakra de base (prendre soin, fouiller la maison, flairer). Son étude fait apparaître l'extrême richesse de l'étymologie du point de vue psychanalytique; par exemple le lien marqué ici entre le fait de dérober et d'être à la recherche (de l'amour ?) de quelqu'un... C'est par simple homophonie qu'on pourrait le rapprocher de "saker" qui lui-même renvoie à sacré.
3. Le svadhisthana (ou svadisthana ou svadistana)
Il se situe un peu plus haut (sacrum) et correspond aux désirs orientés vers un objet externe (alimentation, copulation), à l'envie de mordre et la peur d'être englouti, à la soif physique et spirituelle, à l'hyperactivité non canalisée, à la pure spontanéité, etc.
La Kabbale l'appelle "Iesod": le "fondement".
Pour Thérèse d'Avila (1577) la deuxième demeure comporte le risque de désirer les plaisirs, ce qui est le plus agréable...
L'organe d'action est la main, avec le goût comme voie perceptive. On peut le mettre en rapport avec le stade oral de Freud. Là naissent sentiments sexuels, lassitude, stupeur, cruauté, soupçon, mépris.
"love" dérive d'une racine germanique qui a donné Liebe en allemand. Mot cousin de Lief (volontiers), Leave ("permission" à rapprocher de "s'il vous plait"), belief (confiance, foi), believe (croire). En latin nous avons "lubet", "lubido", "libido" (désir érotique) et en Sanskrit la racine "lubh-" (désirer vivement, être avide de, se mettre en chasse de).
"Libitina" était la déesse des morts, des rites funéraires et de la mort. C'est une version infernale de Vénus. Elle nous signale peut-être la parenté inconsciente de la libido et de l'instinct de mort.
Amour, aimer, amant, bien-aimé, amateur, amateurisme, ami, amitié, amicalement, aimable, aimant, amabilité, amoureux, énamouré, amourette, désaimer, etc. dérivent du latin amare. Ce dernier s'emploie dans tous les sens que nous donnons au verbe aimer. Il pourrait dériver de "amma" : maman qui nourrit, à rapprocher du grec "ammas" qui signifie "mère (spirituelle)" ou même "amma" (nœud, attache).
S'énamourer : devenir amoureux (cf. Lacan "haine-amoration") Le dieu amour est l'Eros des grecs. Il est né en même temps que la Terre (II) et sorti directement du Chaos primitif. Ou de l'Oeuf originel dont les deux moitiés ont donné la Terre (II) et le Ciel (I). C'est une force fondamentale du monde qui en assure la Cohésion et préside à la perpétuation des espèces: il va vers l'Unité plutôt que la multiplicité... C'est un autre nom du Désir...
Cet aspect idéal se complexifie dès qu'il sort du rêve et de la nuit pour s'affronter aux désillusions de la lucidité et de l'éveil. Il garde tout l'attrait de ses sortilèges mais devient un monstre dévorant, cruel, entraînant les émotions les plus violentes, les conflits, les déchirements.
Pour les mythographes, il n'est pas opposé à Thanatos qu'il porte en lui-même. Tant que règne la nuit il exerce ses charmes et son pouvoir dans la paix, le bonheur et la quiétude mais c'est dans cette petite mort du sommeil et des songes, blotti au creux de l'imaginaire et de la nuit. Si Psyché se fait vigilante il prend certes une nouvelle beauté, l'éclat resplendissant de la conscience, mais commencent les luttes et les calvaires, les déceptions et les exaltations des amours humaines. Il devient alors perpétuellement insatisfait, toujours en quête de son objet mais toujours arrive à une quelconque satisfaction par des expédients qui ne peuvent le combler.
Cette opposition de l'Eros de Nuit à l'Eros de Jour se double d'une opposition de l'amour dont on est possédé et qui se chante à l'amour qu'on possède et qui se peint. L'Amour que Psyché entend et touche paisiblement se métamorphose lorsqu'elle le brûle dans l'émotion de le voir enfin. En quoi ce mythe est très évocateur d'Echo (cf. chakra VI) et de Narcisse (cf. chakra IV) !...
4. Le Manipura
Il gère la région connue comme "plexus solaire", c'est à dire la zone lombaire, l'estomac, le foie, le pancréas, la rate... Rôle important dans la digestion, les éliminations de produits d'origine interne (globules rouges usés) ou externe (détoxication hépatique). C'est la zone métabolique par excellence avec la régulation de l'absorption (estomac, foie, pancréas) et de la distribution des aliments (pancréas endocrine, foie)...
Au point de vue psychologique il s'agit de la manifestation de soi par rapport à l'environnement intégré comme tel : marquer son territoire, affirmer sa propriété, produire, créer, se produire, se donner en spectacle,... C'est la conquête, la domination, l'affirmation compétitive, la colère et la peur, la stupéfaction, la jalousie, l'orgueil et la honte... Le voyeurisme et l'exhibitionnisme...
Pour la Kabbale, il y a ici deux séphiroths : Hod ("honneur") et Nizah ("victoire").
La troisième demeure du château intérieur (Thérèse d'Avila) comporte la tentation de se faire admirer, de mal supporter le mépris d'autrui, d'etre susceptible.
L'organe de perception est la vue et l'organe d'action l'anus. C'est dire la profondeur de l'expérience yogique : plusieurs siècles avant Freud, l'analité était ici reconnue et décrite.
Les mots relatifs à l'amour et concernant ce chakra concernent la vue et la possession. Par exemple, idolâtrer vient de "idolo-latre" = "qui est le salarié des idoles" (images "sacrées" déconsidérées). C'est à dire, se payer d'images... A (ne pas) confondre avec le latin "adlatro" (gronder, aboyer, crier) sauf à ce que l'idole qui s'en croit finit par devenir tyrannique et le tout pourrait finir en scènes de ménage !...
Un degré plus bas, pour désigner une forme superficielle d'amour, tenant pour beaucoup aux apparences, à ce qui est vu, nous utilisons "s'enticher" : en vieux français = "se souiller, s'entâcher"; se laisser "tâcher" d'une mauvaise marque. Le mot "tâche" vient lui-même du gothique "taikns" è signe (cf. en allemand "zeichen")...
L'aspect monétaire de l'amour se trouve nettement dans l'expression familière "mon trésor". Un autre vocable qui évoque ce chakra "anal" est "chérir" (aimer tendrement). Il y a là une ambiguïté sémantique jouant de "cher"= aimé ET coûteux. L'étymologie exhibe : "carus" (latin) qui a donné "caritas" (charité) lequel signifie tendresse, affection, amour avec cette connotation souvent dénoncée de "donner des sous à un pauvre". Ce terme a connu quelque idéalisation, spécialement chez les chrétiens, de telle sorte que Quintilien peut jouer à dire : "amor: pathos, caritas: ethos" et que l'Eglise l'élève à traduire "agapè". On rapproche "carus" du letton "kars" : friand, plein de désirs. Ce terme apparaît ainsi s'étendre assez pour désigner diverses formes de l'amour : de l'oral au théologal...
Il est au niveau du thorax, vertèbres dorsales et commande au cœur, aux poumons et au Thymus. C'est dire qu'il joue un rôle privilégié dans la lutte, aussi bien vis à vis des animaux que des microbes. Sur le plan affectif, nous trouvons l'espérance, l'anxiété, le remords, l'excitation, le courage, le tact...
La Kabbale place ici la "Beauté" (Tiphereth).
La quatrième demeure de Thérèse d'Avila comporte la possibilité d'accéder au principe de réalité car elle y découvre "la différence qu'il y a entre l'entendement et l'imagination". La mémoire, l'intelligence, la volonté doivent alors être mises en action.
L'organe de perception est le tact, le toucher, l'action étant dévolue au phallus, quel que soit le sexe : nouvel exemple de la prodigieuse sagacité des yogis, capables d'entrevoir ainsi ce qui deviendra avec Freud le "stade phallique".
Le menhir breton est un symbole phallique
Lieu d'affirmation de soi, de l'identité propre du moi, structuration oedipienne, problème de la castration, etc.
L'importance de la jouissance tactile se marque en argot par des formes très expressives comme "en pincer pour", "l'avoir dans la peau".
Le mot "passion" signifie passion, amour à rapprocher de patior en latin et de pathos en grec : mouvements violents de l'âme, souffrance subie passivement ou patiemment. Sont proches les mots français comme "patience", "passible", "passif", pâtir, compatir. "Affection" signifie tendresse, amitié, attachement. Il pourrait dériver du latin ad-facere, c'est à dire "disposer en faveur de", "travailler pour", "toucher", mouvement de l'âme.
6. Le Vishudda
" la incertidumbre
es una margarita cuyos pétalos no se terminan jamás de deshojar"
"l'incertitude est une marguerite que l'on ne finit jamais d'effeuiller"
Mario Vargas Llosa
Il se rapporte au cou, à la partie inférieure du visage et descend jusqu'aux épaules. On trouve là les dents, la langue, le nez, la thyroïde et les parathyroïdes aptes à régler la température du corps, à activer ou atténuer l'ensemble des combustions, à moduler les quantités de Calcium circulant, etc.
Ce chakra est lié à l'affection, la tristesse, le respect, la dévotion, le contentement, la résignation, les mutations (métanoïa), les choix dans le style de vie, le rapport à l'existence, etc.
La Kabbale décrit ici deux séphiroths : Geburah (la "crainte") et Chesed (la "miséricorde").
L'aspect de métanoïa est souligné dans le "Château Intérieur" (Thérèse, 1577) par la métaphore du ver à soie "laid et difforme qui est appelé à mourir pour se convertir en papillon blanc et très agréable" L'organe de perception est l'ouïe, l'organe d'action la parole, le larynx et tout ce qui contribue à la phonation...
(voir les mythes d'Echo et Narcisse, Eurydice et Orphée, Loth et sa femme).
7. L'Ajna
Localisé dans la région du "troisième oeil", il est en rapport avec l'encéphale, les sinus, le nez, le crâne, l'hypophyse et l'épiphyse.
Il est le lieu de la relation au guru, et par extension, à toutes formes d'autorité. Il réunit les instances interdictrices et d'idéalisation (surmoi, idéal du moi).
Pour les Kabbalistes, ici résident l'intelligence (Binah) et la sagesse (Chochmah).
Thérèse (1577) y va d'images jupitériennes où "Dieu appelle comme par un coup de tonnerre" usant de paroles qui "portent avec elles un pouvoir et une autorité à quoi rien ne résiste". Les organes de perception et d'action sont d'ordre parapsychologique (télépathie, influence).
Chez les grecs, face à Eros, voici Agapè (affection, amour fraternel, amour divin, dilection) et agapao (aimer avec affection, avoir une préférence pour)... adorer (forme superlative d'amour): l'étymologie renvoie à "orare ad", c'est à dire "adresser ses prières" « orare » (latin) à se coiffer: lié à "coiffer quelqu'un" c'est à dire le séduire en lui mettant dans la tête une idée; se coiffer de quelqu'un, c'est se le mettre tellement dans la tête qu'il la surplombe (chakra VII ou même Sahasrara).
"cofia" (latin) : casque. Ce mot viendrait de l'ancien germanique "Kuffia" ou "kupfia" (cf. Kopf = tête). Cf. aussi l'expression "se jeter à la tête de quelqu'un"... (VII) "avoir le béguin pour" est synonyme de "se coiffer de quelqu'un" ou "avoir une toquade pour". Ce terme est lié au mouvement des "béguin(e)s" ou "beghin(e)s". Il dériverait du vieil allemand "beggen" = prier, mendier. Avoir le béguin pour, serait ainsi cousin de "adorer". Les bégards (1300) sont les précurseurs du quiétisme (1650). Ils pensent possible la fusion et l'identification à Dieu par l'oraison silencieuse et considèrent que toutes les formes d'amour sont, dès lors, licites (liberté sexuelle). (lié à I, II, VII ?).
On peut aimer à "en perdre la tête", c'est à dire à perdre la raison, la possibilité de se gouverner soi-même. La littérature est abondante... Il existe des indices dans le vocabulaire: « Etre fou de » : le mot "fou" vient du latin "follis"= soufflet, sac, ballon (machine à produire de l'air !). Le "fou du roi" fait du vent, agit sans respect ni raison. Le "fou des échecs" a remplacé "alfin" de l'arabe "al-fil" qui signifie l'éléphant... dans ce cas, l’individu se comporte comme s’il était privé des chakras du haut : c’est le cœur (V) qui décide !
Toquade (et "se toquer de"): engouement passager pour une personne (ou un objet) : onomatopéique signifiant "frappé", touché (cf. "toc-toc" pour dire de quelqu'un qu'il est fou) (voir le mythe d'Athéna sortant toute armée de la tête de Zeus).
Après ces quelques indications, je me contenterai de vous présenter des schémas et tableaux propres à nous rappeler quelques corrélations: certaines sont données par la tradition confortée par la statistique, alors que d'autres sont seulement fondées sur la déduction ou l'analogie.
La colonne intitulée "point de vue topique" est directement inspirée de C. Baudouin (1950).
La colonne "point de vue génétique" correspond à une découverte personnelle que j'avais exposée dans un congrès (Auriol, 1977): on s'appuie sur les organes de perception et d'action attribués à chacun des chakras par la tradition. Si on envisage ces derniers comme centres énergétiques des investissements libidinaux, on trouve immédiatement les divers stades décrits (très postérieurement) par S. Freud (1905, tr. Fr. 1962) et ses successeurs. Lorsqu'on approfondit, en comparant les traits de caractère, sentiments, comportements attribués par le tantrisme à ces différents étages, aux données homologues dégagées par la psychanalyse, la convergence devient très suggestive. Comme est suggestif le rapprochement des colonnes "topique" et "génétique"...
Chakra
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Organe de perception |
Organe d'action
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Pulsion
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Sefiroths gauches
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séfiroths du milieu
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séfiroths droits
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sahasrara |
( ? ) |
( ? ) |
Mystique (?) |
Keter |
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ajna |
E.S.P. (?) |
P.K. ( ?) |
Epistémophilique |
Binah |
Hochmah |
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Vishudda |
Ouïe |
Voix |
Invocante |
Geburah |
Hesed |
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Anahata |
Tact |
Phallus |
Phallique |
Tiphereth |
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Manipoura |
Vue |
Anus |
Anale |
Hod |
Nizah |
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Svâdhishthâna |
Goût |
Main |
Orale |
Iesod |
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Muladhara |
Pied |
Sécuritaire |
Malkhout |
On pourra dégager de ces correspondances quelques hypothèses pour la compréhension psychodynamique des processus de somatisation "vraie", c'est à dire dont le mécanisme ne peut se ramener à une manipulation des organes comme signifiants.
Il est loisible de constater que les points de vue topique, dynamique et économique de la théorie freudienne ont une contrepartie objective, et peut être mesurable, au niveau des différents dérivés métamériques de notre organisme. On devrait probablement en conclure l'existence de phénomènes similaires localisables d'une certaine façon au niveau des différentes parties de l'encéphale (par exemple, les trois cerveaux de Mac Lean, 1973).
Bibliographie Sommaire
Avertissement |
Dans cette étude, comme dans toutes celles que j'ai publiées auparavant, j'ai laissé "entre parenthèses" les points de vue spirituel et métaphysique qui sont pourtant la base traditionnelle et sans doute l'aspect le plus riche de ces constructions et observations : non par mépris de ce socle et de ce couronnement, mais pour rester dans un cadre épistémologique acceptable par la communauté scientifique, quelle que soit l'appartenance doctrinale de chacun de ses membres. De ce fait je cours le risque d'attaques contradictoires: de la part des "scientifiques" pour mon intérêt relatif à un domaine "mystico-religieux" et aussi de la part des "spirituels" pour mon attitude positiviste en un domaine qui exclurait absolument de s'en tenir aux simples phénomènes (3 Octobre 1985). |