Psychosonique en Pédo-Psychiatrie

Dr Joffrin, Françoise

 

11. INTÉRÊT DE L'ÉTUDE DE LA FONCTION D'ÉCOUTE EN PÉDO-PSYCHIATRIE

Nous avons montré, tout au long de notre exposé, comment la fonction d'écoute est liée aux grandes fonctions instrumentales (langage oral et écrit, intégration de l’image du corps, psychomotricité, investissement dans l’apprentissage), ainsi qu'à l'affectivité : reflet des relations intra-familiales et corrélatives des processus d'attachement-séparation. Nous allons retenir essentiellement deux éléments de diagnostic : premièrement, la latéralisation auditive, deuxièmement, la discrimination des fréquences ou analyse tonale.

 



 - 1° - Est-il latéralisé sur le plan auditif ? Un bilan de latéralité est souvent entrepris, concernant la fonction visuelle et la fonction motrice. Il est rarement réalisé en ce qui concerne la latéralité auditive ; il peut rendre compte de l'oreille utilisée, comme il peut apporter une solution thérapeutique, vis à vis de l'oreille droite : l'oreille directrice, analytique, l'oreille du décodage du langage articulé, aux circuits les plus courts, travaillant de concert avec l'oreille gauche, esthétique, celle qui règle les processus prosodiques (intonation ou cri). Une non latéralisation auditive, patente chez le déficient intellectuel, fréquente chez le mal-apprenant, est hautement évocatrice de difficultés dans le registre instrumental comme de troubles du développement psychoaffectif. L'entraînement de l'écoute sur l'oreille directrice est à l’origine   d’ un des premiers gains de la méthode, comme nous avons pu le constater chez maints sujets, entraînant une facilitation dans l'acquisition du langage oral.

Remarque : Une implication pratique pour le thérapeute, sera de parler à l'oreille droite de l'enfant s'il veut se faire entendre de celui-ci ; il en est de même du pédagogue ou de la mère de famille qui, de ce fait, s'adressant à l'oreille à portée linguistique, aura moins à "hausser la voix" pour se faire entendre.

- 2° - Est-il apte à la discrimination ?  Le deuxième élément du diagnostic consiste à :

               - Apprécier la capacité d'analyse tonale ou sélectivité : la discrimination auditive est le fait d'analyser, de séparer, de hiérarchiser (en précisant le sens de cette variation) des fréquences entendues successivement.

               - Déceler les variations et les différences dans l'environnement sonore (les fréquences étant le support des traits distinctifs dont la combinaison engendre les  phonèmes) est une nécessité pour le sujet qui dès lors ne restera plus dans l'indifférenciation et accédera au langage, instigateur des processus d'autonomisation. Nous notons une mauvaise discrimination de l'analyse tonale, c'est-à-dire une fermeture du diaphragme auditif, lors des processus de régression ou d'attachement, et une ouverture de ce diaphragme auditif, lors de l'accession à l'autonomie. Tout ceci témoigne de la solidarité de l'oreille avec les phénomènes inter-individuels et l'évolution des processus intra-psychiques. La discrimination des sons purs, supports de phonèmes, dans leur succession, associée à la capacité d'anticipation est donc la condition d'accession au langage oral, permettant l'ébauche de la mentalisation. Signalons que cette discrimination est aussi impliquée dans l'acquisition des langues étrangères, si difficiles pour l'oreille française souvent "fermée" dans  telle ou telle  plage de fréquences.

Les troubles de la discrimination auditive au niveau de l'oreille droite et de l'oreille  gauche, associés aux troubles de la latéralité, constituent, au niveau du diagnostic, un ensemble syndromique retrouvé chez l'enfant lent, le dyslexique, le sujet porteur : 

- de retard de parole, où l’altération porte sur l’enchaînement des sons à l’intérieur des mots, avec erreurs au niveau de paramètres tels que sourd/sonore, aigu/grave, voire exclusion de bandes de fréquences, ou fréquences rejetées sur l’autre oreille  (troubles de la spatialisation étudiés au chapitre 3-3) , ces altérations étant le subsratum des érreurs constatées par l’orthophoniste telles que : substitutions, omissions, inversions, mutilations.   .      

- ou de retard de langage :lequel porte sur l'organisation du discours, dans sa forme simple ou dans sa forme grave qui est la dysphasie avec expression déficitaire, compréhension perturbée, troubles de la personnalité. En somme, beaucoup de symptômes déficitaires sont intéressés par cet ensemble syndromique, et ces troubles se trouvent magnifiés chez les sujets dysharmoniques et chez l'autiste, dont nous commençons à appréhender la sensibilité au bruit : il y aurait des sujet hyper-auditifs, des sujet hypo-auditifs, ainsi que des sujets aux réponses normales. L'audiogramme de l'autiste est remplacé par les potentiels évoqués tardifs (P 300) ou les oto-émissions, étudiés par le Dr. Descouens de Toulouse.

Ces distorsions se situant au niveau des trois registres de fréquences, graves, médium, aiguës :

les graves correspondent à la zone motrice et instinctuelle : le tambour avec ses graves "fait marcher au pas"  et les basses du rock satisfont une tranche d'âge de sujets plutôt  en quête de mouvement…

Les médium représentent le registre mélodique et la zone conversationnelle, pressentie par Mme Borel-Maisonny pour la courbe aérienne ; la pathologie psychosomatique que nous étudions (pathologie respiratoire) se situe dans ce même registre, appréhendé par la courbe osseuse (la courbe de l'auto-écoute).

Les aigus, qui  sont reconnus même si la fondamentale est soustraite de la fourniture sonore, pour lesquels nous avons supposé  une capacité de charge corticale et  d'éveil  analogue à l'effet  engendré par la musique de Mozart ou celle de Vivaldi. Ils sont   recherchés par les sujets voulant accroître leur tonus mental, leur mémorisation, leur concentration, et surtout leur capacité de discrimination et d’analyse du son. 

Nous tentons, dans ce présent travail, d'affiner les correspondances du registre spectral au niveau de certains ensembles de fréquences, dans leur signification psychologique et cognitive ; comme nous l'avons dit (chapitre 8), comment vibrons-nous lorsqu'un message est perçu au niveau de tel lieu du corps sans avoir eu l'opportunité ou le délai d'être symbolisé ? Nous avons tenté de donner une interprétation psychologique,  de la fermeture du diaphragme auditif évocatrice du retrait, de la répression de l'expression des émotions, de la régression, alors que l'ouverture au monde est corrélative de l'ouverture de la capacité d'analyse tonale de ce diaphragme auditif.

L'étude de la sélectivité (analyse tonale), ainsi que celle de la spatialisation et de la latéralisation, sont des éléments diagnostics statistiquement établis, et peuvent faire partie des examens ambulatoires très facilement réalisables, tant en pratique pédagogique, orthophonique, qu'en pratique psychiatrique.

La correspondance fréquentielle demande un étayage statistique et diverses équipes y œuvrent.

Nous avons abordé certains paramètres de la fonction d'écoute de façon pluri-disciplinaire dans une convergence allant de l'anatomique au psychique, en une finalité dynamique. Nous avons largement sacrifié aux voies de frayage et, partant à l'aspect neurologique. Pouvions-nous en faire l'économie dans l'aspect actuel de nos connaissances sur les relations entre écoute et subjectivité ? De ces présupposés découle une meilleure connaissance de l'espace sonore du sujet ainsi que son approche très simple par le test d'écoute, lequel pourrait faire partie des investigations proposées lors d'une rencontre avec l'enfant dans le cadre de la pathologie pédo-psychiatrique.

Nous avons émis l'hypothèse, dont nous vérifions les données par des audiogrammes, que les différents plans de l'être sont en corrélation avec un ensemble de fréquences. Le langage et la musique auraient-ils une affinité avec ces différents plans étayés sur l'axe vertébral du sujet ? Ce début de statistique, corrélé à d'autres travaux, notamment ceux qui utilisent les potentiels évoqués et les oto-émissions, peut nous inciter à poursuivre cette voie.

ß

La plus grande prudence s'impose relativement à l'interprétation des tests d'écoute. Notre formation de psychothérapeute nous y engage. Nous avons, à la suite des nombreuses hypothèses qui ont été émises, tenté une approche de l'intimité de la fonction d'écoute au moyen de certains paramètres. Puisse cette étude statistique embryonnaire inciter les thérapeutes pluridisciplinaires à poursuivre des investigations au niveau d'autres structures organisatrices du sujet relativement au monde sonore.

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