La Définition de la Relaxation

Introduction aux Méthodes de Relaxation

CHAPITRE 2

Dr Bernard Auriol

 

 

Selon le Littré le mot relaxation est un terme de médecine[1] dont l’étymologie nous renvoie au latin[2] « relaxationem, relaxare ». C’est un « synonyme (…) de relâchement, de tension diminuée ». Pour nous, ce relâchement concerne plus que les fibres musculaires. La relaxation s'oppose au stress, renforce l'homéostasie[3], diminue l'angoisse et l'émotivité, promeut l'unification de l'organisme...

La relaxation comme diminution du tonus musculaire

Chaque fois que nous devons combattre ou fuir[4], conquérir ou simplement agir, nous commençons par tendre un certain nombre de muscles qui nous mettent en posture, en attitude, à l’égard de ce que nous allons faire ou ne pas faire. Souvent, il ne se passera rien et nous restons prêts, aptes à une réaction qui ne viendra jamais:

·        soit que tout soit déjà fini,
·        soit que le mouvement préparé n'ait pas d'efficacité concrète prévisible ou qu'il soit interdit par différents facteurs de passer à l'action.

Ces tensions dans le vide, qui peuvent devenir chroniques (‘je crains constamment que le ciel ne me tombe sur la tête et je la rentre dans les épaules’), représentent un gaspillage énorme d'énergie. Moins se tendre entraînera moins de fatigue ! Mais Gerda Alexander[5] a montré qu'une zone trop relâchée était nécessairement compensée, pendant le quotidien de l'activité, par plusieurs zones trop tendues. Ainsi, l’optimum est une juste tension plutôt qu'une extrême détente.

Pendant les exercices de relaxation on recherche une position ne demandant aucun effort pour être maintenue ; toute contraction sera dès lors reconnue comme inutile voire nuisible.


La tension musculaire est réglée, de manière automatique et involontaire, par la posture de la tête, du corps, par les récepteurs vestibulaires de l'oreille, par la situation des axes visuels et globalement, par le degré de vigilance, d'émotion et d'attente anticipatrice de l'action. Une partie du corps peut rester en état vigilant alors que le reste est plus tranquille. Il existe ainsi des contractures permanentes autour de lieux de traumatismes réels ou imaginaires (la tête, par exemple, après un accident ayant provoqué un choc crânien). Cela peut bloquer les muscles du cou (etc.), et rendre incapable d'un travail normal celui que l'expert qualifie de sinistrosique. L'ensemble du corps, effrayé et courbé par une explosion d'obus derrière soi, restera gelé dans ce tonus, toujours prêt à une nouvelle explosion (« ne plus être surpris ») : c'est la maladie appelée « camptocormie ».

Il s'agit là de faits bien gros, mais de subtiles et profondes terreurs, des désirs à jamais inassouvis peuvent avoir le même résultat. Se relaxer sera, d'une manière ou d'une autre, apprendre à défaire, au plan musculaire, ces nœuds de mémoire (et d'anticipation vaine).

Les mêmes phénomènes peuvent toucher les muscles respiratoires, les battements cardiaques, les muscles lisses intestinaux, stomacaux, vésiculaires, etc.[6]. Se détendre va permettre à la respiration de se faire sereine, au cœur de battre paisiblement, aux contenus digestifs de circuler sans problème de la bouche à l’anus. C’est bien connu : la peur peut déclencher une crise d’asthme, donner la jaunisse (spasme sur le trajet d'évacuation de la bile), entraîner la diarrhée ou la constipation ; d'autres émotions peuvent amener à uriner inopinément, ou trop souvent ou trop rarement, en trop petite ou trop grande quantité, etc. De même, au niveau des vaisseaux sanguins qui sont enrobés de muscles lisses, lesquels peuvent se contracter ou se détendre...

Benson[7] a eu recours à cette réaction de préparation inutile au combat ou à la fuite pour expliquer la fréquence de l'hypertension artérielle dans les milieux les plus défavorisés ou les plus obligés à un incessant effort d'adaptation. De même l'athérosclérose (avec ses conséquences : hémiplégie, « attaques » cérébrales, infarctus du myocarde, etc.) aurait partie liée autant aux nécessités du combat pour la vie dans la cité occidentale qu'à une alimentation inappropriée[8].

A côté de la mise en jeu excessive du système combat/fuite (appelé système « ergotrope »), on connaît une réaction antagoniste, protectrice, gage d’une récupération normale. C'est la réaction « trophotrope » : diminution de la tension musculaire, de la dépense d'oxygène, de la combustion calorique, des hormones catécholaminergiques. On observe chez le chat, dont on stimule ce système[9], un ralentissement cardio-respiratoire et une détente généralisée. Les techniques de relaxation ont pour but de permettre et d'activer le jeu naturel de ce système, protecteur à l'égard du surdosage en stimulations.

A partir de là, certains se demandent si le corps influence le psychique (efficacité de la relaxation) ou si le psychique influe sur le somatique ; pour Reich[10], tension musculaire et refoulement sont une seule et même chose. « Le corps ne contient pas le psychisme, il ne le supporte pas, il est psychisme »[11]. Il en est une lecture par l'observation « externe » (l’aspect « somatique[12] ») et une lecture par l'introspection avec sa traduction dans le discours (l’aspect « psychique »).

Structure des muscles

Au niveau le plus élevé, le muscle dans son ensemble est fait d’un grand nombre de brins qui se regroupent en fascicules. Ce sont ces fibres que nous voyons lorsque nous coupons de la viande. Au microscope, la structure est similaire : on parle de myofibrilles. Ces dernières, à leur tour, sont faites de millions de « sarcomères », entrelacs de myofilaments, lesquels ont pour constituants deux protéines contractiles : l’actine et la myosine. 

En fait, ces protéines contractiles se retrouvent pratiquement dans toute cellule. Mais le tissu musculaire[13] contient beaucoup plus de protéines contractiles que les autres. Dans le muscle ces protéines ont trois propriétés intéressantes :

Ø  elles sont disposées géométriquement ;
Ø  leur arrangement permet un fonctionnement coordonné d’une cellule à l’autre;
Ø  leur mécanique est gérée par un système de régulation utilisant un seul messager : le calcium.
Muscles lisses et striés

La contraction du sarcomère se déclenche à la suite d’un signal constitué par une variation de la concentration intracellulaire en calcium. On peut opposer de façon schématique :

Ø      les muscles striés dans lesquels les variations du calcium intracellulaire  passent par la seule membrane externe sont les plus complexes et les plus structurés. L’excitation se produit quand un changement de voltage permet au calcium extérieur de pénétrer dans la cellule. Ces muscles s’arrêtent dans un milieu dépourvu de calcium[14]. A concentration faible en calcium interne, le muscle est relaxé. On dit de ce muscle qu’il est « plastique », c’est à dire qu’il peut modifier sa forme[15] et même sa structure intime en fonction de l’usage qu’on en fait, l’apesanteur le fait fondre, l’entraînement sportif lui permet de s’étoffer[16]. En se contractant il produit de la chaleur et notre organisme utilise ce mécanisme lorsqu’il fait froid, ce qui explique la nécessité d’être au chaud pour dormir ou se reposer.

Ø      les muscles lisses qui, au contraire, fonctionnent en circuit fermé : le signal électrique y induisent la libération de calcium, à partir d’un sac étanche intracellulaire[17]: ces muscles se contractent même en l’absence de calcium dans le milieu externe. Les muscles lisses n’assurent le mouvement que dans la sphère végétative et se trouvent dans l’utérus, les vaisseaux, l’intestin. Les protéines contractiles qui les composent sont très proches de celles qu’on retrouve dans les cellules non musculaires. Les muscles lisses, qui gainent les vaisseaux sanguins, en se détendant, permettent à une plus grande quantité de sang de circuler; ce sang réchauffe, de façon mesurable, la surface du corps ! C’est ce qui donne la sensation de réchauffement pendant la relaxation.

Il y a muscle et muscle ! (les types de muscles striés)

On distingue plusieurs types de muscles squelettiques[18] striés, notamment :

à        les fibres musculaires « rouges[19] » lentes (Type 1 ) : Elles sont plus minces, mieux ‘irriguées’ par le sang, plus riches en mitochondries et en myoglobine que les fibres plus rapides. Cela leur donne plus de facilité pour recevoir l’oxygène et éliminer leurs déchets[20]. Ainsi sont-elles moins fatigables. Les muscles lents reconstituent leur stock de « carburant[21] » (ATP) essentiellement en présence d’oxygène[22]. L’ATP a aussi des propriétés « lubrifiantes »[23].
à        Les fibres musculaires squelettiques « blanches[24] »  rapides (Type 2A et 2B) commandées par la volonté. Elles sont stimulées souvent pour de brefs moments ; elles doivent se contracter vite et avec force. Elles sont plus fatigables car elles peuvent contracter une dette en oxygène, qu’elles récupéreront seulement au repos.

La gestion musculaire

Les trois catégories de fibres (Types 1, 2A et 2B) se retrouvent dans tout muscle en proportions variées. Lorsque un muscle est amené à se contracter, on observe que ce sont les fibres de type 1 qui sont activées en premier lieu, ensuite les fibres 2A puis 2B si c’est nécessaire. Ce recrutement invariable, ordonné et progressif rend compte de l’époustouflante finesse et de l’incroyable précision des mouvements humains, notamment les plus prestigieux !

C’est aussi cet ordre de recrutement qui rend difficile l’entraînement des fibres très rapides (type 2B), puisque cet entraînement ne commence jamais avant que ne soient activées les fibres plus lentes ! (Types 1 et 2A). Par un tel entraînement on obtient la multiplication progressive de fibres lentes dans des muscles à prédominance de fibres rapides. Le muscle s’étoffe et acquiert des fibres plus résistantes à la fatigue, capables de développer autant de force mais de façon plus économique.

Attitudes et mouvements

Les muscles aptes à une contraction rapide et brève se chargeront plutôt des mouvements[25], les autres plus adaptés à une contraction tenace mais plus lente à installer seront généralement dévolus au maintien des attitudes ou à la préparation du mouvement. Le tonus musculaire[26] désigne l’activité des muscles quand ils fixent les articulations dans des positions déterminées. Cette distribution tonique est intimement liée à l’activité gestuelle, aux actions imaginées par le sujet et aux fantasmes que recouvrent ces imaginations ! De telle sorte qu’il n’est pas surprenant de constater que le névrosé ou le sujet « sain » ému ont une sensation de tension et une malhabileté corporelle plus ou moins intense et plus ou moins durable. C’est alors que nos gestes nous trahissent et nous obligent à nous excuser pour notre maladresse !

Fonctionnement du muscle

Elasticité

L’élasticité n’est pas à proprement parler une propriété physiologique, mais une propriété physique. Un muscle au repos, soumis à l’influence d’une charge, s’étire ; mais l’allongement qu’il subit n’est pas proportionnel à la force de traction.

Sur un muscle au repos, plus la charge augmente, plus il s’étire et se montre élastique (sujets hyperlaxes).

Sur un muscle en état de contraction, au contraire, plus la charge augmente et plus il résiste à l’allongement (sujets hypolaxes)!

Contraction

Une secousse musculaire élémentaire comprend trois parties :

1.      d’abord la période de latence, ou « temps perdu », comprise entre l’application directe du stimulus et l’instant où le muscle commence à se contracter et qui est chez l’homme de l’ordre de 2 à 10 millisecondes ;
2.      ensuite, la période de contraction, ou phase d’énergie croissante, qui s’étend du début de la contraction au sommet de la courbe et dont la durée est en moyenne de 50 millisecondes, mais varie selon les muscles ;
3.      enfin, la période de décontraction, ou phase d’énergie décroissante, encore appelée période de relaxation, qui va du sommet de la secousse au point où le muscle est revenu à son état antérieur à l’excitation et dont la durée est toujours supérieure à celle de la phase précédente.

La forme de la secousse élémentaire est indépendante de la nature du stimulus, de sa durée, de son point d’application, mais elle peut être modifiée dans ses trois phases par des influences physiologiques ou physiopathologiques, telles que les variations de température, la fatigue, l’anémie, l’augmentation de la charge.

Quand, au lieu d’être soumis à un stimulus unique, le muscle subit des excitations répétées, sa réponse varie selon la fréquence des stimulus.

Si la seconde excitation intervient au cours de la période de décontraction de la secousse initiale, à celle-ci se superpose la deuxième secousse ; ensuite, les excitations se répétant à la même cadence, on enregistre finalement un tracé formé d’oscillations successives, qui monte jusqu’à un maximum, puis se maintient en plateau ondulé jusqu’à la fin des excitations.

Si les excitations se reproduisent à une fréquence telle qu’elles surviennent pendant la période d’énergie croissante de la secousse, la courbe atteint d’emblée un niveau élevé et s’y maintient sous la forme d’un plateau rectiligne. Ce type de contraction soutenue déclenchée par des excitations réitérées est appelé tétanos physiologique  ; il est dit imparfait dans le premier cas et parfait dans le second. Il traduit le fait qu’une sommation  des secousses élémentaires est possible.

La production d’un tétanos physiologique est fonction de la rapidité de contraction de chaque muscle ; la fréquence tétanisante sera donc différente pour un muscle lent et pour un muscle rapide. De même, toute influence physiologique ou accidentelle (fatigue) qui modifie la durée de la secousse musculaire modifie en même temps la fréquence tétanisante.

La fibre musculaire se contracte totalement ou pas du tout.

Les fibres ne peuvent adapter leur force de contraction au travail qu’elles doivent accomplir. Mais alors, comment la force musculaire peut-elle s’adapter avec précision aux besoins du sujet ? C’est par un phénomène de “recrutement” : un nombre plus ou moins grand est mis en action selon les circonstances par le système nerveux.

Le nombre de fibres musculaires commandées par un même rameau nerveux[27] est variable selon la fonction du muscle ; il est d’autant plus réduit que les mouvements doivent être précis[28]. Un même rameau peut exciter des fibres relativement éloignées. Certaines fibres musculaires, reçoivent deux ou trois filets nerveux.

La force de la contraction musculaire physiologique est directement en rapport avec le nombre des unités motrices en activité et la fréquence de contraction des fibres musculaires.

Pour une contraction musculaire légère ou moyenne, les unités motrices actives restent en quantité réduite et sont dispersées dans tout le muscle ; le rythme de contraction de chacune d’elles est faible, de l’ordre de 10 à 20 par seconde, parfois même de 5 à 10 seulement, alors que le courant d’action du muscle entier a un rythme beaucoup plus élevé, de 50 à 150 par seconde. Mais il n’y a pas de synchronisme entre les différentes unités motrices en activité dans un même muscle, et c’est précisément cette absence de synchronisation, alliée à l’élasticité particulière du tissu musculaire, qui explique que les nombreuses secousses des différentes unités motrices soient finalement fondues en une contraction soutenue.

Du Tonus ?

La consistance d’un muscle vivant n’est pas molle, mais ferme et élastique et il ne se laisse pas étirer sans qu’apparaisse une résistance[29]. Cette  légère tension et cette résistance portent le nom de tonus musculaire . Il est dû à la présence d’une activité contractile  au sein d’un certain nombre des unités motrices qui le constituent.

Le tonus musculaire prépare le mouvement, fixe l’attitude, sous-tend le geste, maintient la statique et l’équilibre. L’ensemble des structures nerveuses intervient dans son contrôle. Ces structures échangent beaucoup d’informations entre elles et modifient ainsi réciproquement leur intervention propre pour exciter plus ou moins le muscle.

Une observation extérieure de cette contraction « tonique » la fait apparaître comme un phénomène soutenu, lent et à faible consommation énergétique. Elle s’oppose ainsi à la contraction « phasique », grande consommatrice d’énergie dans un temps très court. Le fonctionnement de certains muscles est de type plutôt « tonique », alors que pour d’autres il est plutôt « phasique » ; cette distinction repose sur les proportions relatives de fibres de type lent et de type rapide dans chaque muscle[30].

La régulation du tonus par la moelle épinière

Le fuseau neuro-musculaire[31]

La contraction tonique peut être obtenue par la commande de deux sortes de neurones:

a)      des neurones épais, appelés motoneurones alpha, qui vont de la corne antérieure de la moelle jusqu’aux unités motrices, qu’ils exciteront directement : ils me permettront, par exemple, de contracter mon biceps quand je le déciderai.
b)      des neurones plus fins, les motoneurones gamma, dont l’excitation a pour effet d’amener une contraction des fuseaux neuro-musculaire: cette contraction déclenche alors un réflexe[32] en envoyant un influx aux motoneurones alpha ci-dessus ! (action indirecte). 

Le fuseau neuro-musculaire est une structure particulière : disséminée dans le muscle, elle comporte une partie centrale sensitive et deux extrémités motrices ! Le stimulus spécifique du fuseau neuro-musculaire est son étirement. Si le fuseau est étiré, la moelle épinière reçoit des influx nerveux proportionnels à cet étirement et tout allongement du muscle tend à engendrer une contre-action de raccourcissement[33].

Les fibres nerveuses qui conduisent cet influx du fuseau neuro-musculaire jusqu'à la moelle sont de deux sortes :

1.      fibres I à conduction rapide, sensibles à la vitesse de changement. Elles prédominent au niveau des muscles extenseurs, ceux qui nous permettent de nous dresser.
2.      fibres II simples indicateurs de longueur. Elles prédominent au niveau des fléchisseurs, ceux qui nous permettent de nous recroqueviller.

Le fuseau neuro-musculaire, nous venons de le voir, n’est pas seulement un organe réceptif : il est « musculaire » et peut se contracter sous l’influence de fibres nerveuses particulières en provenance de la moelle: les motoneurones gamma[34]. Mais cette contraction, ce raccourcissement réagit alors, sur les terminaisons sensitives qu’il contient également en son centre (fibres I et II que nous venons de citer) !

A ce système, on doit ajouter d’autres éléments périphériques :

1.       Dans les tendons, les organes de Golgi lorsqu’ils sont soumis à une trop forte traction agissent de manière à diminuer très fortement le tonus du muscle (c’est en quelque sorte un dispositif anti - claquage !) .
2.      Des récepteurs, au niveau de la peau et des viscères, tendent à diminuer ou augmenter le tonus d’un territoire selon l’intensité de leur stimulation… Par exemple un effleurement peut apaiser une tension ; une péritonite au contraire générera une tension extrême des muscles abdominaux (ventre de bois).
Les états médullaires

La "souplesse", d’un sujet au repos n’est pas seulement le corollaire d’une plus ou moins grande longueur de ses tendons et aponévroses, mais aussi de l’importance plus ou moins grande de ses tensions musculaires habituelles (problème de la « laxité ligamentaire » liée pour une part à une plus ou moins grande tonicité « gamma » de base).

On constate une diminution de l’excitabilité réflexe des muscles au moment de leur contraction, qui persiste après la fin de la contraction ; les muscles dont le rôle est opposé (antagonistes) seront au contraire plus excitables ce qui facilitera la posture ou le mouvement inverse. Cet effet est utilisé dans la relaxation induite par contraction volontaire simultanée des agonistes et des antagonistes.

Action du système nerveux central sur le tonus

L’intégration de l’activité tonique
(Régulations supra - médullaires)

Nous venons de voir que l’activité des motoneurones gamma est un élément fondamental du tonus musculaire, mais ces éléments sont eux-mêmes sous le contrôle de tout un ensemble de structures nerveuses centrales.

Toutes les structures cérébrales impliquées dans notre activité sensorielle et motrice sont capables d’influencer le tonus. Le niveau de vigilance a un effet indiscutable au niveau des fuseaux neuro-musculaires. Cette vigilance et la tension psychique qui peut l’accompagner jouent sur la tension musculaire globale de l’individu. Le tonus varie de manière plus fine, subtile et localisée en fonction des mouvements que nous allons exécuter ou des émotions que nous ressentons. Ces dernières étant liées à des imaginations, généralement non conscientes, d’actes ou de perceptions.

Pratiquement toutes les structures nerveuses contribuent par le jeu de leurs coopérations et de leurs conflits à la régulation du tonus dans les différentes parties de notre corps. Ce contrôle nous confère une souplesse de fonctionnement et une faculté d’adaptation permanente aux exigences de la posture, du geste et du comportement vis-à-vis du milieu extérieur.

Parmi les acteurs de cette symphonie citons : les récepteurs articulaires du cou, l’appareil vestibulaire de l’oreille, la formation réticulaire du tronc cérébral, le noyau rouge, le cervelet, le thalamus, l’hypothalamus, le corps strié, le cortex cérébral.

Action du cortex cérébral

En stimulant un endroit du cortex du lobe frontal, on obtient une relaxation musculaire. Le cortex est capable d’atténuer l'effet des stimulations périphériques. Si on supprime l'influence du cortex chez un animal, celui-ci devient extrêmement raide (rigidité de décortication). On peut en conclure que le rôle essentiel de notre substance grise corticale est de freiner l'action tonique des formations nerveuses inférieures. On ne doit donc, en aucune façon, considérer comme une activité de faible valeur le fait de s'entraîner à la relaxation par quelque technique que ce soit : il s'agit là d'activités nobles de renforcement de notre potentiel humain. Le fait que la suggestion voire l'hypnose puissent y jouer un rôle doit être compris comme un artifice permettant de réfléchir sur le Sujet une activité corticale émiettée.

Les types toniques

Schultz[35] distingue :

·      Les normotoniques dont les muscle ont une dureté moyenne ; Il s’agit souvent de personnes trapues, voire « enrobées » dont l’humeur passe, sans crier gare et pour un temps plus ou moins long, de la gaieté à la tristesse et réciproquement[36] !
·      Les hypotoniques dont la dureté du muscle est faible (fréquent chez les minces asthéniques).
·      Un sujet sur dix aurait un tonus variable
·      et un sur cent serait spontanément cataleptique (le sujet conserve l'attitude qu'on lui donne).

De Ajuriaguerra et son école ont poursuivi ce travail et ont proposé de diviser les gens en six catégories:

1. personnes à rigidité homogène de tout le corps
2. personnes à passivité objective globale
3. personnes à vigilance élastique généralisée
4. personnes à élasticité tonique uniforme
5. personnes à contractions parcellaires variables
6. personnes en attente accueillante et confiante.

Ces divisions sont intéressantes mais, dans la réalité, elles ne sont pas toujours adaptées. Il semble préférable de considérer le tonus inadéquat comme « cuirasse caractérielle » selon la manière de voir de Reich, de Lowen et du mouvement californien. On découvre ainsi des zones clefs, même dans les hypertonies généralisées, correspondant à des problèmes précis au niveau historique et au niveau de leur signification topologique[37].

Effets psychophysiologiques de la relaxation

A. Effets Musculaires

La relaxation diminue l'intensité des réflexes (rotuliens) jusqu'à les supprimer (Jacobson). L'enregistrement des courants électriques produits par le muscle montre l’atténuation et même la disparition de ceux-ci[38].

B. Effets Circulatoires

·      La dilatation des vaisseaux entraîne une augmentation de la température de la peau et des échanges caloriques avec le monde extérieur. La température cutanée au niveau des doigts monte de deux degrés en moyenne, la température centrale (mesurée à l'anus) s’élève de 1/3 de degré, en moyenne, pendant « l'exercice de chaleur » du Training Autogène. Ceci, dans des conditions de température externe proches du « confort thermique » (18°). Des exercices prolongés peuvent entraîner au contraire un abaissement de température (-1°,5) et une diminution très importante du Métabolisme de Base (MB)[39].
·      Le volume et le poids des bras et des jambes augmentent par dilatation des veines et capillaires.
·      On a montré chez des hypertendus que l'état de relaxation s'accompagne de diminution de la tension artérielle de 10 à 20 %[40].
·      On observe également une diminution du rythme cardiaque[41] chez les sujets dont le cœur bat trop vite (tachycardie).
·      Chez les sujets ayant subi un infarctus, on peut constater à l'électrocardiogramme une normalisation de l'onde ST ou une élévation de l'onde T de 0,05 millivolt et plus[42].

C. Effets Respiratoires

Le nombre de respirations par minute diminue, c'est-à-dire que la longueur d'un cycle respiratoire (ensemble des mouvements qui se répètent à chaque respiration) s'allonge, et ceci, d'autant plus que la relaxation est plus profonde. Ceci se produit quelle que soit la technique employée[43]. La durée de l'inspiration et de l'expiration tend à s'égaliser (au moins dans le training autogène), alors que généralement l'expiration est plus longue que l'inspiration. L'ampliation pulmonaire est en augmentation comme l'a joliment démontré Geissman[44]. Le type respiratoire d'abdominal devient complet (abdominal et thoracique).

Le ralentissement respiratoire que l’on observe n'a pas seulement une origine psychologique, comme lorsqu'une vigilance accrue nous fait retenir notre souffle pour mieux entendre. Ce ralentissement résulte d'une diminution des besoins en oxygène : le corps au repos réclame moins d'énergie, moins de sucre à brûler et moins d'oxygène pour le faire. Lorsque la relaxation s'accompagne d'une expérience de « béatitude », la respiration peut même s'arrêter totalement pendant de nombreuses secondes. Ce phénomène a été observé notamment pour le Rêve Eveillé, pour la Méditation Transcendantale et le Rebirth[45].

D. Effets Digestifs

Au cours des exercices standard, Sapir[46] a montré que l'allure générale des mouvements de l'estomac se  modifie : on a un passage du bol alimentaire sans à coups, sans rupture de rythme. Le cardia et le pylore s'ouvrent largement et se ferment complètement, y compris chez des patients présentant, en dehors de la relaxation, des troubles de leur fonctionnement. On en voit l'intérêt quand il s'agit de spasmes pyloriques ou de reflux gastro-œsophagien (hernie hiatale).

La concentration passive sur la région abdominale basse avec utilisation de la Formule Organo Spécifique (FOS), « Le bas de mon ventre est chaud » s'accompagne d'une augmentation de la circulation et des mouvements au niveau du sigmoïde (portion terminale du colon)[47].

E. Effets biochimiques

·      On note dans les états de relaxation une diminution du cholestérol sanguin d’autant plus importante qu’il était élevé avant l'exercice[48].
·      On observe par ailleurs une tendance à la normalisation de la fonction thyroïdienne qui s'accentue chez les insuffisants et s'amoindrit chez les hyperthyroïdiens à tel point que Polzien a pu traiter entièrement par le training autogène trois patients thyréotoxicosiques graves.
·      De même la sécrétion de cortisone par la surrénale est diminuée.
·      La prolactine est, elle aussi, diminuée au cours de l'exercice pour remonter après la séance, les sujets pratiquant la relaxation depuis plusieurs mois, voient leur taux de base diminuer progressivement.
·      Il en va de même pour les catécholamines (déchets diminués dans les urines).

F. Effets Cérébraux

·      Les états de relaxation entraînent un renforcement du rythme alpha de l’EEG qui peut apparaître plus fréquemment, persister les yeux ouverts, augmenter d'amplitude et de cohérence, s'étendre à l'ensemble du cortex cérébral, etc.
·      Dans les états les plus avancés (méditation), on a parfois observé des trains d'ondes , très amples, envahissant toutes les dérivations et contemporaines de sentiments intenses de béatitude[49]
.

L'ensemble des données physiologiques que nous venons d'examiner montre qu'il existe un changement mesurable entraînant l'organisme de l '« ergotropisme » ( « préparation active au combat ou à la fuite) vers le « trophotropisme » ( « attitude passive de repos ou de digestion). C'est dans ce deuxième état que l'organisme se règle lui-même, remet les pendules à l'heure entre ses différents organes, abaisse ce qui s'est trop élevé et élève ce qui a trop chuté dans le feu de l'action... Effet normalisateur lié peut-être à un dialogue

·        D’une part entre l'écorce cérébrale et le cerveau primitif (diencéphale),
·        D’autre part entre l'hémisphère gauche (analytique, rationnel, digital, social) et le droit (syncrétique, intuitif, analogique, intime).

Signification psychologique de la relaxation

L'état éprouvé au cours de la relaxation comporte la paix, la sérénité, « l'absorption », voire la « présence », l’ineffabilité, etc. On a vu précédemment que sur le plan métabolique, l’état est celui d’un repos plus profond que le sommeil profond. Cet état de super-repos vigile est appelé « quatrième état » par certains des neurophysiologistes qui s'y sont intéressés[50]. Terme dérivé du fait qu’on connaissait jusque là seulement trois états de la conscience normale : veille, sommeil, rêve. Ce quatrième état est décrit dans toutes les cultures, porté par une construction théologique ou philosophique propre à chacune d'elles comme le remarquent Benson et Ikémi.

1 : Les états de la Conscience

 

Non-Agir

Agir

E

V

E

I

L

 
Eveil Paradoxal

EEG à alpha et dominants

Interactions intéro-internes, cortico-corticales,

Unification et simplification psychologique

Intuition, intégration globale, distanciation

 
Eveil Trivial

EEG à bêta dominant

Interactions intéro-externes (perceptivité)

Processus focalisés par l’action en cours

Perception, séquences d’action

S

O

M

M

E

I

L

 
Sommeil Trivial

EEGà delta dominant

Interactions intéro-internes,

(cortico-viscérales)

Processus d’harmonisation organique

 
Sommeil Paradoxal

EEGà bêta dominant

Interactions intéro-internes

(cortex-structures limbiques)

Processus focalisé endogène

Désirs, séquences de représentations.

 

Les quatre états de conscience

L'existence d'un état particulier de la conscience lié à l'exercice d'une spiritualité et cultivant un état intermédiaire entre veille et sommeil a permis d'employer le terme de « quatrième état de conscience ». Le Yoga emploie également cette expression à propos de « Turyia », état de conscience distinct, plus vaste et qui, supérieur aux trois autres, les englobe.  J’ai proposé[51] d’utiliser plutôt le terme « d’éveil paradoxal » qui a le mérite de lever cette ambiguïté.

Cette ambiguïté n'est d’ailleurs pas sans fondement : cultiver l'état d'éveil paradoxal peut conduire à « Turyia », recherché par les mystiques indiens. En fait, passer de la veille au sommeil[52] suppose d’abandonner l'organisation physiologique propre à la veille pour aller vers le type d'organisation caractérisant le sommeil. Entre les deux états trouve place un moment de « neutralité organisationnelle » qui devrait logiquement survenir aussi  quand on passe du sommeil profond au sommeil paradoxal ou du sommeil paradoxal à l'éveil. Cet état neutre consolidé par une technique appropriée pourrait être notre « éveil paradoxal »...

                        (tableau des ondes cérébrales)

L'évolution des espèces (du reptile à l'être humain), comme de chaque individu lors de sa maturation (du foetus à l'homme mûr), montre que l'état le plus primitif du système nerveux (« sommeil sismique ») est proche du sommeil paradoxal ; ensuite se serait édifié le sommeil lent pour aboutir finalement au cycle complet, tel qu'on le décrit aujourd'hui avec un état « éveillé ».

L'éveil paradoxal pourrait être la conquête la plus récente de l’évolution physiologique. De ce fait cet état est encore mal assuré en l'absence d'exercices appropries.

En psychothérapie, Desoille a montré que la cure de Rêve Eveillé, poursuivie suffisamment longtemps conduit à vivre ce qu’il appelle le régime des « images mystiques ». Il s’agit de représentations ineffables de lumière accompagnées de sentiments « universels ».

Des effets psychologiques profonds et durables, tels qu'une diminution des échelles pathologiques mesurées au Multiphasic Minnesota Personality Inventory (MMPI) ou un accroissement de certaines qualités psychologiques hautement intégrées, surviennent au prix d'une pratique biquotidienne régulière[53]. Smith, Onda et Ikémi soulignent notamment un accroissement d'empathie et de créativité.

La relaxation profonde a été, au cours des siècles, obtenue par la démarche mystique. C'est probablement en raison de leur participation aux pratiques et offices religieux (et, sans doute aussi, en raison de la sécurité contre l'angoisse que leur procure la certitude dogmatique) que les « juifs pieux » sont significativement moins sujets aux accidents cardiaques (infarctus) que les juifs non pratiquants ou athées[54].

De son côté, Thérèse d'Avila écrit « Au moment où le ravissement commence, on cesse de respirer », et « il est suivi par tant de paix, de repos, de profit spirituel[55] ! ». Ainsi, ceux d'entre nous qui adhèrent à un mouvement spiritualiste, ont à portée de main, dans ce cadre, un outil qui concilie leur démarche religieuse et leur besoin d’éveil paradoxal.

Cependant, cet « outil » peut être plus ou moins rapidement actif. Nous décrivons dans les chapitres suivants les méthodes reconnues pour obtenir cet éveil paradoxal.

Mais il existe d'autres moyens naturels d'obtenir la relaxation de manière plus ou moins marquée. Par exemple l'effort est suivi d'un état de relaxation si on se met au calme immédiatement après[56]. La marche nu-pieds provoque un massage de zones réflexes favorable à la détente[57], de même une nourriture simple et frugale, le nudisme au soleil, le bâillement étirement, etc.

L'ambiance de la cité, de la maison, de l'ameublement, la fréquentation de telle ou telle personne, l'attitude des membres du groupe de vie familiale ou communautaire, ont une place de choix dans l'ensemble des facteurs capables de tendre ou de détendre un organisme donné.

On a pu démontrer par exemple, l'heureuse influence des animaux familiers sur les enfants et les adultes. Les enfants qui possèdent un animal se montrent plus sociaux et sucent moins leur pouce. L'animal de compagnie brise la solitude, élimine le sentiment d'inutilité de son maître (surtout si ce dernier est âgé ou solitaire). La compagnie de nos « frères inférieurs » améliore notre santé et prolonge notre vie : la tension artérielle et le rythme cardiaque baissent significativement quand on parle à son chien ou à son chat. Certains patients très anxieux ont vu leurs symptômes - y compris psychotiques - s'amender notablement grâce à l'amitié d'un chien ou des soins donnés à un lapin.

L'usage d'une literie adaptée (sommier et matelas fermes et homogènes, choix du traversin, ou sa suppression par amincissement progressif pour certaines douleurs du cou) évite l'installation de certaines tensions musculaires chroniques (lumbagos, dorsalgies, cervicalgies) et favorise un sommeil réparateur, condition d'une journée efficiente et détendue[58].

Une mauvaise posture au travail peut engendrer bien des difficultés ostéo-musculaires ; on l'a montré chez les dentistes, les pupitreurs, etc. L'emploi d'un siège « assis-à-genou » est tout à fait recommandable dans les professions très sédentaires : il conduit l'usager à se tenir très droit au niveau du tronc, cependant qu'il bénéficie d'un double appui : genoux et fesses.

Certains gestes ou attitudes spontanés ont une réelle influence sur le degré d'anxiété et l'état de tension d'un organisme. Par exemple, le balancement d'un membre ou de tout le corps, certes éprouvant pour l'entourage, permet à l'individu « énervé » de s'apaiser. Il retrouve ainsi quelque chose de la sensation de bercement qu'il a connue, sinon toujours après sa naissance (car bien des parents croient bien faire d'en priver leur progéniture), mais de toutes façons avant sa venue au monde pour peu que sa mère enceinte se soit déplacée en marchant : le fœtus était ballotté à chaque pas selon la démarche absolument unique de sa maman.

Des stimulations vestibulaires semblables mais poussées à leur paroxysme conduisent les maghrébins qui utilisent certaines danses religieuses[59] ou les soufis lorsqu'ils tournoient (derviches syriens) et tous les adeptes d'une forme quelconque de transe (cf. Transe-terpsichore-thérapie de J. Donnars) à des états de conscience particuliers proches de l’éveil paradoxal tel que je le définis ici.

Nous verrons, à propos de chacune des techniques envisagées, leurs effets psychologiques. Insistons dès à présent sur le fait que, d'une manière générale, la relaxation établit des relations à autrui plus stables, plus confiantes et mieux adaptées. Sur le plan interne, l'angoisse et les tendances dépressives diminuent, l'excitation tend à s'apaiser. La structure de l'individu ne se modifie pas de manière sensible, au moins à court terme, mais la « circulation de l'énergie » s'améliore, les fortes différences d'investissement par rapport à tel ou tel secteur de la personnalité s'harmonisent, une certaine fluidité s'instaure qui, sans les effacer, abaisse quelque peu les murs intérieurs et extérieurs décrits par Kurt Lewin.

Je pense que cela suffira à convaincre le lecteur de l'avantage qu'il y a à apprendre une technique de relaxation avant de s'engager dans une forme de thérapie plus complexe, comme par exemple la psychanalyse, la psychothérapie analytique de Jung, la thérapie non directive de Rogers, le Rêve Eveillé, la Bioénergie ou la Gestalt. Le premier intérêt de cette façon de faire est de permettre à certains patients d'éviter d'entreprendre une « thérapie lourde » (ou pire de se confier pour toujours aux drogues). Le deuxième intérêt sera, si le client persiste dans sa demande de thérapie en profondeur, de rendre cette dernière incomparablement plus efficace, avec des à-coups d'angoisse moindres[60].

L'attitude requise pendant la relaxation évoque quelque peu cette attention flottante et cette neutralité bienveillante que propose Freud à l'Analyste lorsqu'il officie. Et aussi la méditation telle que la décrit un moine zen : « Des idées mondaines ou des pensées hors de propos peuvent traverser l'esprit pendant la méditation. Je me contente d'attendre et je permets à ces choses de traverser mon esprit jusqu'à ce qu’elles disparaissent naturellement ». C'est la conscience « Hishiryo », ni tendue, ni molle, ni excitée, ni endormie, sans recherche d'objet. De même la méditation transcendantale combine le non-effort et l'acceptation des perturbations émotionnelles ou imaginaires surgies spontanément. On pourrait en dire autant, pour l'essentiel, de Vipasana et de toutes les techniques que nous rassemblons ici quand elles sont utilisées au mieux. Ainsi, sera évité le danger non négligeable qu'elles représentent, lorsqu'elles conduisent à de soudains changements d'humeur (euphorie, élation, ou au contraire déprime, acédia). Si le sujet reste témoin de ces phénomènes sans s'identifier à eux, ils disparaissent et la personnalité gagne en liberté et en solidité. Dans le cas contraire, on peut craindre qu'illusion et désillusion ne se répondent... C'est ainsi que des cas de décompensation, plus ou moins durable et importante, ont pu être décrits à la suite d'un usage mal guidé des « états modifiés de conscience » : Oraison chrétienne, Hypnose, Training Autogène, Zen, Vipasana, Méditation Transcendantale, etc.

On ne saurait utiliser cet argument pour privilégier certaines voies, étant bien entendu qu'il n'y a aucune raison, théorique ou empirique, qui invite à croire qu'il puisse exister une méthode universellement parfaite. On doit seulement connaître cet aspect du problème pour se servir convenablement de l'approche la mieux adaptée : choisir un enseignant expérimenté[61], suffisamment pourvu de bon sens et consulter un psychothérapeute si l'on perçoit de l'exaltation, de la dépression ou une forme quelconque d'inquiétude. Selon Ikémi, la raison de tels phénomènes négatifs est la confrontation avec un matériel inconscient et anti-homéostatique. Chez certains sujets, cette confrontation était évitée jusque là par l’emploi des défenses psychologiques décrites par la psychanalyse : refoulement, déplacement, condensation, déni, etc. Ces défenses sont affaiblies non seulement lors du rêve, comme l'a montré Freud, mais aussi pendant l’éveil paradoxal. Ces manifestations peuvent être vécues comme des « éliminations de tension », des « décharges cathartiques » et avoir un effet de nettoyage (« cleaning » de Ram Chandra), de purification, salutaire à long terme, si l’on a pu traverser sans encombre les fausses lumières et les fausses ténèbres...

Tableau 2

Effets physiologiques comparés de quelques techniques de relaxation
(d’après Benson, MAJ par l’auteur)

Technique

Consommation

d’Oxygène

Rythme respiratoire

Rythme cardiaque

Tension Artérielle

Ondes EEG alpha

Tension Musculaire


M. T.

-20 %

si HTA

S’ajuste


Zazen

si HTA

S’ajuste


Hatha Yoga

si HTA


Training
 Autogène

si HTA


Hypnose


Effets dépendant des suggestions d’induction

Hypnose + relaxation suggérée

si HTA


Benson

?

?

Cycles Sentiques[62]

?

?

?


Rêve Eveillé

-20 %

?

 

 

 

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Psychosonique Yogathérapie Psychanalyse & Psychothérapie Dynamique des groupes Eléments Personnels

© Copyright Bernard AURIOL (email : )

30 Décembre 2002



[1] Et aussi un terme de jurisprudence : la relaxation d'un prisonnier, sa mise en liberté. En droit canon, la relaxation des peines, signifie leur diminution ou leur entière rémission.

[2] en Provençal « relaxatio »; en espagnol « relaxacion », en italien « rilassassione ».

[3] Propriété des unités structurées qui tend à maintenir quasi-constantes ou à laisser varier périodiquement autour d’une moyenne constante les paramètres qui rendent compte de leur identité ; ces unités structurées sont pour l’essentiel les organismes vivants, pris isolément ou regroupés dans un lieu donné (biocénoses).

[4] Cf. BENSON. Réagir par la détente, Tchou. 1976, pp. 18 sq.

[5] G. ALEXANDER cf. Chapitre sur l'eutonie.

[6] J’emploie assez souvent le terme etc. pour indiquer, en suivant les recommandations de Korzybski (G. ALEXANDER cf. Chapitre sur l'eutonie) dans sa théorie de la Sémantique Générale) combien les énumérations que nous pouvons faire ou les définitions que nous pouvons donner sont restreintes et susceptibles d’extension... (Alfred Korzybski, Science and Sanity, The International Non-Aristotelian Library Publishing Company, 1933)

[7] BENSON. op. cit., pp. 58 sq. On rapprochera ces vues de celles de Henri Laborit qui attribue à l’inhibition de l’action tout le cortège psycho-somatique et même névrotique ; son point de vue est illustré dans le film qu’il a commis avec Alain Resnais « Mon Oncle d’Amérique ».

[8] sans nier l'importance relative de dernier ce facteur... On sait que le « régime crétois » ou « toulousain » doit ses vertus aux fruits et légumes, aux graisses d’oie, de canard et de poissons, mais aussi au rythme « cool » de la vie dans ces régions…

[9] Par une décharge électrique dans un secteur donné de l'hypothalamus.

[10] W. REICH. La fonction de l'orgasme. L'Arche, 1971, 2e éd. Fr., Chap. VIII. pp.233 et sq. ; L'Analyse Caractérielle, trad. Française. Payot, Paris, 1967.

[11] GEISSMAN et DURANO DE BOUSINGEN. Les Méthodes de Relaxation. Dessart, Bruxelles. 1968, p. 152.

[12] J’entends bien souvent qualifier un trouble de « somatique » pour signifier qu’il est d’origine psychique. Cette façon de s’exprimer est incorrecte et source de confusion. Il est plus juste de dire, dans un tel cas que le trouble dont on parle « est de nature psychosomatique ». En bon français, un trouble « somatique » est un trouble qui est purement physique, purement organique, pour lequel on n’évoque pas une cause psychologique.

[13] Et aussi les cellules ciliées externes de la cochlée.

[14] normalement, le calcium externe est dix mille fois plus concentré que le calcium interne.

[15] Par exemple le type d’entraînement change la forme du corps : le yogi a des muscles peu saillants mais très souples et résistants ; l’athlète a des muscles saillants mais relativement fragiles (claquage).

[16] Tout l’équipement enzymatique, ou presque, de la cellule musculaire du biceps de l’athlète entraîné va être modifié.

[17] appelé « reticulum endoplasmique ». La concentration en Ca++ dans cette structure est élevée. Sa décharge intracellulaire est dépendante du voltage et peut être, dans certains muscles, autocatalysée par le courant entrant Ca++ provenant de l’extérieur. Sa recaptation (donc recharge du reticulum), déterminant majeur de sa relaxation, est gérée par les catécholamines. La contraction du muscle lisse est régulée, entre autres, par les catécholamines et par le monoxyde d’azote (NO). Le traitement de l’hypertension artérielle fait usage des bêtabloquants qui contrarient une partie de l’action des catécholamines.

[18] Ce sont eux qui nous permettent de modifier la position d’un os par rapport au reste du corps (par ex. le biceps).

[19] Ranvier  - 1873.

[20] gaz carbonique, acide lactique, etc.

[21] ATP ou Adénosine Tri Phosphate, accessoirement sa forme de réserve: le phosphagène.

[22] Ce qui implique une bonne respiration, une bonne circulation et un nombre optimal de globules rouges. Un excès de ces derniers présente des inconvénients : ils ont été amplement décrits à propos du dopage des sportifs cyclistes par l’EPO (érythropoïétine).

[23] l’ATP disparaît des tissus après la mort, ce qui explique la rigidité des muscles d’un cadavre par contracture irréversible des ‘sarcomères’.

[24] Sa couleur est due à sa pauvreté en myoglobine et en mitochondries. L’énergie est produite par les mitochondries à partir du glucose sanguin. Plus il y a de mitochondries dans une fibre musculaire et plus elle est apte à produire de l’énergie !

[25] La contraction entraîne dans ce cas un déplacement d’au moins une des extrémités par un raccourcissement du muscle : elle est dite isotonique.

[26] Dans ce type de contraction, il n’y a pas de raccourcissement musculaire, mais une mise en tension des fibres : la contraction est dite isométrique.

[27] « Unité motrice »

[28] 13 fibres par « unité motrice » pour les muscles de l’œil, 108 pour les muscles de la main, 750 pour le biceps, 1 730 pour le mollet.

[29] . Ces caractères disparaissent totalement s’il est isolé de l’organisme, ou si, en le laissant en place, on sectionne les fibres nerveuses qui y parviennent, ou si l’on détruit la moelle épinière de l’animal.

[30] voir plus haut ce que nous avons dit de ces deux types de fibres musculaires.

[31] Cf. B. Auriol, Prolégomènes à une Yogathérapie de Groupe, pp.111-167 , Sitec, 1970. Consultable sur le web : « http://auriol.free.fr ».

[32] Le réflexe myotatique, qui est à l’origine des réflexes courants, comme celui obtenu lorsqu’on frappe le tendon au dessous de la rotule.

[33] Le réflexe myotatique (stretch reflex  de C. S. Sherrington)

Une expérience simple consiste à sectionner non plus le nerf moteur d’un muscle, mais un certain nombre de racines rachidiennes postérieures. Tout tonus disparaît alors dans le groupe musculaire correspondant. Les racines rachidiennes postérieures ne contenant que des axones sensitifs, l’effet de leur section met en évidence l’origine réflexe du tonus.

[34] Le motoneurone gamma est commandé par les parties hautes du système nerveux ; son activité règle, à chaque instant, la longueur du muscle.

[35] D'après GEISSMAN et DURAND DE BOUSINGEN, op. cit., pp. 118-119.

[36] Les personnes dont l’humeur oscille, selon les époques, entre euphorie et abattement sont appelées « cyclothymiques ».

[37] Chaque zone du corps divisé en tranches (ou « métamères ») serait porteuse d'une signification spécifique étudiée en particulier par le Yoga. l'Acupuncture (Jenn Mo et Tou Mo) et la Végétothérapie Caractéro-analytique de Reich avec son avatar connu sous le nom de bioénergie (Lowen).

[38] Schultz citant Von SIEBENTHAL et coll. (Cf. aussi R. CHERCHÈVE, « Modificaciones fisiologicas en nuestra experiencia sofro­nica », in Sof. Med.. t. III , pp. 251-254, édité par la Société Internationale de Sophrologie de Barcelone ; C.R. du Premier Congrès Mondial de Sophrologie, 1970).

[39] En anglais : BMR (‘basal metabolic rate’). C’est la mesure de l’énergie dépensée par un individu éveillé mais au repos absolu (état ‘basal’). Pour le mesurer on se sert de la consommation d’oxygène, évaluée quelques seize heures après le dernier repas. Plus il y a d’oxygène dépensé dans un temps donné, plus le processus oxydatif est important et plus le métabolisme de base est élevé.

[40] Ces modifications favorables ne sont pas à attendre de manière déterminante lorsque la tachycardie ou l'hypertension artérielle sont liées à des lésions irréversibles de type «organique ».

[41] GEISSMAN et DURAND DE BOUSINGEN, op. cit., pp. 170 et sq.

[42] J.-H. SCHULTZ et W. LUTHE. Autogenic Training : psychophysiological approach in psychotherapy, Grune et Sratton Pub. N.Y. et London, 1959. W.LUTHE et coll. Autogenes Training. Correlationes psychosomaticae,G. Thieme Verlag, Stuttgart, 1965.

[43] Au contraire, dans les états s'accompagnant d'angoisse, notamment chez les personnes hospi­talisées en psychiatrie ou pour des maladies psychosomatiques, on a pu relever des cycles respiratoires raccourcis et très irréguliers dans leur durée et la forme de leur déroulement.

[44] P. GESSMAN, Communication au III e Congrès Mondial de Psychiatrie. Mon­tréal, 1961 - C.R. vol. III. ,pp. 463-505. Cf. aussi la communication de R.ABREZOL au 1er Congrès Mondial de Sophrologie - C.R. in Sof Med., t.III, pp.243-250.

[45] On l'a noté aussi lors d'absorption intérieure de type autistique chez certains patients diagnostiqués « schizophrènes ». CORWIN et BARRY, Pauses respiratoires dans le rêve éveillé et  la schizophrénie. (American Journal of Psychiatry. sept. 1940, n° 97. p. 808).

[46] SAPIR et. coll. Communication au IVe Congrès Mondial de Psychiatrie, Madrid, 1966 - C.R. in Excerpta Medica - International Congress. Series n0 117, pp. 40 sq. A ce sujet Cf. aussi le chapitre du présent ouvrage consacré à la Biodynamique de Gerda Boyesen.

[47] IKÉMI et coll., cité in GEISSMAN et DURAND DE BOUSINGEN. op. cit. p. 179. Voir aussi IKÉMI et coll.. The biologic wisdom of self- regulatory mechanism of normalization in autogenic and oriental approaches in psychotherapy, Pro. 9th Int. Congr. Psychother.. Oslo 1973. Psychothor. Psychosom. 25 : 99-108 (1975). On trouvera d'autres références importantes dans les notes du chapitre sur la méditation transcendantale. La régularisation des mouvements digestifs est l'effet essentiel de la psychologie bio-dynamique cf. p. ? ? ?

[48] GEISSMAN et DURAND DE BOUSINGEN. op. cit.. pp. 183-185.

[49] Conférence Internationale sur l'E.E.G.. de la méditation transcendantale et de la Méditation Transcendantale - Siddhis, Seeligsberg. 1-4 avril 1978. (PATY. K. BADAWI, A.-M. ROZERÉ).

[50] Durand de Bousingen a tendance, comme Benson, à considérer que les états autogènes  profonds peuvent rejoindre certains des états obtenus par la Méditation Transcendantale (comm. pers.. janv. 1978). Beaucoup d'auteurs, comme le remarque en le déplorant Y. Ikémi lors du colloque de Tsukuba. préfèrent parler d' « états altérés de la conscience »  ou A.S.C. (Altered States of Consciousness ). Ce terme (proposé par Charles Tart) a l’avantage et l’inconvénient de regrouper avec le Quatrième Etat (que nous croyons agréable. naturel et même nécessaire) certains états, toxiques ou pathologiques (qui sont dangereux ou pénibles). C’est pourquoi nous préfèrerons, pour des raisons qu’on lira plus loin, parler « d’état d’éveil paradoxal ».

[51] Et qui a été repris, de manière indépendante semble-t-il, par François Roustang dans son ouvrage sur l’hypnose.

[52] Cf. P. Etevenon, Du rêve à 1'éveil. Bases Physiologiques du sommeil, Albin Michel, 1987.

[53] Cf. SMITH J.-C.,  « Méditation as psychotherapy ;  a review of the literatu­re », Psychol. Bull. 82,558-564(1975). Cf. aussi ONDA A., « Zen. hypnosis and creativity », Interpers. Dev. 5,156-163 (1975). Voir aussi la conférence d'Y. Ikémi au colloque de Tsukuba.

[54] H. NEUFELD et MEDALIE. Hôpital de Tel Hashourer. Tel Aviv , cités in Quotidien du Med., 1492 (13.8.1977), p. 5.

[55] in « Château de l'âme » p. 130

[56] Ce procédé est celui de la « Médita­tion Dynamique » de Bagwan Rajneesh.

[57] méthode Kneipp (voir encadré).

[58] cf. Groupe Lit et Santé CSNL, 6, av. du Coq, 75009 Paris.

[59] cf. A. Harakat. Thèse de Psychologie sur les danses confrériques au Maroc (Université de Toulouse le Mirail).

[60] La relaxa­tion met de l'huile dans le moteur de la thérapie.

[61] Fut-il nommé « Directeur de Conscience » ou « gourou ».

[62] Technique des « cycles sentiques » de M. CLYNES, d'après BENSON, Op. cit., p.85.23.