L'Oreille et la Voix d'après le Dr Tomatis

Aloma Bardi

Traduction française de Roberta Prada

 

Le médecin français Alfred Tomatis est né à Nice en 1920 dans une famille d'origine piémontaise. Cet oto-rhino-laryngologiste spécialisé en phoniatrie fut un personnage controversé durant sa vie et encore cinq ans après sa mort, survenue le jour de Noël 2001. Il fut célèbre en France comme médecin des chanteurs. Très mélomane, il aimait par dessus tout l’opéra italien et Mozart.

Devenu célèbre pour ses études sur la clinique de l'oreille, l'écoute, le langage, la communication et l'apprentissage des langues, il a soigné aussi certains problèmes psychologiques et la dyslexie. Il fut l’instigateur de la thérapie par la musique filtrée, obtenue tout d’abord de manière électronique, ou aujourd'hui par des moyens informatiques. Il a laissé un héritage tout autant controversé et le débat reste ouvert entre groupes et écoles plus ou moins directement liés à lui ; revendiquant une légitimité ou au contraire évitant de mentionner son nom.


La méthode qui se base sur les découvertes de Tomatis est aujourd'hui utilisée au moins dans 15 Pays. Le concept sur lequel elle se fonde réside dans le processus, la pratique et la conscience du contrôle de l'oreille et de l’écoute sur beaucoup de facultés. Donc de l’idée originairement médico-acoustique, du champ physiologique, on est entraîné à une extension des applications au domaine musical et à la musicothérapie. Des écoles bourgeonnantes répandent internationalement la pratique de la méthode.

Parmi les nombreux écrits du Docteur, des titres à saveur d’autrefois : L'oreille et le langage (1963), Éducation et dyslexie (1972), De le communication intra-utérine au langage humain (1974), Vers l’écoute humaine (1974), son autobiographie L'oreille et la Vie (1977), La nuit utérine (1980), L’oreille et la voix (1988), Pourquoi Mozart ? (1991), Nous sommes tous nés polyglottes (1991).

L' oreille et la vie est d’une lecture fascinante même si on y trouve des exagérations et quelques répétitions, qui ne coïncident pas toujours avec la biographie réelle du Docteur. Dans chaque œuvre se trouve mis en relief le style, plein de force et de vie, propre à Tomatis.

L'oreille et le voix, maintenant disponible en anglais dans l'édition publiée aux Etats Unis (The Ear and the Voice, adaptation et trad. de Roberta Prada, Francis Keeping et Pierre Sollier, Scarecrow Press 2005, à partir de la publication originale Laffont) a une importance fondamentale, même si certaines de ses affirmations sont difficiles à vérifier. L'édition américaine a été revue pour plus de concision et d’accessibilité par rapport au style poétique du Docteur.

Pourquoi Mozart ?, sur le thème de la musicothérapie et de la souveraineté de Mozart comme compositeur thérapeutique, il a eu beaucoup de disciples dans la Mozart-thérapie états-unienne et dans l'inflation d'écrits et d'activité à ce propos. Le mythe mozartien du miracle et sa légende constituent le fond de la théorie de Tomatis. Au delà de ce point de vue musicologiquement et critiquement ingénu, (surtout dans ses évaluations des autres compositeurs et sur les raisons pour lesquelles ils ne sont pas aptes à être employés dans la thérapie), Pourquoi Mozart ? se centre réellement sur Mozart du point de vue de l'acoustique, vrai territoire du Docteur : une telle approche est totalement étrangère à l'histoire de la musique et à la musicologie, au point qu’il serait tout aussi naïf et source de malentendus que d’évaluer le travail de Tomatis sous cet angle.

Aventure fascinante aujourd'hui que de tenter une analyse d'Alfred Tomatis thérapeute de l’écoute et de la musique, de son magnétisme et de ses intuitions lumineuses, de ses ambitions musicologiques.

Mais devant la surabondance des matériaux documentaires, dispersés en beaucoup de sources et avec des niveaux de qualité contrastés, comment évaluer ses découvertes ? Une lecture critique sera fructueuse. Mais pour cette investigation, il est surtout indispensable d’évaluer la composante physiologico-acoustique dominante de sa position et d’expérimenter directement l'écoute de la musique filtrée. Il faut même accepter qu'une méthode éducative et/ou thérapeutique ne doive pas nécessairement être confirmée scientifiquement dans chacune de ses partie pour être validée et voir labellisés les résultats observés.

Finalement, dépouillées de leurs oripeaux, les théories du Docteur - même au cas où elles seraient en partie contredites - son défi quant à la nécessité d'augmenter la puissance de l'oreille reste... digne d’être écoutée.

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19 Juin 2007